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Le réalisateur ukrainien Oleg Sentsov libéré après cinq ans de camp

Le réalisateur Oleg Sentsov, devenu un symbole de la résistance ukrainienne à la Russie, a été libéré après cinq ans passé dans les geôles russes. Il fait partie d'un échange de prisonniers entre les deux pays.

Article rédigé par franceinfo Culture avec AFP
France Télévisions - Rédaction Culture
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Temps de lecture : 5min
Oleg Sentsov avec sa fille Alina, à sa descente d'avion à l'aéroport international de Boryspil près de Kiev. Le réalisateur ukrainien a été libéré lors d'un échange de prisonniers (7 septembre 2019) (SERGEY DOLZHENKO / EPA / NEWSCOM / MAXPPP)

Le réalisateur et militant politique ukrainien Oleg Sentsov, dont l'emprisonnement en Russie avait provoqué une campagne internationale, a été libéré et remis à l'Ukraine le 7 septembre. Il fait partie des 70 prisonniers en cours d'échange entre la Russie et l'Ukraine. Arrêté en 2014 et condamné à 20 ans de prison pour préparation "d'attaques terroristes", il a passé cinq ans dans un camp de la région arctique russe. Il est devenu un symbole de la résistance ukrainienne à la Russie, notamment après sa grève de la faim de 145 jours.


Oleg Sentsov était un réalisateur ukrainien prometteur jusqu'à ce que son engagement politique lors du soulèvement pro-européen du Maïdan à Kiev à l'hiver 2014, puis l'annexion de la Crimée quelques semaines plus tard par Moscou ne bouleversent son destin.

"Gravement éprouvé" par sa grève de la faim

Reconnu coupable par la justice russe de "terrorisme" et "trafic d'armes" en 2015 dans sa Crimée natale, à l'issue d'un procès dénoncé comme "stalinien" par l'ONG Amnesty International, Oleg Sentsov, 43 ans, était depuis détenu dans une prison du Grand nord russe.

En mai 2018, entamait une grève de la faim pour exiger la libération de tous les "prisonniers politiques" ukrainiens détenus en Russie. Sans succès, malgré des discussions entre les présidents russe et ukrainien et de nombreuses marques de soutien dans le monde, notamment de la part d'artistes et d'intellectuels comme Jacques Audiard, Jean-Luc Godard, Bertrand Tavernier, Stephen King...

Le 5 octobre, après 145 jours de jeûne qui l'avaient terriblement affaibli selon ses proches, le cinéaste avait annoncé l'arrêt de sa grève de la faim de peur d'être nourri de force. Selon sa cousine, Natalia Kaplan, sa santé a été "gravement éprouvée" par cette longue grève de la faim.

Récompensé à Rotterdam en 2012 pour "Gamer"


La libération d'Oleg Sentsov semblait jusqu'à présent plus improbable que jamais, alors que le réalisateur se refusait à demander une grâce présidentielle. Nombre de ses soutiens avaient perdu espoir.

De sa carrière de cinéaste, le public retient surtout son film Gamer, tourné avec seulement 20.000 dollars de budget. Il raconte l'histoire d'un adolescent qui participe à des compétitions de jeux vidéo tout en faisant face à une vie quotidienne difficile dans un village d'Ukraine.

Un film issu de l'expérience personnelle d'Oleg Sentsov qui a consacré huit ans de sa vie aux compétitions de jeux vidéo et financé son film en travaillant en tant que gérant d'une salle de jeux à Simféropol, la capitale de la Crimée. Tourné dans un style réaliste, Gamer, montré dans de nombreux festivals européens, a été récompensé à Rotterdam en 2012, ce qui avait permis au cinéaste de se lancer dans le tournage de son deuxième long-métrage.

Militant contre l'annexion de la Crimée


Mais la préparation de "Rhino" avait été interrompue quand ce père de deux enfants avait décidé de s'engager dans "Automaïdan", une des branches du mouvement pro-européen qui a conduit à la destitution du président ukrainien Viktor Ianoukovitch en février 2014. Le réalisateur avait ensuite milité contre l'annexion de la Crimée par la Russie, se souvient Kostiantyn Reoutski, un militant ukrainien l'ayant côtoyé à cette époque.

"Oleg et ses camarades organisaient des rallyes automobiles en Crimée, avec des symboles et des drapeaux ukrainiens. Ils en accrochaient aussi aux murs (...) et ils ont continué de le faire après l'annexion, quand tout le monde était parti", avait-il raconté à l'AFP en 2015. "C'est une personne réfléchie, responsable et pleine d'initiative (...) Son but était de montrer que la Crimée n'était pas prorusse à 100%", ajoutait-il.

Deux mois après l'annexion, dans la nuit du 10 au 11 mai, le réalisateur était arrêté chez lui, puis transféré à Moscou dans la prison de haute sécurité de Lefortovo.

Une force de caractère hors du commun

Le cinéaste avait fait montre d'une force de caractère hors du commun, souvent souriant et parfois provocateur au cours de son procès. Il était accusé d'avoir organisé des incendies criminels contre des permanences d'un parti pro-Kremlin et d'avoir planifié d'autres attaques, dont une visant une statue de Lénine à Simféropol.

"Il m'a fait penser à un malade du cancer persuadé qu'il vaincra la tumeur et qu'il vivra", avait raconté à l'AFP la journaliste et militante des droits de l'Homme Zoïa Svetova après l'avoir rencontré en août 2018 dans sa prison du Grand Nord russe.

L'Ukraine et la Russie procédaient samedi 7 septembre à un échange historique de 70 prisonniers, un acte très attendu alors que Moscou et Kiev sont à couteaux tirés depuis l'annexion de la péninsule ukrainienne de Crimée par la Russie et le début du conflit dans l'est de l'Ukraine en 2014

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