"Le Vent se lève" : Hayao Miyazaki en plein ciel
Film d'animation de Hayao Miyazaki (Japon) - 2h06 - Sortie : 22 janvier 2014
Synopsis : Inspiré par le fameux concepteur d’avions Giovanni Caproni, Jiro rêve de voler et de dessiner de magnifiques avions. Mais sa mauvaise vue l’empêche de devenir pilote, et il se fait engager dans le département aéronautique d’une importante entreprise d’ingénierie en 1927. Son génie l’impose rapidement comme l’un des plus grands ingénieurs du monde. "Le Vent se lève" raconte une grande partie de sa vie et dépeint les événements historiques clés qui ont profondément influencé le cours de son existence, dont le séisme de Kanto en 1923, la Grande Dépression, l’épidémie de tuberculose et l’entrée en guerre du Japon. Jiro connaîtra l’amour avec Nahoko et l’amitié avec son collègue Honjo. Inventeur extraordinaire, il fera entrer l’aviation dans une ère nouvelle.
Polémique
Habituellement accueilli avec enthousiasme à chaque film, Miyazaki n’a pas fait l’unanimité avec « Le Vent se lève », annoncé comme son dernier long métrage. Le sujet retraçant la biographie du concepteur du chasseur « Zéro » a en effet fait polémique du fait de l’efficacité de cet avion qui fit des ravages chez les alliés durant la guerre dans le Pacifique, et qui servit notamment aux fameux kamikazes pour se crasher sur les porte-avions américains. Un appel au boycott du film a également été lancé en Corée du Sud pour les dégâts que fit le « Zéro » durant sa guerre contre le Japon.
Sujet : MJ Jouan, V. Castel
On ne peut toutefois pas qualifier Miyazaki de va-t-en guerre. Ce qui le passionne, c’est évoquer les turpitudes d’un créateur unique dans lequel il s’est retrouvé, qui a traversé des épreuves tel que le séisme de Kanto en 1923, la Grande Dépression, l’épidémie de tuberculose et l’entrée en guerre du Japon, sans jamais démordre de ses objectifs. Son but, avec le « Zéro », était de créer l’avion le plus efficace, non en terme guerrier, mais pour son aérodynamisme. Il s’est seulement présenté au mauvais moment. A noter que l’on n’a pas fait un tel procès aux Britanniques qui conçurent un des chasseurs les plus performants avec le « Spitfire ». Celui-ci provoqua d’immenses pertes au sein de la flotte nazie et permit, en partie, aux alliés de remporter la Bataille d’Angleterre.
Histoire et poésie
Mais « Le Vent se lève » ne se limite pas à un film sur l’ingénierie aéronavale. C’est aussi le portrait d’un homme intègre qui doit se battre contre vents et marées pour imposer ses idées. C’est également une belle histoire d’amitié avec son collègue Hongo et une histoire d’amour touchante avec Nahoko, répartie sur tout le film, comme un leitmotiv. Des sentiments que traduit une fois encore le compositeur fidèle à Miyazaki, Joe Hisaishi, dans ses partititons aériennes, aux cordes sensibles et enlevées, inséparables du maître de l'animation japonaise.
La mise en images est encore remarquable, éblouissante, et revient au style si précis et évocateur de Miyazaki dans ses plus grands films, délaissant le caractère un peu brouillon de son opus précédent « Ponyo sur la falaise ». Les scènes de vols rêvées par Jiro avec son idole italienne dans les années 20, Giovani Caproni, sont de toute beauté. Ainsi que ses paysages aux prairies verdoyantes, comme il est le seul à pouvoir les rendre. La scène du tremblement de terre de Kanto est très impressionnante et ses scènes de foule spectaculaires. La révolution industrielle en cours est également essentielle au film, avec ses visions d'usines, de trains à vapeur et bien sûr d'avions. Autant de signes soulignant la fin d'un monde et le début d'un autre qui va sombrer dans la guerre. Mais Miyazaki retrouve par instants son évocation bucolique de la nature, fil rouge de tout son œuvre. Au croisement de l’Histoire et de la poésie, « Le Vent se lève » demeure l’un des plus beaux films de son auteur qui, s’il se retire effectivement, manquera au cinéma mondial.
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