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Les films de l'été : moins de blockbusters et plus de films d'auteurs

Alors que juillet et août sont depuis plusieurs années consacrés aux blockbusters, ils sont minoritaires en cette saison qui va plutôt voir une déferlante de films d'auteurs. Mais l'on aura droit aussi à quelques reprises de choix, comme c'était la tradition par le passé. Le cinéma marche en été s'il est pluvieux, ce que l'on ne souhaite pas aux estivants… Passage en revue des deux mois à venir.
Article rédigé par Jacky Bornet
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié
Temps de lecture : 11min
Cornet de glace à l'entrée d'un cinéma
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Les Minions, Eisenstein, Ant-Man et le Petit Prince

Grosse machine estivale, "Jurassic World" est d'ores et déjà sur les écrans depuis le 10 juin. Il casse la baraque et risque de bien se maintenir dans les salles durant l'été. Paramount a également choisi de sortir le très attendu "Terminator Genisys" en amont, le 1er juillet, espérant qu'il tiendra la route durant les deux mois à venir. Ce qui est un pari tenable.


A la même date, deux films plus confidentiels : "Le Conte des contes" de Matteo Garrone, projeté en compétition à Cannes, reparti bredouille, avec Salma Hayek et Vincent Cassel, adaptation des contes de Giambattista Basile (1566-1632), inspirateur des frères Grimm et Charles Perrault. Très beau.


Il faut retenir également à cette date "Victoria", film en un plan séquence de 2h20, performant, mais dont on peut décrocher.


Le 8 juillet voit la sortie du film d'animation "Les Minions", avec les personnages cultes dérivés de "Moi, moche et méchant". Réalisé par le Français Pierre Coffin pour Universal, ce long métrage peut être considéré comme un blockbuster, mais les échos ne sont pas au niveau des espérances de ce que les deux films précédents laissaient augurer.


Totalement à l'opposé de ce pur divertissement, débarque le denier film de Peter Greenaway, "Que Viva Eisenstein", sur la carrière du célèbre réalisateur russe au Mexique dans les années 30. Rassemblé sur dix jours passés à Guanajuato, le film passe en revue l'intimité du cinéaste russe, à la lumière d'Eros et de Thanatos : plutôt ésotérique…


En décalé, sortant le mardi 14 juillet, un des rares blockbusters de la saison, en provenance des studios Marvel/Disney : "Ant-Man", avec tout de même Michael Douglas, que l'on n'a pas vu depuis longtemps. Adaptation d'un comic du cru, le film voit un petit escroc capable de rétrécir à volonté tout en décuplant ses forces, amené à rejoindre la bonne cause.


Le lendemain, 15 juillet, trois films plus minimalistes  arrivent sur les écrans. En premier lieu, "La Isla Minima", excellent thriller espagnol de Raúl Arévalo, Javier Gutiérrez (II), et Antonio de la Torre, deux fois lauréat au Festival du film policier de Baune 2015. Il a également engrangé dix récompenses aux Goya, les César espagnols. Deux flics que tout oppose sont amenés à enquêter sur le sauvage assassinat de deux adolescentes, dans une région reculée, en plein post-franquisme des années 80. Sans doute un des meilleurs films de l'été.


"La Femme au tableau", avec Helen Mirren, Ryan Reynolds et Daniel Brül, voit la première faire des pieds et des mains pour récupérer un célèbre tableau de Gustav Klimt représentant sa tante, confisqué pendant la Seconde Guerre mondiale par les nazis, et propriété du musée de Vienne, en Autriche. Comme on dit : une histoire vraie.


La même semaine sort "Love", projeté à Cannes, que Gaspard Noé ("Irréversible", "Enter the Void"…) présente comme un film d'amour aux scènes de sexe explicites, en relief. Murphy, 25 ans, se remémore son histoire d'amour de deux ans avec la mère de son enfant : leurs jeux, leurs excès et leurs erreurs.


Deux grandes reprises marquent ce 15 juillet. En premier lieu, "Les Innocents" (1961) de Jack Clayton, avec Deborah Kerr, d'après "Le Tour d'écrou" de Henry James. Formidable film de hantise et de possession. La meilleure adaptation du roman de James, signée Truman Capote, à la magnifique photo noir et blanc de Freddie Francis (oscarisé pour "Elephant Man" de David Lynch), avec deux enfants acteurs exceptionnels : Martin Stephens et Pamela Franklin. 


Soulignons également la reprise de "Sorcerer (le convoi de la peur)" (1977) de William Friedkin, en version intégrale et restaurée. Le film maudit du réalisateur de "French Connection", de "L'Exorciste" et de "Killer Joe", est un pseudo remake du "Salaire de la peur" de Henri-Georges Clouzot, avec Roy Scheider, Bruno Cremer, Francisco Rabal et Amidou. Un très grand film, tué dans l'œuf en 77 ; bien plus qu'un remake, quasiment le film manifeste de son réalisateur. A (re)découvrir de toute urgence.


Rien de très marquant dans les salles le 22 juillet. Si ce n'est "La Rage au ventre" avec Jake Gyllenhaal, Rachel McAdams et Forest Whitaker. Un film dans le monde la boxe, où un champion du monde voit sa femme tuée, perdant tout, jusqu’à la garde de sa fille. Il reprend alors l’entraînement pour retrouver sa dignité et son enfant. Le film de boxe est presqu’un genre en soit et la quête de rédemption autour duquel tourne "La Rage au ventre", un classique du cinéma américain. 


Il faudra compter également sur "Pixels", un gros budget de science-fiction, où des anciens adeptes des jeux d'arcade des années 80 doivent faire face à une invasion extraterrestre qui fait appel aux personnages de ces jeux pour envahir la Terre : Pac Man, Donkey Kong, Galaca, Centipede et aux Space Invaders. L'un des "gammers", désormais président des Etats-Unis, recrute ses anciens comparses pour défendre la planète… Sur le papier, c'est du grand n'importe quoi, signé Chris Columbus ("Madame Doubtfire" et deux "Harry Potter").


Le 29 juillet est, lui, marqué par la sortie du "Petit Prince", production française réalisée par l'Américain Mark Osborne ("Kung Fu Panda", "Bob l'éponge"…). Une très bonne surprise, découverte à Cannes hors compétition. Plus qu'une adaptation stricto sensu du conte de Saint-Exupéry, une relecture sous un autre angle en phase avec l'original. Deux formes d'animation sont mises à contribution : le numérique pour les scènes inscrites dans la réalité et la "motion capture" (animation de poupées image par image") pour celles renvoyant à l'univers du Petit Prince. Très beau, avec des voix exceptionnelles : André Dussollier, Florence Foresti, Vincent Cassel, Marion Cotillard, Guillaume Gallienne, Laurent Lafitte, Vincent Lindon... 


Des super-héros, Joan Sfar, le retour de Ted, de Tom Cruise, d'un Monty Python et la Palme d'or


Le mois d'août est un peu moins chargé, mais comporte tout de même de grandes sorties attendues.

Héros de deux films qui n'ont pas rencontré le succès espéré, "Les 4 Fantastiques" reviennent dans une nouvelle mouture qui reprend leurs aventures à leurs débuts. Pas de grands noms à l'affiche, si ce n'est le réalisateur de "Chronicle", Josh Tank, dont ce film traitait en profondeur de la nature des super-héros sous une forme inattendue et originale. Etonnement, "Les 4 fantastiques", sous licence Marvel, ne sort pas sous le label des célèbres comics mais chez 20th Century Fox, même s'il reste coproducteur, avec le créateur de la série dessinée, Stan Lee, comme producteur délégué.


Bonne surprise de voir le retour de Joann Sfar avec le remake de "La Dame dans l'auto avec des lunettes et un fusil" (1970) de Anatole Litvak. Sfar y dirige Freya Mavor, Stacy Martin et Benjamin Biolay. Adapté de Sébastien Japrisot, ce troisième long métrage de Joann Sfar est un thriller où une jeune femme déroutante et déroutée fuit la police pour rejoindre la mer qu'elle n'a jamais vue, en se répétant continuellement qu'elle n'est pas folle…

Freya Mavor dans "La Dame dans l'auto avec des lunettes et un fusil" de Joann Sfar
 (Kris Dewitte - Waiting For Cinéma)

A la même date, sort le deuxième opus de "Ted", toujours avec Mark Whalberg et sous la direction du réalisateur du premier opus, Seth MacFarlane. Le synopsis est un rien confus : l'ours en peluche Ted irrévérencieux, marié (!) tente de faire inséminer son épouse, mais doit prouver qu'il est humain… Il y a vraiment une crise des scénarios à Hollywood.


Le 12 août voit la sortie de "Mission : impossible – Rogue Nation", toujours avec Tom Cruise dans le rôle de Ethan Hunt, aux côtés de Jeremy Renner et Alec Baldwin. L'occasion pour le réalisateur Christopher McQuarrie de retrouver son acteur principal de "Jack Reacher". L'équipe Impossible Mission Force dissoute, Ethan Hunt doit rassembler ses anciens partenaires pour faire face à une redoutable organisation terroriste, le Syndicat. La routine.


Plus original et inattendu : "Absolutly Anything", réalisé par le Monty Python Terry Jones qui a invité pour l'occasion ses anciens comparses pour faire des voix, mais également Kate Beckinsale ou Joanna Lumley sans oublier Robin Williams dans son dernier rôle. Une histoire de fou, où des extraterrestres enlèvent un enseignant lambda et lui confère des pouvoirs illimités lui permettant de faire tout ce qu'il souhaite sur Terre. Il ira de déconvenue en déconvenue…


Le 19 août, pas grand-chose à se mettre sous la dent. Si ce n'est "Une famille à louer" de Jean-Pierre Améris, avec Benoît Poelvoorde, Virgine Elfira et François Morel. Une comédie où un célibataire introverti persuade une femme menacée d'expulsion de la "louer" avec ses deux enfants pour vivre en famille contre le rachat de ses dettes.


On retiendra éventuellement "Les Cerveaux", autre comédie, américaine celle-ci, avec Owen Wilson, autour d'un bras cassé qui se fait doubler lors d'un braquage tordu, dont les comparses dépensent leur butin à tout va.


A la même date, une autre belle reprise. Encore un William Friedkin, "French Connection" (1971), en version restaurée, avec Gene Hackman, Roy Scheider, Fernando Rey et Marcel Bozzuffi. Ce film mythique a inventé le polar urbain, en influençant une foule de cineastes, avec l'une des plus grandes poursuites de tous les temps, où Hackman chasse en voiture un tueur réfugié dans le métro aérien. Anthologique.


Enfin, la dernière semaine d'août voit la sortie, le 26, de la Palme d'or cannoise 2015, "Dheepan", de Jacques Audiard. L'histoire d'une fausse famille sri-lankaise réfugiée en banlieue parisienne. Dheepan, ancien soldat des Tigres tamouls va se retrouver dans une autre guerre, celle des gangs de la cité où il est gardien. Une belle palme, mais pas le meilleur film d'Audiard.


Un été mitigé donc, qui ne va certainement pas faire exploser le box-office, mais où émergent quelques rares perles et surtout de bonnes reprises. Bel été !

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