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Lumière 2017 : William Friedkin présente "La chasse" polar dans le milieu gay SM

Parmi les films auxquels le festival Lumière permet à Lyon de retrouver le chemin des grands écrans, "La chasse " (Cruising) de William Friedkin (1980). Il était projeté en présence de son réalisateur qui en a profité pour expliquer la genèse de ce film très oppressant. Un jeune policier infiltré (Al Pacino) enquête dans les milieux gay sado maso sur un tueur en série de jeunes homosexuels.
Article rédigé par franceinfo
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Al Pacino dans "La chasse" (Cruising) de William Friedkin
 (United Artists)

Quand il entre dans la salle, c'est un cortège de films qui l'accompagne. Et pas des plus légers, pas des plus tendres. Qu'on en juge : "The French Connection", "L'Exorciste", "Le Convoi de la Peur" ou celui qui nous intéresse : "La chasse", en anglais "Cruising". A sa sortie en 1980, cette histoire policière dans les milieux gays sado maso de New York avait fait réagir. Lors de sa rencontre avec le public lyonnais du festival Lumière, le réalisateur a raconté que les journaux avaient alors écrit "Cette fois, Friedkin va trop loin!". Alors que sept ans auparavant il avait terrorisé le monde entier avec "L'Exorciste" !
"La chasse", c'est celle qu'un jeune policier mène dans les milieux gays, qu'il découvre pour l'occasion, sur les traces d'un tueur mystérieux qui sévit dans les milieux cuirs les plus violents de New York. Mais le titre original est plus ambigu : "Cruising" c'est aussi draguer, se balader à la recherche d'un partenaire de quelques heures. Al Pacino va se perdre dans ce monde de sexe sans amour et de violence sans rédemption.

Quelques bonnes raison de réaliser "La chasse"

Interrogé par le public de la salle du Festival Lumière sur les raisons qui l'ont poussé à réaliser ce film, William Friedkin en a énuméré plusieurs. Il commence par rappeler une scène de "L'Exorciste" au cours de laquelle Regan (Linda Blair) subit des examens. " J'avais travaillé dans une vraie salle à l'hôpital universitaire de New York, avec de vrais médecins et de vrais infirmiers. Quelque temps plus tard, continue-t-il, je vois une photo dans le journal. Il s'agissait d'un type qui avait assassiné des homosexuels, toujours de la même façon. Il les attirait chez lui, les assommait avec une poêle, les découpait et jetait les morceaux de corps dans des sacs en plastique au fil de l'Hudson River. En regardant la photo, je me suis dit que je connaissais ce visage. C'était en fait l'un des infirmiers du tournage de 1972. Il s'était fait prendre car les sacs en plastique qu'il utilisait pour se débarrasser des morceaux de corps étaient marqués du nom du service et de l'hôpital où il travaillait !
L'article mentionnait l'avocat du tueur. Je demande alors à rencontrer l'homme en prison, il accepte. Il me raconte alors ce dont il se souvient : un seul meurtre, celui d'un célèbre critique de cinéma qui publiait ses articles dans le non moins célèbre quotidien culturel américian "Variety"."

William Friedkin à Lyon  devant une affiche de "La chasse" (montage)
 (Jean-François Lixon)

Friedkin continue : "J'apprends ensuite que l'un des lieux les plus glauques qu'il fréquentait la nuit appartenait à une de mes connaissances. Une fois que j'avais décidé de tourner le film, je demandais à cet ami l'autorisation de planter mes caméras dans son établissement. C'était un homme de la mafia. Il m'a demandé : "C'est sur moi, c'est sur mon business que tu veux faire un film ?" Une fois rassuré, il a accepté. J'ai donc pu tourner sur les lieux mêmes que fréquentait le tueur.
Il y avait déjà un roman à propos de cette histoire, ajoute enfin William Friedkin, mais je ne l'ai pas aimé. "

Pourquoi Pacino ?

A la question du choix d'Al Pacino pour interpréter le policier infiltré, William Friedkin affirme que le rôle avait été attribué à Richard Gere. Mais l'agent du réalisateur, qui était aussi l'un des agents de Pacino, lui a dit que celui-ci, qui était alors l'une des plus grandes vedettes du cinéma américain, accepterait le rôle. Sans état d'âme, Friedkin a écarté Gere et donné le rôle à Pacino. "Mais Gere aurait été plus ambigu" termine le réalisateur avec, peut-être, un soupçon de regret dans la voix.

William Friedkin à Lyon le 18 octobre 2017
 (jean-François Lixon)

Lumière et ses pépites

Cette séance autour de "La Chasse" n'est qu'un des mulitples moments de délice pour les cinéphiles présents au Festival Lumière. On y retrouve la passion de l'époque des cinéclubs, le plaisir de la rencontre avec les réalisateurs et les comédiens, les anecdoctes, les petites histoires de tournage, tout ce qui, derrière le rideau, fait la petite histoire du cinéma, tous ces instants particuliers dont le public cinéphile est si friand. Friedkin commentera aussi "Le Convoi de la Peur", "L'Exorciste" et "The French Connection". Au long de cette 9e éditon de Lumière, le public lyonnais a pu, ou pourra, aussi et à titre d'exemple non exhaustifs rencontrer et entendre les propos de Jean-François Stevenin, Eddy Mitchell, Michael Mann, Nicolas Winding Refn, Diane Kurys, Charles Aznavour ou Wong Kar wai. 
Le programme complet est consultable sur le site du Festival Lumière.

L'affiche de "La Chasse"
 (United Artists)

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