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Marilyn Monroe, le mythe se délite

Cinquante ans après sa mort, de nombreuses révélations ternissent l'image de la célèbre actrice américaine.

Article rédigé par Ariane Nicolas
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 7min
Marilyn Monroe est morte le 5 août 1962, d'une overdose de médicaments, à l'âge de 36 ans. (MOTIFAKE.COM / TUMBLR)

Norma Jean Baker aurait eu 86 ans cette année. Retrouvée morte le 5 août 1962 dans sa chambre, une douzaine de boîtes de médicaments près d'elle, Marilyn Monroe était déjà un mythe de son vivant. Blonde explosive au charme enfantin, sex-symbol fragile, croqueuse d'hommes, l'actrice et chanteuse continue d'être célébrée. Pourtant, cinquante ans après son décès, l'icône Marilyn est loin d'être intacte. Que lui reproche-t-on ?

Une beauté si peu naturelle

Marilyn Monroe, c'est d'abord l'histoire d'une fulgurante transformation physique. Mariée à 16 ans à un sombre inconnu, Jim Dougherty, pour échapper à l'orphelinat, Norma Jean Baker fait ses premiers pas dans le showbiz comme mannequin. A 19 ans, elle a encore les cheveux châtain frisés, des sourcils fournis et les cartilages de son nez sont intacts. A 22 ans, et quelques opérations de chirurgie plus tard, le personnage commence à naître. A 24, dans All about Eve, un de ses premiers grands rôles au cinéma, la blonde mutine est fin prête. Marilyn éclipse définitivement Norma Jean.

Marilyn Monroe à 22 ans, en 1948. (LASZLO WILLINGER / SCREEN PROD / AFP)

Deux visages de plus en plus souvent comparés, sur les réseaux sociaux comme dans les magazines féminins. La transformation physique est remarquable, comme en témoignent ce diaporama In Style ou encore ce jpeg "avant-après maquillage", pas toujours flatteur pour l'actrice. L'image de Marilyn, beauté très longtemps intouchable, est largement détournée par les internautes (ici, ici,  ou encore ici et même là).

"Marilyn reine de la beauté naturelle, n’est qu'un nouveau mythe créé par notre époque, commente Slate.fr. Elle subissait autant les diktats sur le physique que les jeunes actrices de nos jours." Autant, sinon plus. La star affirmait elle-même avoir besoin de cinq heures pour "devenir Marilyn", rappelle Vanity Fair (en anglais). 

Une actrice pas très professionnelle

Sur pellicule ou sur papier glacé, le charme de Marilyn Monroe agit instantanément. Mais l'envers du décor est loin d'être aussi parfait. Jack Lemmon, son partenaire dans Certains l'aiment chaud, se souvient d'un tournage excessivement pénible, détaille L'Express"Dans une scène, elle devait frapper à la porte, entrer et demander : 'Où est cette bouteille de bourbon ?' Puis elle l'apercevait, disait: "Oh, la voilà" et la prenait. C'était tout. Neuf mots. Avec Tony Curtis, on a pris les paris. Il a fallu 48 prises !"  

Exaspéré par les caprices de l'actrice et son manque de professionnalisme,Tony Curtis confie même aux techniciens : "Embrasser Marilyn, c'est comme embrasser Hitler", renchérit Télérama. Depuis le début, Monroe souffre d'un stress maladif. Sur les plateaux, elle ne se défait jamais de ses coachs personnels, Natasha Lytess (jusqu'en 1955), puis Paula Strasberg. Mais rien n'y fait. Ses retards et ses absences répétés la conduisent même à se faire virer du tournage de Something's Got to Give (1962), dernier film - inachevé - où la star apparaît à l'écran.

 

Un être déséquilibré

Pour beaucoup, Marilyn incarne le fantasme féminin de la femme-enfant. Pourtant, la psychologie de la star est nettement plus sombre. "En regardant de plus près, la déesse d'amour se décompose pour devenir un fantôme", écrit le Guardian (en anglais), dans un article consacré à The Secret Life of Marilyn Monroe, de John Randall Taraborreli, un livre plein de révélations. "Dean Martin (...), en 1962, fut horrifié par sa vacuité. 'Vous la regardiez dans les yeux, disait-il, il n'y avait rien à l'intérieur. Aucune chaleur. Aucune vie. C'était une illusion'."

Il ne fait plus de doutes que la fragilité de Marilyn n'était pas seulement un trait de sa personnalité. C'était une réelle pathologie. "Marilyn était une personne obsessionnelle et névrosée, assure au Daily Mail Diane Springer, qui faisait partie de son entourage. Elle était malade mentalement, n'ayons pas peur de le dire."

Les multiples ouvrages consacrés à cette femme d'exception -plus de 300 à ce jour- tentent de comprendre sa fêlure originelle. Le film My Week With Marilyn (2011) avance, comme beaucoup, l'idée d'un traumatisme parental : un père absent dès la naissance et une mère schizophrène. L'essai The Secret Life of Marilyn Monroe va plus loin, cassant le mythe selon lequel le public ou le système Hollywood aurait eu raison de l'actrice. "Au cœur de l'histoire, il y a une chose beaucoup plus simple : une fille très, très malade."

Une femme si peu féministe

Marilyn est morte en 1962, à l'aube d'une décennie marquée par le féminisme, notamment aux Etats-Unis. Ses photos de nu, son amour des diamants et ses minauderies sont autant d'occasions de soulever la question : "Marilyn était-elle féministe ?" Dans les années 1960, la sex-symbol est d'abord présentée comme une femme au mieux ambitieuse et indépendante, au pire victime du machisme de l'industrie du cinéma. Une "proto-féministe", en somme, selon les termes de Lois Banner, professeure de "gender studies" à l'université de Californie (Etats-Unis).

Mais les temps ont changé. "Pour la nouvelle génération de militantes, Marilyn Monroe était à l'origine du fait qu'elle était un objet sexuel, analyse le Los Angeles Times. Elle se présentait elle-même comme un jouet pour les hommes, d'autant qu'elle ne portait pas de sous-vêtements." Moins intellectuel, ce tweet se demande si, au fond, la starlette Kim Kardashian et la pin-up des années 1950 ne répondent pas aux mêmes logiques.


Jalouse du succès d'Elizabeth Taylor, dont l'intelligence de jeu était saluée au même titre que sa beauté, la blonde aurait même à nouveau posé nu pour relancer sa carrière, au début des années 1960. "Elle s'est dévêtue devant l'objectif d'un jeune photographe, Larry Schiller, espérant ainsi empocher 100 000 dollars pour ces seules photos, quand Elizabeth Taylor avait obtenu un cachet d'un million pour le film Cléopâtre", raconte le New York Times. Marilyn, loin du manifeste des 343 salopes, n'a-t-elle pas déclaré elle-même : "Donnez à une femme la bonne paire de chaussures et elle conquerra le monde"

"Toute ma vie, j'ai joué Marilyn Monroe, Marilyn Monroe, Marilyn Monroe", déplorait la star, quelques années avant sa mort, dans une conversation avec le réalisateur Henry Hathaway relatée par le Guardian. "J'incarne en permanence une imitation de moi-même." Norma Jean Baker, quand elle ne jouait pas, était lucide. Son personnage, qu'elle a tenu pendant plus de quinze ans sans jamais discontinuer, a fini par la piéger.

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