Menacé de fermeture, le cinéma associatif parisien La Clef racheté par son collectif de soutien

Après plus de cinq années de combat, rythmé par des occupations, des bras de fer politiques et autres pétitions, le collectif "La Clef Revival" a réussi à sauver le cinéma le plus alternatif de Paris.
Article rédigé par franceinfo Culture avec AFP
France Télévisions - Rédaction Culture
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Temps de lecture : 3min
Le collectif "La Clef Revival" a réussi à racheter le dernier cinéma indépendant parisien, La Clef, dont on voit la façade le 19 février 2021. (HERVE CHATEL / HANS LUCAS)

"On a réussi, la Clef est sauvée". Le collectif "La Clef Revival" a annoncé mercredi 19 juin avoir signé le rachat du dernier cinéma associatif de Paris, menacé depuis des années de fermeture, moyennant un total de 2,7 millions d'euros. L'acte de vente auprès de la Caisse d'épargne a été conclu lundi, a révélé mercredi le collectif lors d'une conférence de presse.

"C’est notre fonds de dotation, Cinéma Revival, qui sera propriétaire du bâtiment, précise le communiqué du collectif. Sa mission est de garantir que La Clef reste pour toujours un cinéma associatif et indépendant, protégé des appétits spéculatifs et administré librement par ses [usagers]". 

"On a presque du mal à y croire, tant le chemin a été long", poursuit le collectif. Ce rachat est l'aboutissement d'un feuilleton de six ans, pour l'un des rares lieux culturels alternatifs et indépendants à subsister au cœur du Quartier Latin, à Paris, jusqu'ici détenu par le Conseil social et économique (CSE) de la Caisse d'Epargne Ile-de-France.

A l'écart des grands circuits, La Clef s'est fait une place à part en offrant une visibilité à des cinéastes africains, asiatiques ou sud-américains peu programmés ailleurs. Et compte bien rester un cinéma militant, pas comme les autres, "lieu de diffusion de films rares".

Une salle de cinéma au fonctionnement inédit

Ceux "qui le souhaitent pourront rejoindre le collectif [d'usagers], apprendre à organiser une projection et proposer un film", promettent les repreneurs, qui ont conclu un accord avec le CNC (Centre national du cinéma et de l'image animée) pour légaliser leur pratique, hors du commun dans le monde du cinéma, de séances à prix libre.

Ce montage complexe s'inspire de l'économie coopérative, avec une société foncière spécialisée et deux collèges d'administrateurs. Il doit permettre de "sortir durablement le cinéma La Clef du marché immobilier" et d'assurer son indépendance à long terme. 

Occupations, bras de fer politiques, pétitions : la mobilisation des amis de la Clef, qui ont su fédérer autour d'eux le gratin du cinéma d'auteur français, a fini par payer. D'anciens salariés de la salle, entourés de cinéphiles, ont mené la tête de la fronde, refusant la vente et finissant par occuper les lieux. Leur mobilisation a finalement triomphé des dissensions internes, des confinements, d'une expulsion par la police et des assignations en justice.

Les dons des stars et des cinéphiles anonymes

Les dons ont été nombreux, des cinéphiles souvent anonymes, mais aussi des contributeurs plus célèbres, comme le cinéaste américain David Lynch, le documentariste chinois Wang Bing ou la scénariste et réalisatrice française Céline Sciamma. Martin Scorsese y est même allé de sa vidéo de soutien et Quentin Tarantino a joué les mécènes en envoyant la somme (nous n'en connaitrons pas le montant) dont le collectif avait besoin pour boucler ce financement. 

"La Clef sera un lieu où partager des idées, des films et des combats, où renouer sans cesse les liens entre les œuvres et le temps présent, le cinéma et la politique", souligne le collectif dans son communiqué. "On a hâte d’en rouvrir bientôt les portes, pour que s’y engouffre l’imagination collective !"

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