"Pirate des Caraïbes : la Vengeance de Salazar", quand la magie n'opère plus
En 2011, sortait en salles "Pirate des Caraïbes : La Fontaine de jouvence", quatrième opus de la franchise de piraterie la plus rentable de tous les temps, cumulant, en 4 films, plus de 3, 7 milliards de dollars de recettes dans le monde, hors produits dérivés. Une véritable poule aux oeufs d'or, qui n'a évidemment pas donné envie aux producteurs, Disney et Jerry Bruckheimer, de s'arrêter en si bon chemin. Pourtant, le quatrième volet malgré son succès commercial, a déçu le public et les critiques.
"Pirate des Caraïbes : La vengeance de Salazar" arrive donc six ans après le dernier volet, dans un contexte où il n'est franchement pas attendu. Pour un résultat qui risque fortement de doucher le peu d'attente qu'il suscitait. Sur le papier, ce cinquième opus avait tout pour plaire : des scènes d'action dantesques, Johnny Depp reprenant son rôle de pirate dandy Jack Sparrow, des batailles navales, une histoire d'amour, un méchant incarné par Javier Bardem qui excelle dans le costume du vilain, et le retour des personnages les plus aimés de la série, Will Turner (Orlando Bloom), Elizabeth Swan (Keira Knigthley) et Hector Barbossa (Geoffrey Rush).
Le pitch : le capitaine Salazar, un redoutable capitaine espagnol et traqueur de pirates autrefois vaincu par Jack Sparrow et transformé, avec son bateau et son équipage, en fantôme des mers, revient pour se venger et le tuer. Aidé par le fils de son ami Will Turner, une jeune astronome et une poignée de pirates, Jack Sparrow devra mettre la main sur le "Trident de Poséidon" pour se sauver, un objet mystique permettant d'avoir le contrôle des mers.
Les ingrédients sans la recette
En essayant désespérement d'intégrer tout ce qui a fait la réussite des premiers volets, le film finit par sentir le réchauffé. Les ingrédients sont là, mais la recette ne fonctionne pas (plus ?). Aucune prise de risque, le même scénario basique : un vieil ennemi de Jack Sparrow revient pour se venger et celui-ci ne devra son salut qu'à une prophétie des mers.Côté casting, le film introduit de nouveaux personnages qui, additionnés à la scène post-générique, nous font comprendre que Disney n'a pas l'intention de conclure. Bienvenue donc aux petits nouveaux : Henry Turner (Brendon Twaithes), fils de Will Turner, et Carina Smyth (Kaya Scodelario), jeune astronome accusée de sorcellerie qui rejoint Jack et Henry dans la quête du Trident de Poséïdon.
Censés apporter un peu de fraîcheur tout en rappelant le trio qui avait fait la réussite du premier volet, "La Malédiction du Black Pearl", ils sont malheureusement victimes d'une relation artificielle. En effet, ils vont être au coeur d'une histoire d'amour incontournable dans ce genre de productions. Une relation très mal amenée, puisqu'ils ne se connaissent que depuis quelques minutes et sont déjà prêts à se sacrifier l'un pour l'autre, là où dans le premier volet Will Turner et Elisabeth Swan se connaissaient depuis leur jeunesse.
Et au milieu, Jack Sparrow, qui remplit à minima son contrat de pirate dandinant, alcoolisé au rhum et coureur de jupons. On a aussi droit à un ersatz de Lord Beckett, cet officier britannique grand ennemi de Jack et ses amis dans la trilogie originale, et tout aussi magistral dans la mort.
Un scénario bancal
Côté scénario, il serait idiot d'espérer d'un blockbuster à 320 000 000 $ qu'il se lance dans un récit audacieux. Surtout sagissant de pirates, magie noire et autres prophéties, très pratiques quand il s'agit d'éviter les incohérences scénaristiques. Le vrai problème du scénario, c'est qu'il avance trop vite et que des éléments indispensables à l'intrigue arrivent comme un cheveu sur la soupe. Résultat : en plein milieu d'une scène capitale pour le reste du film, le Capitaine Salazar se met à raconter pendant 10 minutes le jour où Jack Sparrow a causé sa perte. Bonjour la séquence forcée, nous gratifiant au passage d'un rajeunissement numérique de Sparrow franchement gênant, même s'il faut avouer que les effets spéciaux sont très bons dans tout le reste du film.Perte de la dimension épique
Reste que le problème principal de "La Vengeance de Salazar", ce n'est ni le casting, ni le scénario, sur lesquels on peut éventuellement faire l'impasse. C'est le manque d'action, gravissime pour un blockbuster. Il n'y a qu'une seule bataille navale, issue de la séquence souvenir évoquée plus haut ; les combats d'épée sont presque absents, et beaucoup de scènes d'action se passent dans le noir, sous la pluie, ce qui les rend peu lisibles. Et pour ne rien arranger, hormis la scène d'action où l'on retrouve Jack Sparrow, dantesque il faut l'avouer, la première partie du film n'offre que très peu de moments de pure action, laissant la place à des dialogues longs et encombrants. Retirant toute dimension épique au récit et aux scènes d'action.
On sort du film avec l'impression d'un immense gâchis. Et malgré quelques points positifs comme Javier Bardem, l'île aux Cristaux, la bataille finale ou la bonne utilisation de la 3D (fait rare), l'ensemble reste très moyen et à des années lumières de la trilogie originale. Et ne parlons pas des 5 dernières minutes du film, presque un cas d'école de tout ce qui fait un "happy end" bourré de pathos.
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