Première enfant star de l'Amérique, l'actrice Shirley Temple est morte
Avec ses robes d'organdi ou de velours orné de guipure, ses souliers à brides, elle ressemblait aux poupées de Noël qui pouvaient fermer les yeux et dire "maman". Shirley Temple avait cette faculté extraordinaire de faire croire aux gens, pendant 90 minutes, qu'ils vivaient dans un monde sans problèmes.
Dans un Hollywood grouillant déjà de marâtres décidées à pousser par tous les moyens leur progéniture vers le succès, Shirley fut la plus forte et la plus chanceuse, se hissant, de 1935 à 1938, en tête du box office américain, devant les icônes Clark Gable et Gary Cooper. Car elle avait d'autres qualités que ses fossettes et son minois à faire fondre la terre entière : de la gaieté, du naturel et, même si le mot résonne étrangement s'agissant d'une enfant, un grand professionnalisme.
"Monstre sucré"
Sa mère lui lisait les textes le soir : le lendemain, elle connaissait par coeur ses répliques. Ses partenaires adultes disaient qu'elle était une "mécanique" et la critique parla même de "monstre sucré". Elle avait un autre atout : elle ne pleurait jamais sur les plateaux, contrairement aux autres enfants.
Sa propre jeunesse fut un conte de fée. Surprotégée, elle possédait sa maison, avec un bowling et une fontaine à limonade. Moins drôle mais assez supportable pour que jamais elle ne se rebelle : elle était sans cesse accompagnée de gardes du corps et de détectives, par crainte d'enlèvement. Mais les médias, et le public, voulaient tout savoir sur l'enfant prodige - où elle passait ses vacances, le nombre exact de ses boucles, qui seraient, selon la légende, 54 etc - et, finalement, son enfance lui fut grandement volée.
Quitter le monde du cinéma n'a pas été un drame et la petite fille, vieillie avant l'âge, a su garder les pieds sur terre. "J'ai eu une enfance magique mais je ne peux pas vivre dans le passé", disait-elle, en refusant que son premier enfant, une fille, soit mise sous contrat par un producteur de films. Ses derniers films datent de 1949.
Son personnage de gamine craquante, souvent pauvre (dans "Le Petit Colonel", "Boucle d'or" ou "Heidi"), en font la coqueluche des petites filles du monde entier. Toutes sortes d'objets dérivés sont fabriqués à son effigie. Des bombardiers durant la guerre devaient même s'appeler "Shirley".
Ce qui aurait pu être le rôle de sa vie lui échappe lorsque, en 1939, la Twentieth Century Fox refuse qu'elle tourne "Le Magicien d'Oz" avec la Metro Goldwyn Mayer, qui offrira finalement le rôle de Dorothy à Judy Garland. Par la suite, elle subit ses premiers échecs au box-office.
Elle s'engage en politique
Dans les années 40, alors qu'elle a tourné dans une quarantaine de films, elle délaisse le cinéma. Mariée une première fois à John Agard, elle épouse Charlie Black, un homme d'affaire avec lequel elle reste jusqu'à la mort de ce dernier en 2005. Elle a eu trois enfants.
En 1969, Shirley Black, souriante et potelée, s'affiche aux côtés des Républicains. Elle est nommée déléguée des Etats-Unis aux Nations unies par le président Richard Nixon et devient ambassadrice au Ghana et en Tchécoslovaquie entre 1974 et 1992. "Lorsqu'on vieillit, il faut savoir rester actif sinon on sombre dans une apathie corrosive", notait-t-elle, toujours la tête sur les épaules. Parallèlement, elle était devenue membre du comité de direction de Walt Disney en 1974 et 1975. Une période marquée par sa lutte contre le cancer du sein, un combat dont elle sera l'une des premières porte-parole.
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