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"La petite Venise", film délicat sur la violence d'un monde en crise

Qu'est-ce qui peut réunir un vieux pêcheur de la lagune vénitienne et une immigrée chinoise ballottée d'un boulot ingrat à l'autre? La solitude, l'amitié et le film plein de délicatesse, de poésie et d'humour d'Andrea Segre, "La petite Venise", attendu sur les écrans mercredi 13 juin.
Article rédigé par franceinfo - franceinfo Culture (avec AFP)
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Le pêcheur Bepi et la serveuse Shun Li dans "La petite Venise"
 (Haut et Court)

Personnage à part entière du premier long métrage de ce documentariste italien, la petite Venise, c'est Chioggia. Il y a bien la lagune, les canaux et les ponts, mais on y est loin de sa grande soeur pleine de touristes.

La rencontre de deux solitudes
Shun Li (Zhao Tao, vue dans "Still Life" et "24 City" de son mari Jia Zhangke) y débarque sans prévenir, ni d'ailleurs être prévenue. Ouvrière dans un atelier de couture de la banlieue de Rome, l'immigrée est envoyée à Chioggia par ses "patrons" pour travailler au comptoir d'un vieux bar accueillant les pêcheurs du cru, l'osteria Paradiso.

Elle n'a pas son mot à dire, alors elle serre les dents dans l'espoir de rembourser le prix de son passage en Italie et de pouvoir y faire venir son fils de huit ans, resté au pays. "Je travaille et j'attends. Je travaille et je rembourse", explique Shun Li, sans savoir exactement quand sa dette sera payée ni même à combien elle
s'élève.

Seule en Italie, seule à Chioggia, seule à l'osteria, jusqu'à ce qu'elle se lie d'amitié avec Bepi (Rade Serbedzijia, l'increvable et dément tueur russe de "Snatch", vu aussi dans "Eyes Wide Shut" ou "Harry Potter" et qui est un vrai chanteur et poète yougoslave).

Surnommé "le poète" à cause de ses vers de mirliton, Bepi est aussi un pêcheur et un immigré, même si ses copains pêcheurs ont fini par l'oublier depuis le temps qu'il a quitté sa Yougoslavie natale. Bepi est seul lui aussi, "seul mais pas mort" comme il le prouvera en bravant la méfiance et l'hostilité que son affection pour Shun Li suscite à Chioggia, tant chez les clients de l'osteria que chez ses patrons chinois.

"La Petite Venise" bande-annonce (en VF)

Deux expériences de la perte des racines
"Le point de départ de ce film est un visage, celui d'une jeune femme qui pourrait être Shun Li" rencontrée dans une osteria vénitienne, explique Andrea Segre. "Le souvenir de ce visage, tellement incongru et étranger à ces lieux patinés par les années, ne m'a plus quitté". Le contraste a poussé le réalisateur, également docteur en sociologie, à imaginer une vie à cette jeune femme.

"Au fond, La Petite Venise est le lieu imaginaire - mais absolument réaliste - de la rencontre de deux mondes en crise: le monde de ceux qui sont contraints ou qui ont choisi d'abandonner leurs racines, et le monde de ceux qui voient leurs racines se transformer profondément, jusqu'à disparaître (...) Ces deux mondes se jaugent et comprennent qu'ils ont le même problème", résume le cinéaste.

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