Selon son réalisateur, le film "Un Français" ferait peur aux exploitants de cinéma
Le long-métrage retrace le parcours d'un skinhead qui renie peu à peu ses haines passées. Mais selon son réalisateur, les exploitants fermeraient tour à tour leurs portes, en invoquant des craintes liées au thème sulfureux du film.
C'est l'histoire d'Un Français, un film promis à une large distribution en salles. Mais à quinze jours de la sortie, son réalisateur Patrick Asté – dit Diastème – apprend l'annulation des 50 avant-premières, prévues le 2 juin dans toute la France. Selon le réalisateur, les exploitants auraient pris peur, compte tenu du thème sulfureux du film. "A l’heure où j’écris ces lignes, pour tout vous dire, je me sens un peu abattu", écrit-il sur son blog, mardi 26 mai.
Ce film se déroule sur une période de trente ans et retrace le parcours d'un skinhead d'extrême droite, dont l'un des jeux consiste à rosser des Maghrébins avec ses amis. Peu à peu, ce personnage, Marco, va toutefois évoluer et renier ses haines passées. "J’ai raconté l’histoire d’un homme qui se débarrasse de la violence et de la haine en lui. C’est un film de paix. Un film de cinéma", explique Diastème, toujours sur son blog.
Le réalisateur déplore la "peur" des exploitants
Diastème ne précise pas davantage les craintes formulées par les exploitants. D'ailleurs, lui-même semble les ignorer. "'Peur de quoi ?' avais-je demandé [à la coproductrice]. 'Je ne sais pas', avait-elle répondu." Certains cinémas, toutefois, ont déjà pris le contrepied, en annonçant leur volonté de projeter le film.
Diastème redoute que la sortie soit en partie tronquée, car seules 50 salles sont désormais prévues – "et encore, pas sûr" – au lieu des 100 d'abord évoquées. "Cela veut dire que si les choses restent en l’état, le film est quasiment mort-né, il ne fera pas d’entrées dans les salles." "Liberté d’expression, qu’ils disaient", lâche le réalisateur en attendant, un brin amer, sur son blog.
Le distributeur remet la polémique dans son contexte
Dans l'après-midi, le distributeur du film, Mars Production, a apporté des précisions concernant la faible distribution déplorée par le réalisateur. "Aucune avant-première n'a été annulée", corrige son communiqué, mais le nombre de salles où il sera diffusé a bien été ramené de 100 à 60, "afin d'optimiser au mieux chaque copie et de valoriser chaque salle diffusant le film".
Le communiqué pointe enfin un contexte susceptible d'avoir poussé les exploitants à ne pas donner suite aux sollicitations du distributeur concernant l'organisation d'avant-premières. La sortie du film de Diastème "fait l'objet, sur les réseaux sociaux, d'une spectaculaire campagne de haine (...)", rappelle en effet Mars Production.
"Cette prudence [des exploitants] est évidemment à rapprocher de l'humeur que certaines personnes, aussi anonymes que mal intentionnées, ont voulu créer autour du film", détaille Mars Production, tout en renouvelant son soutien au film de Diastème : "Un film généreux" et "nécessaire dans son authenticité".
Des exploitants défendent le film
Avec ou sans polémique, certains exploitants entendent bien maintenir leur avant-première, comme à Dijon (Côte d'Or), dans ce cinéma mentionné par Le Bien public : son directeur, Cyril Jaquens, a assuré au quotidien s’être "engagé à défendre le film (...) Nous sommes un cinéma qui s’engage pour les films d’auteurs".
A Brive (Corrèze), la Ligue des droits de l'homme organise pour sa part une projection débat, dans un cinéma, autour d'Un Français. Une œuvre qui divise sur les réseaux sociaux : aux messages de haine se sont ajoutés les encouragements. En quelques heures, la page "Soutien pour la sortie du film Un Français", a rassemblé plus de 550 personnes sur Facebook.
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