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"A peine j'ouvre les yeux" : la jeunesse avant la révolution tunisienne

"A peine j'ouvre les yeux" de Leyla Bouzid, en salles mercredi, dresse le portrait vibrant d'une jeunesse tunisienne éprise de rock et de liberté avant la révolution de 2010, un film qui, pour sa réalisatrice, fait écho à la liberté revendiquée après les attentats de Paris.
Article rédigé par franceinfo - franceinfo Culture (avec AFP)
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Baya Medhaffar et Montassar Ayari dans "A peine j'ouvre les yeux" de Leyla Bouzid
 (Shellac)

"Au moment où il y a eu la révolution (tunisienne de 2010), j'étais à l'école de cinéma. Il y avait plein de gens qui tournaient des documentaires, des reportages. Et moi, ma première envie, c'était enfin de pouvoir situer une  histoire dans la période de Ben Ali, de décrire l'atmosphère de l'Etat  policier, la paranoïa des Tunisiens, toutes les dernières années qu'on a  vécues", a expliqué à l'AFP Leyla Bouzid, dont c'est le premier long métrage.
              
Fille du réalisateur Nouri Bouzid, cette Tunisienne de 31 ans a quitté son  pays à 18 ans pour venir étudier à Paris. Elle est sortie de l'école de cinéma de la Fémis, il y a quatre ans.
              
Remarqué, son film, attendu en Tunisie le 13 janvier et en Belgique le 27 avril, a été récompensé dans de nombreux festivals : prix du public et prix du  Label Europa Cinémas à la Mostra de Venise, Tanit de bronze au Festival de Carthage, Grand Prix au Festival de Dubaï...


A Tunis, à l'été 2010    

"A peine j'ouvre les yeux" se déroule à Tunis à l'été 2010, juste avant la Révolution qui avait renversé la dictature de Ben Ali et marqué le point de départ du Printemps arabe.
              
Le film raconte l'histoire de Farah, 18 ans, qui vient de passer son bac. Alors que sa famille l'imagine déjà médecin, la jeune femme, qui chante dans un groupe de rock engagé, ne vit que pour la musique.
              
Refusant d'écouter sa mère, qui la met en garde contre les interdits en Tunisie, elle sort la nuit dans les bars et les salles de concert, retrouve ses amis musiciens dont son amoureux Bohrène et n'hésite pas à entonner des chansons engagées, sans se soucier du danger.
 
"A peine j'ouvre les yeux, je vois des gens éteints, coincés dans la sueur, leurs larmes sont salées, leur sang est volé et leurs rêves délavés",  chante-t-elle.

Une jeunesse révoltée qui se heurte à la censure        

A travers l'histoire de Farah -interprétée avec une énergie convaincante  par Baya Medhaffar dont c'est le premier rôle- et de sa mère, incarnée par la chanteuse tunisienne Ghalia Benali, Leyla Bouzid décrit une jeunesse révoltée, qui se heurte à la censure.
              
"Farah est une héroïne habitée par un élan de vie, qui ne croit pas à la peur et aux limites imposées par la société", souligne Leyla Bouzid. Le film "raconte le processus de destruction de cette jeunesse" par la famille, la société et le système politique.
              
Emportée par la musique -composée par l'Irakien Khyam Allami sur des chansons écrites spécialement-, l'oeuvre bouillonne d'une vitalité communicative.
              
"J'avais envie de faire un film dans lequel on voit l'énergie des jeunes Tunisiens", ceux d'hier mais aussi "d'aujourd'hui bien sûr", note Leyla Bouzid.

Donner une voix aux jeunes    

"Je crois que dans le cinéma arabe, il y a une assez forte absence de l'adolescence, de la jeunesse, de la fougue, de l'énergie. Ces jeunes-là, je voulais leur donner une voix", lance-t-elle, "très heureuse que l'on voie que c'est les mêmes jeunes que partout, habités par une soif de liberté".
              
Le film parle des Tunisiens, mais par ses thèmes -la liberté, la musique et la jeunesse- il trouve aussi un écho dans l'actualité française après les attentats jihadistes qui ont fait 130 morts à Paris le 13 novembre, dont 90 dans la salle de concert du Bataclan.
              
"Je suis contente que le film revendique une liberté de faire de la  musique, d'en écouter et de vivre librement, et puisse être une réponse immédiate à ce qu'on a subi", dit Leyla Bouzid.

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