Blanche Gardin et Laurent Lafitte dans "Tout le monde aime Jeanne", premier film imaginatif de Céline Devaux
Ce premier long-métrage, qui mélange avec audace cinéma et animation, met en scène un duo Gardin/Lafitte attachant.
Céline Devaux, primée plusieurs fois pour ses court-métrages, signe un premier long en forme de conte décalé, qui mêle cinéma et animation. Cette comédie sur la dépression dans un monde qui ne tourne plus rond est servie par un un duo Blanche Gardin / Laurent Lafitte irrésistible.Tout le monde aime Jeanne sort le 7 septembre.
Lisbonne
Jeanne (Blanche Gardin) est une idéaliste. Elle veut sauver la planète et a conçu une super structure pour récupérer les déchets qui polluent les océans. Mais son invention se décroche accidentellement et sombre dans les abysses. L'échec de ce projet, celui d'une vie, provoque en elle un cataclysme qui la laisse complètement abattue. Envahie par des pensées négatives, ruinée, surendettée, elle se voit contrainte d'aller à Lisbonne, la ville où elle a grandi, pour vendre l'appartement de sa mère décédée un an plus tôt. A l'aéroport, elle croise Jean (Laurent Lafitte), un ancien camarade d'école.
A Lisbonne, Jeanne est assaillie par le souvenir du suicide de sa mère un an auparavant. Elle erre comme une âme en peine, végète dans l'appartement hanté par son fantôme au lieu de faire les cartons. Jean, être fantasque et attachant, s'immisce, un brin lourdingue, dans la parenthèse lisboète et mélancolique de Jeanne…
Auto-dévalorisation, pensées toxiques, jugements intempestifs, une petite voix intérieure, omniprésente, ironique, souvent drôle, harcèle la pauvre Jeanne. Cette voix, un petit personnage à part entière, prend la forme dessinée d'un énergumène chevelu (entre fantôme et Cro Magnon) dans des séquences animées qui ponctuent le film. Le dispositif fonctionne bien, dans un jeu de ping-pong entre les dialogues et les pensées de Jeanne, souvent contradictoires. Et quand la jeune femme reprend peu à peu goût à la vie, cette petite voix envahissante finit par baisser le ton, jusqu'à disparaître…
Numéro de duettistes
Jouant sur l'antagonisme des deux personnages, le duo Gardin/Lafitte fait des étincelles. D'un côté Jeanne, emmurée dans ses idées noires, hantée par ses souvenirs, campée dans ses principes, une légère rigidité dans le caractère, intériorisant ses sentiments, tentant coûte que coûte de garder le contrôle. De l'autre Jean, personnage fantasque totalement désinhibé, qui exprime sans retenue tout ce qui lui passe par la tête, racontant sans honte à Jeanne avoir lui aussi traversé un gros épisode de dépression. Mais il y a aussi ce qui les réunit : une certaine vision idéaliste du monde.
Ces deux caractères sont soulignés par les accoutrements : pour Jeanne, vêtements ajustés sombres et lunettes noires, pour Jean des tenues extravagantes, pantalon et chemisette trop larges, lunettes de soleil bariolées… Le jeu de Blanche Gardin et Laurent Lafitte, toute en retenue, accentue le comique des situations.
Le duo est complété par des personnages secondaires bien dessinés, comme le bellâtre Vitor, ex-amant portugais de Jeanne, incarné par Nuno Lopez ou encore Simon, l'attachant frère de Jeanne, campé par un excellent Maxence Tual. A noter également un remarquable travail sur le son, et la belle BO concoctée par Flavien Berger.
Un peu comme un conte à la Rohmer, Tout le monde aime Jeanne aborde sur un ton léger et décalé des questions profondes -le suicide, le deuil, la dépression- dans une forme originale. Cette comédie touchante et pleine de fantaisie saura égayer votre rentrée.
La fiche
Genre : drame, comédie, animation
Réalisateur : Céline Devaux
Acteurs : Blanche Gardin, Laurent Lafitte, Maxence Tual, Nuno Lopez
Pays : France
Durée : 1h35
Sortie : 7 septembre 2022
Distributeur : Diaphana Distribution
Synopsis : Tout le monde a toujours aimé Jeanne. Aujourd’hui, elle se déteste. Surendettée, elle doit se rendre à Lisbonne et mettre en vente l’appartement de sa mère disparue un an auparavant. A l’aéroport elle tombe sur Jean, un ancien camarade de lycée fantasque et quelque peu envahissant.
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