"Comme le feu" : règlements de comptes entre amis dans un chalet isolé au cœur des forêts profondes du Grand Nord canadien
Le réalisateur canadien Philippe Lesage nous plonge dans un huis clos en pleine nature, dans lequel se déchaînent les sentiments d'un petit groupe d'amis. Avec ce troisième film de fiction, inspiré par une expérience vécue par son frère, Philippe Lesage creuse la veine autobiographique. Comme le feu sort dans les salles le 31 juillet 2024.
Blake (Arieh Worthalter), réalisateur de films documentaires, invite son vieil ami Albert (Paul Ahmarani) scénariste avec qui il a autrefois collaboré, pour un séjour nature, pêche, chasse et soirées arrosées dans son chalet perdu dans la forêt québécoise. Albert est là avec sa fille Aliocha (Aurélia Arandi-Longpré), son fils avec son copain Jeff, secrètement amoureux de la jeune fille. Une monteuse, deux amis de Blake et un couple, Hélène (Irène Jacob) et Eddy, complètent la liste des convives.
Jeff, qui veut devenir réalisateur, admire beaucoup Blake, mais ressent rapidement de la jalousie quand il comprend la fascination qu'exerce sur Aliocha l'ami de son père. Les vieilles rancœurs entre Blake et Albert plombent l'ambiance de ces retrouvailles, qui finissent par tourner au règlement de compte nauséabond.
Chasse, pêche et déceptions
Philippe Lesage met en scène ces passions humaines dans un huis clos des grands espaces. Dépendants de Blake, qui les a amenés là à bord d'un petit hydravion, les protagonistes de cette aventure sont condamnés à vivre ensemble dans un environnement magnifique, mais hostile.
Le réalisateur fait monter la tension au fil du récit, jusqu'à des points de rupture qui nous emmènent à la lisière du thriller. Dans une réalisation qui exploite à fond les décors, forêts inquiétantes, cours d'eau tumultueux, chalet cosy, Philippe Lesage met en scène les sentiments et ressentiments des uns et des autres, à la manière d'une tragédie grecque.
Blake apparaît comme la figure de mâle dominant, sachant chasser, pêcher, personnage solaire et mystérieux, tandis qu'en face de lui Albert, aigri, maladroit et sentimental, se complaît dans la plainte et les reproches. Blake est resté fidèle à ses convictions, Albert a fait des compromissions. Des archétypes antagonistes qui finissent par s'estomper, Blake se révélant moins fort et moins pur qu'il n'y paraît, se laissant même aller à verser quelques larmes dans certaines circonstances.
Dans ce film d'apprentissage, Philippe Lesage interroge la transmission et le rôle des adultes dans la construction des adolescents, avides de modèles à suivre, qui parfois se révèlent décevants. Il aborde aussi la question des premières amours, sujet qu'il avait déjà traité dans Genèse, son précédent film.
Avec ses nombreuses scènes de dialogues qui sonnent très juste, Comme le feu s'inscrit dans la tradition du cinéma québécois, très habile à faire émerger les vérités et la nature humaine dans des joutes verbales.
Composé de longs plans séquence et exploitant avec habileté le silence, les sons d'ambiance et la musique, le film se déploie tout du long dans un tempo très lent. Un rythme lancinant, qui dit aussi le temps qui passe et qui a passé pour Blake et Albert, avec le constat des échecs, des ratés, des choses qu'ils ont laissées s'échapper.
La fiche
Genre : Drame
Réalisateur : Philippe Lesage
Acteurs : Noah Parker (II), Aurélia Arandi-Longpré, Arieh Worthalter, Irène Jacob
Pays : Canada
Durée : 2h41
Sortie : 31 juillet 2024
Distributeur : Tandem/Shellac
Synopsis : Jeff, 17 ans, est secrètement amoureux d'Aliocha. Tous deux admirent le mystérieux Blake, un vieil ami du père de la jeune fille, qui les invite à passer quelques jours dans son chalet de chasse au cœur du grand nord canadien. Là, en pleine nature, les deux adolescents se confrontent à un monde d'adultes puérils, prêt à s'embraser.
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