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"Comrades", une nouvelle vie pour le film maudit de Bill Douglas

Bill Douglas avait mis plus de huit ans pour réaliser son ultime film, consacré aux martyrs de Tolpuddle, ces ouvriers agricoles déportés en Australie pour avoir tenté de résister aux propriétaires terriens anglais. Jamais sorti en France, "Comrades" arrive sur les écrans cet été dans une version restaurée.
Article rédigé par Pierre-Yves Grenu
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié
Temps de lecture : 3min
"Comrades" de Bill Douglas
 (UFO Distribution)
La note Culturebox
3 / 5                  ★★★☆☆

Drame britannique de Bill Douglas – Avec Alex Norton, Robin Soans, Imelda Staunton et Amber Wilkinson - Durée : 3h10 - Sortie : 23 juillet 2014

Synopsis : Grande-Bretagne, Dorset, 1834. George Loveless et ses amis, laboureurs à Tolpuddle, sont de plus en plus exploités par les propriétaires terriens, avec la complicité du clergé. Ils s’organisent pour revendiquer des hausses de salaires, et créent en secret la Société Amicale des Laboureurs. Dénoncés par un propriétaire, six d’entre eux sont condamnés à la déportation en Australie. Devenus très populaires et hérauts d’une classe de plus en plus pauvre, ils deviennent les « martyrs de Tolpuddle ». Disparu en 1991, le réalisateur anglais Bill Douglas (auteur de la trilogie "My Way Home") a bien failli ne jamais boucler "Comrades". Débuté en 1979, le film va connaître de nombreux aléas : Douglas se brouille avec ses producteurs, le tournage est reporté, et lorsqu'il démarre enfin, les conditions climatiques australiennes provoquent un dépassement budgétaire qui manque lui être fatal… Un premier montage est refusé, un deuxième est validé mais laisse Douglas sur sa faim. La version définitive sera finalement terminée en août 1987. Salué par la critique anglaise, "Comrades" ne restera pourtant que quelques semaines sur les écrans londoniens.
  (UFO Distribution)
Voici donc l'occasion de découvrir ce film maudit. Première impression : il fait son âge. Très statique, en particulier dans sa première partie, théâtrale, toute en plans fixes. Douglas ne cherche pas à approcher le réalisme. Tout est, au contraire, délibérément accentué : le jeu, les attitudes, les situations.

Très politique, ce très long film (3h10) n'est pas en avare en discours. On patauge dans la boue, la révolte gronde. "Comment survivre avec huit shillings" chantent les charpentiers, tandis que les propriétaires s'engraissent. Les femmes s'épuisent jour et nuit dans les champs. Courageux, des laboureurs s'organisent et créent une société amicale et secrète, un syndicat qui va effrayer les maîtres dont la riposte sera cinglante: la déportation.
  (UFO Distribution)
Moins caricaturale, la deuxième partie, en Australie, a mieux supporté ce quart de siècle. La lumière, qui faisait défaut dans la campagne anglaise, réchauffe la saga. Entravés, persécutés, des hommes se battent pour leur liberté. L'histoire fera d'eux des héros.
  (UFO Distribution)
Beaucoup de choses ont vieilli dans ce film manifeste qui n'est pas sans rappeler le Ken Loach de "Jimmy's Hall"… mais il lui reste un souffle indéniable, un petit quelque chose qui, finalement, le rend intemporel.

De ce "Comrades", on retiendra aussi les transitions très poétiques, incarnées par un forain plein d'imagination, montreur de lanternes magiques. Une très belle idée.

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