[DEAUVILLE] "Savages" : Oliver Stone, mortel, en clôture du festival
Synopsis : Laguna Beach, Californie : Ben, botaniste bohème, Chon, ancien Navy Seal, et la belle O partagent tout. Ben et Chon sont à la tête d’un business florissant. Les graines ramenées par Chon de ses missions et le génie de Ben ont donné naissance au meilleur cannabis qui soit. Ils en dealent partout avec la complicité de Dennis, un agent des stups. Leur affaire attire l’attention du cartel mexicain de Baja, dirigé d’une main de fer par Elena. Pour les contraindre à coopérer, le cartel kidnappe O. Mais elle a sous-estimé leur capacité à réagir.
Violence viscérale
Cela faisait bien longtemps qu’Oliver Stone ne nous avait pas servi un film aussi puissant et maîtrisé. « Savages », projeté en clôture de ce 38e Festival du cinéma américain de Deauville, renoue, par son sujet et sa violence, avec « Scarface » (1983) dont il avait écrit le scénario pour Brian De Palma. Trafic de drogue, guerre des gangs, les ingrédients d’un thriller au prime abord classique sont rassemblés. Mais Stone les dynamite.
Il faut s’accrocher aux premières images, où sont exécutés sommairement des trafiquants mexicains rivaux du cartel de Baja dirigé par la belle et venimeuse Elena, qu’interprète Salma Hayek. Une scène qui donne toute l’ampleur des méthodes mises en œuvre par le bras armé d’Elena, Lago, dont la violence sadique et détachée suinte tout le long du film, sous les traits d’un génial Benico Del Toro, terrifiant.
Anti-manichéen
Au cœur du film, l’association de deux potes, l’un botaniste, pacifique et humaniste, l’autre ex-G.I. qui a fait ses armes en Irak et en Afghanistan, autant dire un dur à cuir. Tous deux sont complémentaires dans leur petite entreprise florissante, pour produire et distribuer la meilleure marijuana sur le marché. Ce qui fait de l’ombre au cartel de Baja. Leur refus de s’y associer va déclencher un engrenage infernal, au centre duquel se retrouve O, l’égérie des deux associés qui se la partagent. Ajoutez au paysage un cadre des stups véreux, joué tout en finesse par un John Travolta remarquable, et le tour est joué.
Le film porte bien son titre, « Savages », sauvages. Le qualificatif passe durant tout le film de l’un à l’autre des partis en conflit. La mise en scène nerveuse, dynamisée par un montage au cutter, mais non saoulant, avec une excellente utilisation de la musique, renoue avec le meilleur de Stone, inspiré par un script efficace, déduit du roman de Don Winslow, cosignataire du scénario. La double fin, l’une morale, l’autre non, rend compte de l’amoralisme fondamental du cinéaste sur un mode ludique, mettant un point d’orgue à l’anti-manichéisme du film. Extrême.
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