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"Downton Abbey II" : "une nouvelle ère" qui ressemble plutôt à un adieu définitif

Pour sa deuxième adaptation sur grand écran, la série à succès revient cette fois avec un double récit : le tournage d'un film à Downton Abbey et un voyage dans le Sud de la France de la famille Crawley, à la poursuite d'un mystère autour du passé de la comtesse douairière Lady Violet. Un film un peu mou qui sent le point final.

Article rédigé par Laure Narlian
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6min
Photo de famille dans le long-métrage "Downton Abbey II, une nouvelle ère". (FOCUS FEATURES / LLC)

Et de deux ! Sept ans après la fin (pour la France) de la série télévisée britannique à succès qui met en scène une famille aristocrate britannique et son personnel au tournant des 19e et 20e siècles, Downton Abbey reprend du service. La première adaptation au cinéma, sortie en septembre 2019, articulée autour d’une visite royale, n’avait pas suffit. Le scénariste Julian Fellows en avait encore sous la semelle. Voici venu Downton Abbey II, qui promet au spectateur "une nouvelle ère". Pour les Français, la promesse est double puisqu’une partie de la famille Crawley se dépayse à cette occasion dans le sud de la France, à la poursuite d’un mystère.

Un mystérieux héritage et un tournage à Downton

Nous voici en 1928. La comtesse douairière, Lady Violet (Maggie Smith), convoque son avocat et la famille. Elle vient en effet d’hériter de la luxueuse Villa des Colombes, située en France près de Toulon, qu’elle entend à son tour léguer à l’une de ses arrière-petites-filles. C’est un certain Marquis de Montmirail, mort récemment, qui lui a légué cette superbe demeure, où lui et sa famille passent depuis toujours leurs étés. Que cache ce leg ? Cet homme et Violet ont vécu ensemble "une parenthèse enchantée", sur place, il y a soixante ans, et ce, peu avant la venue au monde de Lord Grantham… Lady Violet aurait-elle fauté ?

Au même moment, un cinéaste d’Hollywood, M. Barber, se propose de tourner son prochain film muet à Downton Abbey. Une idée impensable pour Lord Grantham. Mais l’argent que la production promet de verser pourrait permettre de rénover la toiture en très mauvais état de son château néo-gothique, comme le lui fait remarquer sa fille Lady Mary (Michelle Dockery), désormais "seule maître à bord". L’aval est finalement donné au tournage, et tandis que le personnel se réjouit de rencontrer des vedettes du grand écran "en vrai", la majorité de la famille, escortée notamment de l’ancien majordome Carson, prend la poudre d’escampette. Direction la côte d’Azur, où le nouveau marquis de Montmirail, fils du défunt, les a gentiment conviés.

Une scène de "Downton Abbey II, une nouvelle ère", censée se dérouler le sud de la France en 1928. (FOCUS FEATURES LLC. ALL RIGHTS RESERVED)

Deux récits en parallèle et une intrigue maigrichonne

Bien sûr, on retrouve avec plaisir tous les acteurs attachants de cette comédie humaine, qui ont un peu vieilli, au même rythme que nous. Mais nos attentes, qui fantasmaient notre tribu "so british" se frottant à The Artist et à Gatsby, ne seront pas comblées. L’intrigue est bien mince et si le découpage permanent qui met en parallèle les deux récits (le tournage à Downton et l’escapade dans le Sud), ressemble à la méthode qui donne bien souvent du nerf aux séries, l’arc narratif ne tiendrait pas plus de deux épisodes télévisés. À quoi bon, alors, le porter sur grand écran ?

Heureusement, les décors et costumes somptueux sont encore là, tout comme les délicieux traits d'humour, et les acteurs sont bons, même si sous-employés. On se régale toujours du regard d’aigle de Carson (Jim Carter), de la bougonnerie bienveillante de la cuisinière Mrs Patmore (Lesley Nicol) et du côté lunaire de Mr Molesley (Kevin Doyle), qui va se découvrir cette fois des talents cachés.

L’arrivée des nouveaux apporte même un peu de peps. Nathalie Baye, en veuve dépitée du marquis de Montmirail, qui n’entend pas se laisser dépouiller et menace de porter l’affaire en justice. Le fils de celle-ci, joué par Jonathan Zacaï vu dans Le Bureau des Légendes, qui accueille la famille avec tous les égards. L’acteur principal du film muet, le solaire Guy Dexter (Dominic West) qui drague le majordome Thomas Barrow (Rob-James Collier).

Isabelle Grey (Penelope Wilton) et Lady Violet Crawley (Maggie Smith) dans une scène de "Downton Abbey II, une nouvelle ère". (FOCUS FEATURES LLC. ALL RIGHTS RESERVED)

Où est passé le mordant ?

Cependant, tout cela manque cruellement de surprises et de fièvre. Où sont passés le mordant et la tension ? Les difficultés du petit personnel et la mauvaise foi des puissants ? Même l’intraitable Violet fait ici patte de velours. Tout le monde est affable et nage dans le bonheur, et le récit s’assoupit de bien-pensance molle, sans même se priver de quelques passages lacrymaux dispensables.

Peut-être pour compenser, le scénario multiplie les résolutions et dénouements heureux de nombreuses petites intrigues (amoureuses notamment) sous-jacent, longtemps mises en attente. De sorte que ce film ressemble cette fois bel et bien à un point final. À moins que les domestiques ne deviennent acteurs à succès à l’avènement du cinéma parlant qui sert de toile de fond au film, et que toutes les conventions de la noblesse ne soient chamboulées par la crise de 29 qui se profile à l’horizon (et dont on ne trouve nulle trace ici), on ne voit pas comment une suite serait possible. L'heure des adieux a sonné. Comme le chantait Neil Young, "mieux vaut brûler franchement que s'éteindre à petit feu".

L'affiche du film "Downton Abbey II, Une nouvelle ère", sorti en France le 27 avril 2022. (FOCUS FEATURES LLC)

La fiche

Genre : drame, historique
Réalisateur : Simon Curtis
Scénario : Julian Fellowes
Pays : Royaume-Uni, Etats-Unis
Durée : 2h06
Distributeur : Focus Features LLC
Sortie : 27 avril 2022

Avec : Hugh Bonneville, Maggie Smith, Michelle Dockery, Elizabeth McGovern, Laura Carmichael, Jonathan Zaccaï, Nathalie Baye, Rob James-Collier...

Synopsis : 1928. Violet, la douairière des Grantham, convoque la famille : elle vient d’hériter d’une villa dans le sud de la France, généreux leg d’un certain marquis de Montmirail. En parallèle, un réalisateur pour le cinéma souhaite tourner son nouveau film muet, The Gambler, à Downton Abbey. L’offre est tentante face aux lourds travaux de rénovation qui s’annoncent pour le domaine. Tandis que la production s’apprête à investir la propriété, la famille envisage d’en profiter pour aller découvrir la villa sur la côte d’Azur…

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