"Florence Foster Jenkins" : l'histoire vraie de "Marguerite" avec Meryl Streep
Un même sujet, une même vision, mais deux films
On se souvient de la formidable prestation de Catherine Frot dans le rôle-titre du film de Giannoli, qui lui valut un César en février dernier. Frears la remplace par l’oscarisée Meryl Streep, ce qui n’est pas rien, et développe le rôle de son mari-manager en le confiant à Hugh Grant, qui n’a pas fait grand-chose depuis longtemps. Il retrouve ici un rôle à sa hauteur, dans le frac d’un mondain pur jus, qui lui sied à ravir.Stephen Frears déplace l’action des années 20 parisiennes de "Marguerite", aux années 40 new-yorkaises, en corrélation avec la biographie de Florence Foster Jenkins (1868-1944), notable de la gentry locale. Hormis ces petites différences, les deux films suivent l’exacte-même intrigue, voire construction, rassemblant en ce qui semble quelques mois, toute une vie. Ce qui n’empêche en rien d’y prendre le même plaisir dans un cas comme dans l’autre. Frears donne un peu plus de place au mari de Florence que Giannoli, mais fait l’inverse concernant son professeur de chant, tenu par un formidable Michel Fau dans "Marguerite". Le Britannique, lui, s’attarde plus sur le pianiste accompagnateur de Florence, tenu par un excellent Simon Helberg (surtout vu dans des séries, mais aussi dans "A Serious Man" des frères Coen.
Frears, Streep et Grant, trio gagnant
Dans les deux films, mais sans doute plus chez Stephen Frears, ressort l’abnégation de Saint-Clair (Hugh Grant) envers son épouse, même s’il la trompe allègrement, avec son accord tacite. S’il tire parti du statut social de son épouse, il lui est entièrement et sincèrement dévoué. Beaucoup de tendresse émane de leur relation, en vertu de la remarquable composition de l’acteur britannique, en parallèle à sa classe incomparable. Il en volerait presque la vedette à Meryl Streep qui par ailleurs compose une non moins excellente prestation, sous un maquillage qui la vieillit, mais plus attendue dans un rôle excentrique.
Comme à son habitude, Stephen Frears soigne au millimètre sa reconstitution, tant historique que sociale, dans de magnifiques décors et des costumes splendides, où dominent les tenus de scène très kitsch de Florence. Il concocte des séquences à l’euphorie communicative, comme le fox-trot chez Kathleen, où la prestation finale de la pseudo cantatrice au Carnegie Hall de New York. Son humour plein d’acuité fait merveille sur un sujet qui s’y prête. Ce n’est pas pour rien que Florence Foster Jenkins inspire deux films en si peu de temps. C’est un cas dans l’histoire de la musique (Cole Porter l’admirait et David Bowie aurait emporté un de ses rares enregistrements sur une île déserte). Mais elle porte surtout un magnifique message dans sa passion sans limite pour la musique, qui dépasse toute conjoncture. Un enthousiasme communicatif, prosélyte, enthousiasmant.
Reportage : P. Deschamps, F. Pairaud :
LA FICHE
Comédie de Stephen Frears (Grande-Bretagne - France) - Avec : Meryl Streep, Hugh Grant, Simon Helberg, Rebecca Ferguson, Nina Arianda, Stanley Townsend - Sortie : 13 juillet 2016
Synopsis : L’histoire vraie de Florence Foster Jenkins, héritière new-yorkaise et célèbre mondaine, qui n’a jamais renoncé à son rêve de devenir une grande cantatrice d’opéra. Si elle était convaincue d’avoir une très belle voix, tout son entourage la trouvait aussi atroce que risible. Son “mari” et imprésario, St Clair Bayfield, comédien anglais aristocratique, tenait coûte que coûte à ce que sa Florence bien-aimée n’apprenne pas la vérité. Mais lorsque Florence décide de se produire en public à Carnegie Hall en 1944, St Clair comprend qu’il s’apprête à relever le plus grand défi de sa vie...
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