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"Heritage fight" : les aborigènes contre l'usine à gaz

La jeune réalisatrice française Eugénie Dumont a suivi, caméra au poing, la résistance d'une communauté aborigène face à un conglomérat industriel bien décidé à profiter des ressources naturelles d'un territoire jusque là préservé. La mémoire et la tradition face à la course au profit. Mais le pot de terre va se révéler plus résistant que prévu...
Article rédigé par Pierre-Yves Grenu
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Scène du documentaire "Heritage Fight"
 (Docks 66)
La note Culturebox
3 / 5                  ★★★☆☆

Documentaire franco-australien d'Eugénie Dumont - durée : 1h30 - Sortie : 8 octobre 2014

Synopsis : Au cœur de la dernière contrée sauvage d’Australie, une communauté aborigène, les Goolarabooloo, doit faire face au projet d’implantation de la plus grande usine à gaz au monde soutenu par le gouvernement.
Aborigènes et citoyens solidaires décident alors de s'unir pour défendre ce qui n’a pas de prix :   une terre, une vision du monde, et plus que tout, un héritage culturel. Commence alors un combat à l’issue inattendue…


Dès la première image, cette lumière s'engouffre, la plus belle au monde. Ces terres rouges, somptueuses, bordent l'Océan indien, dans le nord de l'Australie. La péninsule de Broome est un endroit magique et préservé. Les aborigènes de la communauté Goolarabooloo continuent à entretenir "l'héritage" de leurs ancêtres, les premiers habitants de l'île-continent. Mais le site attire les convoitises, et ce n'est pas sa beauté qu'on y cherche. L'autre richesse est sous terre. Et de grands groupes projettent d'implanter ici la plus grande usine à gaz du monde, un projet de 45 milliards de dollars !

Face aux géants industriels, une petite communauté. Des aborigènes, bien sûr, mais aussi des Australiens de toutes origines, rassemblés par un combat : maintenir l'intégrité de ce lieu exceptionnel, où les ancêtres aborigènes ont été enterrés, et où leurs descendants continuent de communier dans une connexion unique avec les arbres, la terre, la nature.

  (Docks 66)


Depuis des années, c'est un dialogue de sourd. Le gouvernement promet de "vrais emplois" à une population qui vit essentiellement d'aides sociales. Les autochtones répondent "Shame, shame, shame" (Honte, honte, honte !) à ceux qui veulent "profaner nos tombes".

Derrière ce bras-de-fer, c'est toute l'ambiguïté de l'Australie vis-à-vis de "la question aborigène" qui resurgit. Incontestablement parmi les pays les plus démocratiques au monde, l'état traîne comme un boulet son comportement terrifiant vis-à-vis de ses premiers habitants. Combien d'atrocités commises, d'empoisonnements, de déportations, de viols, de population réduite à l'esclavage ? Et on a continué à enlever des enfants pour les confier à des familles "blanches" jusqu'en 1970. Les aborigènes n'ont obtenu le droit de vote qu'à la même époque. L'Australie a certes fait repentance, présenté ses excuses, mais la question reste brûlante.

  (Docks 66)


La jeune réalisatrice Eugénie Dumont s'est immiscée dans cette bataille si déséquilibrée. Chaque jour, les habitants viennent s'allonger devant les énormes engins de chantiers. La police les éloigne et les verbalise… Pot de terre contre pot de fer ? Oui… mais à la fin, c'est le petit qui gagne. Le géant a du rebrousser chemin et aller forer ailleurs.

  (Docks 66)


Eugénie Dumont capte des instants exceptionnels : l'incroyable énergie de Louise Moddleton qui, jour après jour, hurle ses quatre vérités aux policiers qui l'entravent, la mobilisation touchante de ces citoyens face à un rouleau compresseur… Et elle nous offre de magnifiques paysages. Et si quelques séquences sont un peu brouillonnes, image floue, on lui pardonne car son regard est, lui, limpide.
 

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