"It Follows" : l'horreur après le plaisir
De David Robert Mitchell (Etats-Unis), avec : Maika Monroe, Keir Gilchrist, Daniel Zovatto - 1h34 - Sortie : janvier 2015
Synopsis : Après une expérience sexuelle apparemment anodine, Jay se retrouve confrontée à d'étranges visions et à l'inextricable impression que quelqu'un, ou quelque chose, la suit. Face à cette malédiction, Jay et ses amis doivent trouver une échappatoire aux horreurs qui ne semblent jamais loin derrière…
Slasher sidéen
Le jeune réalisateur David Robert Mitchell déclare avoir voulu, avec "It Follows" mettre en scène un film d’horreur, mais également "beau", avec différents niveaux de lecture. Son objectif est en bonne partie atteint. Le cinéaste effectue une relecture des "slashers", digression des films d’horreur, dont l’archétype est "Halloween" (1978) de John Carpenter. "slashers", du verbe "to slash" (taillader). Ces films reposent sur des tueurs psychopathes utilisant des armes blanches pour trucider le plus souvent des jeunes femmes. Wes Craven effectua lui-même une relecture du thème dans sa série triomphale "Scream".
Cette célèbre franchise aux quatre opus, tirait quelque peu sur la parodie. "It Follows" beaucoup moins, même si elle subsiste en filigrane. David Robert Mitchell surfe intentionnellement sur les codes du genre : les victimes sont des adolescents vivant leurs premières expériences sexuelles, le passage à l’acte annonce la victime en sursis, et la persécution sous forme de poursuite acharnée rythme le suspense. Les choses changent du moment où le meurtrier n’est pas un psychopathe, n’utilise pas d’arme, mais s’avère une mystérieuse entité qui change constamment de corps. Sa démarche lente, mais inexorable est celle des zombies. Elle est porteuse d’une malédiction qui harcèle en la suivant une personne qui, pour s’en délivrer, doit avoir une relation sexuelle avec un individu, afin de lui transmettre la malédiction. "Passe à ton voisin", qu'il soit féminin ou masculin : un mode de contamination tout vénérien, allusion appuyée au sida.
Caméra subjective
David Robert Mitchell sait qu’il met les pieds dans le plat, mais en joue assez bien, distillant d’emblée un climat d’horreur avec une introduction très efficace, puis exposant les termes de son intrigue, tout en concoctant des scènes de pure frayeur. La victime persécutée, Jay (Malka Monroe), est la seule à voir l’entité transformiste. Entourée de sa sœur et de voisins de son âge, elle va tenter de les convaincre de sa malédiction pour parvenir à s’en délivrer. Le film prend de fait la forme d’un "club des cinq" chez les fantômes, ou, s’il y avait un chien, celle de la série animée "Scoubidou"… C’est le côté parodique du film.
Mais que l’on ne s’y trompe pas, "It Follows" fait vraiment peur. David Robert Mitchell joue assez subtilement des apparitions de l’entité, et d’une musique assourdissante dans les moments de pure angoisse. Une musique électronique toute référentielle à celles des années 70-80, répétitive à la John Carpenter. Sa caméra se fait parfois subjective, mettant le spectateur à la place de l’entité, donc en position du tueur, comme pour interroger l’audience sur sa position face au meurtre, et comme voyeur : dérangeant.
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