"L'Empire" : Bruno Dumont sonne le glas des blockbusters dans un film de science-fiction décalé
Fabrice Luchini en avatar de Dark Vador, Camille Cottin en impératrice galactique et la planète Tatooine transférée sur les plages du nord-ouest de la France… Vous y croyez ? Bruno Dumont oui, comme nous, avec L’Empire qui sort mercredi 21 février.
Ce pastiche de Star Wars, fidèle aux codes de la saga et nourri de comédie, sort au moment où les blockbusters de science-fiction hollywoodiens font de moins en moins recette au box-office. L'Empire apparaît de ce point de vue comme un chant du cygne.
Plancher des vaches
L’empire galactique est perturbé par la naissance d’un enfant que les uns voient comme le messie et les autres comme une entité démoniaque. Les deux camps s’affrontent pour se l’approprier, jusqu’à ce qu’ils débarquent sur Terre, où le conflit va se nouer entre Belzebuth (Fabrice Luchini) et la Reine galactique (Camille Cottin), sous les yeux de deux enquêteurs flegmatiques.
Bruno Dumont se défend d’avoir réalisé une parodie de Star Wars avec L’Empire, en se réclamant amateur de science-fiction et respectueux du genre. Il n’y a pourtant rien de critiquable à cela, l’hommage faisant partie d’une telle démarche. Mel Brooks nous avait donné une parodie poussive de Star Wars avec La Folle histoire de l’espace, en 1987, Bruno Dumont atteint son but en faisant descendre La Guerre des étoiles sur le plancher des vaches, au sens propre.
Hybridation d'un genre
Bruno Dumont sort L’Empire, au moment même où les super-héros ne font plus recette et que les dernières productions de science-fiction, comme The Creator, n’engrangent pas les bénéfices escomptés. L’hybridation d’un genre, ici la science-fiction, avec la comédie, marque la décadence de son traitement à l’écran, comme ce fut le cas avec les parodies de films fantastiques du duo Abbott et Costello dans les années 1940.
Pour être dans les clous, Bruno Dumont soigne son image en faisant appel à des effets spéciaux dignes de Star Wars, mais il se lâche quand il use de costumes plus parodiques. Ce "réalisme" décalé sert l’humour qui fuse sur le ton de la dérision et du caricatural.
Le réalisateur laisse en roue libre avec bonheur Fabrice Luchini qui campe avec jouissance un Dark Vador de pacotille, et l’on retrouve le duo d’enquêteurs de P’tit Quinquin (Bernard Pruvost et Philippe Jore), Dupont et Dupond à la Dumont.
Cette transposition d'un univers de "fantasy" dans le milieu populaire du nord-ouest de la France aboutit au film le plus surréaliste qui soit. Comme si le peintre André Delvaux avait troqué ses trains et ses gares pour des vaisseaux spatiaux et des spatioports. Bruno Dumont nous prend encore là où on ne l’attendait pas, trouve l’esthétique et le ton pour mettre en boîte avec révérence le "space opera" hollywoodien, dans un environnement où il n’aurait, sans lui, rien à y faire.
La fiche
Genre : Science-fiction / Comédie
Réalisateur : Bruno Dumont
Acteurs : Lyna Khoudri, Anamaria Vartolomei, Camille Cottin, Fabrice Luchini, Brandon Vlieghe, Julien Magnier, Brenard Pruvost, Philippe Jore
Pays : France / Allemagne / Italie / Belgique / Portugal
Durée : 1h50
Sortie : 21 février 2024
Distributeur : Arp Sélection
Synopsis : Entre Ma Loute et La Vie de Jésus, entre le ciel et la terre, Bruno Dumont nous offre une vision caustique, cruelle et déjantée de La Guerre des étoiles.
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