"La Chanson de l'éléphant", avec Xavier Dolan, acteur, en thérapie théâtrale
Le Théâtre des opérations
S’il a beaucoup tourné depuis 1995 pour le cinéma et la télévision, Charles Binamé n’a pas encore marqué les consciences. "La Chanson de l'éléphant" est sans doute son film le plus ambitieux à ce jour, avec en tête d’affiche un acteur à la renommée internationale, reconnu comme comédien et réalisateur, Xavier Dolan, en déséquilibré mental. Dans un rôle secondaire l’on a beaucoup de plaisir à retrouver Carrie-Anne Moss, inoubliable Trinity dans "Matrix", et qui semble passer à côté de sa carrière. Bruce Greenwood s’en tire un peu mieux comme second couteau, mais dans des films plus prestigieux tels la franchise "Star Trek " ou "Super huit ". Il donne ici la réplique à Dolan, comme psychiatre enquêtant sur la disparition d’un de ses confrères et que le patient a vu pour la dernière fois.La quasi-totalité de "La Chanson de l'éléphant" se déroule dans le bureau du patricien au sein de l’hôpital. Aussi, les dialogues dominent un film qui peine à feindre sa source théâtrale. Il y tente bien dans la première demi-heure en jouant sur l’alternance entre flash-back et action au présent. Mais le montage donne une texture artificielle au récit, dont le procédé répétitif ne fait qu’accentuer la maladresse. Le huis clos est un art difficile et peu de cinéastes sont parvenus à le maîtriser, come Hitchcock ou Polanski. Ce qui n’empêche pas Charles Binamé de soigner ses cadres et sa lumière dans de beaux plans bien ajustés, avec un soin apporté à la reconstitution des années 60 où se déroule film, sans s’y référer explicitement.
Prix du meilleur scénario adapté
Michael (Xavier Dolan) entraîne le docteur Green (Bruce Greenwood) dans le labyrinthe de sa logorrhée fascinatoire, le menant par le bout du nez par ses devinettes, ses fausses pistes et chausses trappes, auxquelles le praticien se laisse prendre. Jusqu’à une résolution dramatique, fondé sur le jeu instauré par Michael. La pathologie du patient résultant d’une mère accaparée par sa carrière de diva, au détriment de l’attention portée à son fils, est par ailleurs formelle et n’éclaire guère sur la nature névrotique du jeune homme.
Mis bout à bout, les griefs du film vont à son encontre. Charles Binamé fait montre d’une maîtrise de l’image, mais guère de la narration. "La Chanson de l'éléphant" est pourtant auréolé du Prix écrans canadiens du meilleur scénario adapté, signé par l’auteur de la pièce lui-même, Nicolas Billon. Le film semble avoir du mal à s’émanciper de sa source dramatique, dans une forme statique et littéraire. Thriller psychologique, sur un sujet porteur, il lui manque ce frisson propre au genre, qui passe peut-être sur scène, mais mal à l’écran. Comme s’il y avait l’air sans la chanson.
LA FICHE
Drame de Charles Binamé (Canada) - Avec : Bruce Greenwood, Xavier Dolan, Catherine Keener, Carrie-Anne Moss - Durée : 1h50 - Sortie: 3 août 2016
Avertissement : des scènes, des propos ou des images peuvent heurter la sensibilité des spectateurs
Synopsis : À la veille de Noël, la disparition soudaine du docteur Lawrence provoque une onde de choc dans l’institution psychiatrique où il exerce. Le directeur, le docteur Green, veut éviter que la nouvelle devienne publique, car l’hôpital a été récemment au centre d’un scandale. Il entreprend alors de questionner Michael, un jeune homme en traitement qui est le dernier à avoir vu le médecin. Malgré l’avertissement de l’infirmière en chef qui connaît mieux que quiconque le patient, celui-ci entraîne Green dans un jeu psychologique qui le trouble profondément.
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