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"La Cour de Babel", un an dans une classe d'élèves non francophones

"La Cour de Babel", de Julie Bertuccelli, en salles mercredi, retrace une année d'une classe d'accueil d'adolescents immigrés qui viennent d'arriver en France. Un documentaire qui est à la fois le reflet des difficultés de l'exil et une ode au vivre ensemble.
Article rédigé par franceinfo - franceinfo Culture (avec AFP)
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La Cour de Babel, de Julie Bertuccelli
 (Pyramide Films)

Le dispositif de CLA (classe d'accueil) qui scolarise ici des collégiens de 11 à 15 ans fraîchement  arrivés d'une vingtaine de pays, est un sas par lequel transitent les élèves non francophones avant de rejoindre une classe "ordinaire".

Tourné en 2011-2012 dans le collège parisien de la Grange aux belles, en ZEP (zone d'éducation prioritaire), le film se déroule dans le huis clos de la classe, montrant sans voix off  des tranches de vie de jeunes venus du Sri Lanka, de Chine, du Venezuela, de Mauritanie, d'Ukraine... s'exprimant dans un français plus ou moins hésitant. Le cadrage serré installe une proximité avec le spectateur.
 
Julie Bertuccelli : montrer que "cette différence est une grande richesse"

"C'était un peu un prétexte pour voir ce que c'est que de vivre ensemble quand on vient de tant de pays différents, qu'on a tant de religions, d'histoires personnelles, de trajectoires, de langues différentes, et comment  l'apprentissage du français est un vecteur super fort d'intégration", explique la réalisatrice Julie Bertuccelli. Elle voulait aussi montrer que "cette  différence est une grande richesse, surtout aujourd'hui avec tous les discours nauséabonds qu'on entend".
 
"C'est des mômes hyper courageux. Ils ont traversé beaucoup de difficultés, ce qui les a rendus très matures", souligne la cinéaste, César du meilleur premier film pour "Depuis qu'Otar est parti". Il y a aussi "des filles, souvent, qui parlent de pays où elles sont maltraitées". Etre ici "est une chance pour eux, ils le savent, ils ont une volonté incroyable de s'intégrer".
 
Une enseignante qui guide, corrige et rassure les élèves

"A cet âge d'éveil dans des situations qui sont difficiles pour beaucoup, ils ont l'écoute des autres, la tolérance, l'envie de s'enrichir les uns des autres",  salue le ministre de l'Education nationale Vincent Peillon, allé défendre ce film à l'avant-première et sur un plateau télé, "fier" que l'école accueille tous les enfants sans distinction.
 
Jamais la caméra ne pousse la porte du domicile. Pas plus qu'elle ne suit les élèves quand ils commencent à étudier certaines matières avec leurs camarades français.
 
On aperçoit peu l'enseignante Brigitte Cervoni, mais la voix de cette femme chaleureuse à la diction impeccable est omniprésente, qui tantôt guide, corrige, rassure les élèves, s'enquiert de leur vie d'avant et des différences avec la France, les recadre si besoin sans jamais s'emporter.
 
Des jeunes au passé parfois chaotique

Les élèves se confient à leur professeur, pas à la caméra. "C'est de la  dentelle, ce genre de montage", indique Julie Bertuccelli, concédant qu'il a fallu faire des choix cornéliens pour retenir 1h30 d'une année de travail.
 
Au gré des entretiens de l'enseignante avec les proches des jeunes exilés s'esquisse leur passé parfois chaotique.
 
"Elle n'a pas de problème", assure la femme qui accompagne la Guinéenne  Djenabou, 11 ans, convoquée après un problème de comportement. Mais qui au juste est cette femme ? Apparemment, la cousine de la tante à qui sa mère avait confié Djenabou. Progressivement, on comprend que la gamine-qui-n'a-pas-de-problème a été ballottée entre plusieurs pays et plusieurs adultes.
 
"La classe d'accueil m'a aidée à grandir", dit une élève

Après dix ans de séparation, la timide chinoise Xin a rejoint sa mère venue travailler en France, qu'elle n'avait pas vue depuis ses 4 ans.
 
Certains affichent des résultats brillants comme la Roumaine Andromeda, d'autres décevants comme le Serbe Marko. "Je n'ai pas le temps", explique-t-il. Venu parce que sa famille juive était menacée par des néo-nazis, il est accaparé par les dossiers de demande d'asile, seul à même de les remplir.
 
Retrouveront-ils ensuite la bienveillance qui règne dans le cocon de leur classe d'accueil ? En les quittant, Brigitte Cervoni, devenue inspectrice, dit qu'on n'oublie sûrement jamais ses derniers élèves. Les spectateurs devraient aussi en garder un souvenir fort.
 
"La classe d'accueil m'a aidée à grandir", la quitter a été "un  déchirement", raconte maintenant l'ivoirienne Naminata. "Avec les jeunes que j'ai rencontrés après, ce n'était pas pareil". Se faire des amis, "c'est  compliqué, c'est plutôt avec des étrangers", constate aussi l'Ukrainienne Oksana.

Des milliers d'élèves non francophones en France

Plusieurs milliers d'élèves non francophones arrivent en France tous les ans. En 2012-2013, ils étaient 45.300, soir 4,7% du total des élèves, selon le ministère de l'Education nationale.

Parmi eux, 83,7% bénéficiaient d'un soutien, dans une classe d'accueil ou  quelquefois avec des enseignants itinérants, proportion variable suivant les  académies: 100% d'élèves aidés à Paris, 59,4% à Poitiers.

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