"La Terre des hommes", thriller paysan dérangeant sur le harcèlement en milieu rural
Les agriculteurs vont mal et le cinéma français est un des rares dans le monde à s'en préoccuper. Le deuxième film de Naël Marandin aborde le sujet en le teintant de sexisme, au croisement de "Petit paysan" et de "Slalom". Efficace et dans l’air du temps.
Le deuxième film de Naël Marandin rejoint la thématique agricole qui trouve un regain d’intérêt au cinéma depuis Petit paysan (2017). D’autres avant et après ce dernier ont exploré le domaine, mais peut-être jamais autant qu’aujourd’hui. La Terre des hommes, qui sort mercredi 25 août, relie le sujet au harcèlement sexuel que subit une jeune agricultrice. Un rapprochement thématique qui participe de la réussite du film.
Thriller sentimental rural
Fille d’agriculteur, Constance veut sauver la propriété familiale de la faillite, avec son fiancé. Elle trouve un allié précieux en Sylvain, responsable syndical local. Celui-ci lui fait des avances opportunistes auxquelles elle finit par céder, alors que les gros propriétaires alentours ne cherchent qu’à s’approprier sa terre.
Si #MeToo a libéré la parole des femmes, il a aussi ouvert les films à des sujets inédits comme celui du harcèlement. On a pu le voir récemment avec l’excellent Slalom de Charlène Favier, où la réalisatrice transposait sa propre expérience vécue dans le domaine du sport. La Terre des hommes se transporte dans le monde agricole en crise. Sur un scénario original qui rapproche deux univers auxquels on ne s’attendait pas, Naël Marandin concocte un thriller sentimental qui ouvre les yeux sur les pratiques d’un milieu peu loquace : pédagogique et prenant.
Ambiguïté
Les choses vont trop bien dans la première partie du film pour ne pas vite tourner au vinaigre. Aussi, La Terre des hommes mène-t-il de front deux intrigues imbriquées : la peinture d’un milieu professionnel en pleine mutation, et celle d’un prédateur sexuel. Si l’écriture est au rendez-vous, les acteurs le sont également. Diane Rouxel (Constance) et Jalil Lespert (Sylvain) forment un duo, d’abord empatique, puis conflictuel, très au point. Ils sont secondés par Olivier Gourmet (le père), Finnegan Oldfield (le fiancé) et le trop rare Bruno Raffaelli qui campe un grand propriétaire vorace de premier ordre.
On l’aura compris, La Terre des hommes vaut pour son sujet et son interprétation, moins pour sa mise en scène, même si elle est dans les clous, observatrice, et donne le point de vue de la victime. Une jeune femme entrepreneuse est prise dans les rets d’un décideur par trop entreprenant. Classique. Mais c’est le milieu qui change tout et on le voit ici de l'intérieur. Naël Marandin sait aussi transmettre les émotions tout comme le suspense. Le parallèle avec Slalom vient de l’ambiguïté de la situation. Est-elle consentante ? Est-il sincère ? Pourquoi ? La résolution n’est pas forcément celle à laquelle on s’attend. Et c’est bien sur ce terrain de l’écriture que le film séduit, servi par un casting au diapason. Une réussite.
La fiche
Genre : Drame
Réalisateur : Naël Marandin
Acteurs : Diane Rouxel, Finnegan Oldfield, Jalil Lespert, Olivier Gourmet
Pays : France
Durée : 1h36
Sortie : 25 août 2021
Distributeur : Ad Vitam
Synopsis : Constance est fille d’agriculteur. Avec son fiancé, elle veut reprendre l’exploitation de son père et la sauver de la faillite. Pour cela, il faut s’agrandir, investir et s’imposer face aux grands exploitants qui se partagent la terre et le pouvoir. Battante, Constance obtient le soutien de l’un d’eux. Influent et charismatique, il tient leur avenir entre ses mains. Mais quand il impose son désir au milieu des négociations, Constance doit faire face à cette nouvelle violence.
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