"Le Cas Richard Jewell" : un Clint Eastwood majeur en éternel justicier de l'Amérique
Clint Eastwood réhabilite Richard Jewell, cet agent de sécurité des JO d’Atlanta en 1996, accusé à tort de terrorisme.
Clint Eastwood s’est souvent fait le porte-parole des causes perdues dans ses films, comme acteur et réalisateur. Que cela soit dans ses westerns (L’Homme des hautes plaines, Josey Walles Hors-la loi, Impitoyable) ou dans ses thrillers et ses drames (L’Inspecteur Harry, Jugé coupable, Sully). Il creuse son sillon en signant Le Cas Richard Jewell, sur les écrans mercredi 19 janvier, où il retrace l’enquête à charge du FBI contre cet agent de sécurité des JO d’Atlanta en 1996, accusé à tort de terrorisme.
Coupable idéal
En 1996, à défaut de pouvoir porter le "badge" qui ferait de lui le flic dont il rêve, Richard Jewell (Paul Walter Hauser) rejoint l’équipe de sécurité des JO d’Atlanta. Lors d’une ronde, il découvre un sac suspect et impose un périmètre de sécurité. Mais la bombe explose, tuant deux personnes et faisant une centaine de blessés. Un bilan qui aurait pu être beaucoup plus lourd sans son intervention. Devenu le héros de l’Amérique, le FBI le réduit bientôt au rang de premier suspect en raison d’un passé un peu trouble dont s’empare la presse.
Clint Eastwood prend son sujet à bras le corps en s’inspirant de faits réels qui ont tenu en haleine les Etats-Unis, comme dans ses récents films Le 15h17 pour Paris (2018) ou Sully (2016). Il instaure dès le début un climat d’empathie avec son personnage, obèse, reclus, vivant au côté de sa mère, consciencieux à l’extrême dans sa mission d’agent de sécurité. Il fait à contrario un exposé à charge contre les médias et le FBI, trop heureux de trouver le coupable idéal, alors que la crainte des attentats est à son paroxysme après la première guerre d’Irak et avant l’explosion des Twin Towers en 2001.
Broyeur-compresseur
Clint Eastwood n’a jamais caché son admiration pour les héros, figures emblématiques d’une Amérique conquérante qui privilégie les destins individuels. Richard Jewell serait plutôt un anti-héros, enrobé dans son corps d’obèse, effacé et vivant chez sa mère. Il est de plus mal noté pour son zèle en tant qu’agent de sécurité, et renvoyé des forces de l’ordre officielles. Promu héros national du jour au lendemain, il est devenu trois jours plus tard l’ennemi public numéro un.
Film à décharge à son égard, Le Cas Richard Jewell attaque avec véhémence le FBI pour ses méthodes ambiguës pour piéger sa cible. La presse, en la personne d'une journaliste de l’Atlanta Journal-Constitution, qui aurait fait fuiter des informations en les extorquant de façon peu reluisante, n’est pas mieux lotie. Ce dernier pan de l’affaire met le film aujourd’hui au coeur d'une polémique aux Etats-Unis, alors que les médias sont durement éprouvés par l’administration Trump.
Il reste que Eastwood réalise un film prenant de bout en bout, avec Paul Walter Hauser remarquable dans le rôle-titre, et Sam Rockwell en avocat armé d’une "cool-attitude" et d’une efficacité à toute épreuve. Ils forment un duo à la Laurel et Hardy décalés, projetés dans un scénario qui les dépasse. Ils nous embarquent dans un imbroglio kafkaïen, dénonciateur du broyeur-compresseur que peuvent être la justice et la presse sur l’individu. Edifiant.
La fiche
Genre : Drame
Réalisateur : Clint Eastwood
Acteurs : Paul Walter Hauser, Sam Rockwell, Kathy Bates, Jon Hamm, Olivia Wilde, Nina Arienda, Ian Gomez, mike Pniewski
Pays : Etats-Unis
Durée : 2h09
Sortie : 19 février 2020
Distributeur : Warner Bros. France
Synopsis : En 1996, Richard Jewell fait partie de l'équipe chargée de la sécurité des Jeux Olympiques d'Atlanta. Il est le premier à alerter de la présence d'une bombe et à sauver des vies. Mais il se retrouve bientôt suspecté... de terrorisme, passant du statut de héros à celui d'homme le plus détesté des Etats-Unis. Surmédiatisé, endommagée par cette expérience, il fut innocenté par le FBI grâce à son avocat trois mois plus tard, mais sa réputation ne fut jamais complètement rétablie.
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