"Les Barbares" : une comédie hilarante de Julie Delpy sur l'arrivée dans un village breton d'une famille de réfugiés syriens

Le dernier film de Julie Delpy raconte l'affolement d'un village breton à l'arrivée d'une famille de réfugiés syriens, alors qu'ils attendaient des Ukrainiens.
Article rédigé par Laurence Houot
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié
Temps de lecture : 5min
"Les Barbares" de Julie Delpy, sortie le 18 septembre 2024. (JULIEN PANIE / LE PACTE)

La réalisatrice et comédienne Julie Delpy tombe à pic avec cette comédie bien sentie sur la capacité d'un village breton à accueillir les étrangers. Servi par un casting trois étoiles, Les Barbares a été présenté en ouverture du Festival francophone à Angoulême, avant de sortir dans les salles le 18 septembre.

À Paimpont, en Bretagne, le conseil municipal, ému par la guerre en Ukraine, décide d'accueillir une famille de réfugiés de ce pays victime de l'attaque russe. Tout le village,  galvanisé par un esprit de solidarité, se prépare dans la joie à l'arrivée de ces nouveaux arrivants.

Mais compte tenu de la forte attractivité des Ukrainiens, "très demandés sur le marché des réfugiés", c'est une famille syrienne qui débarque à Paimpont. Une équipe de la télé régionale réalise un documentaire sur cette aventure. 

Vécu comme un coup de Trafalgar, ce changement de programme de dernière minute n'est pas du goût de tous les habitants, et notamment d'Hervé Riou (Laurent Lafitte), le plombier du village, qui fraye avec des groupes identitaires bretons et s'acharne à saboter cette belle entreprise de solidarité. 

Joëlle (Julie Delpy), l'institutrice, fait tout ce qu'elle peut pour faire en sorte que l'accueil de Marwan et de sa famille se passe au mieux, mais la haine d'Hervé finit par contaminer une partie des habitants, effrayés par ce qu'ils ne connaissent pas.

Même Anne (Sandrine Kiberlain), la vieille amie de Joëlle, se laisse embarquer du côté des récalcitrants. Mais grâce à la ténacité de l'institutrice, qui remue ciel et terre pour faciliter les démarches administratives et sensibiliser le village à la situation des Syriens, tout finit par s'arranger.

Chronique de la haine ordinaire

Cinq ans après un film d'une veine plus grave, My Zoé, l'histoire d'un déchirement familial autour de la garde d'un enfant, Julie Delpy revient à son registre plus habituel, la comédie foutraque et drôle. Ce qui pourrait tourner à la farce lourdaude est ici mené de main de maître par cette réalisatrice dont la capacité à faire rire se confirme.

Derrière la légèreté de cette comédie, Julie Delpy en profite pour pointer la peur de l'immigré et le racisme ordinaire, qui font le terreau du vote RN, mais aussi la lourdeur de l'administration française en matière d'accueil des réfugiés, sans oublier de canarder, en toute discrétion, le macronisme.

Julie Delpy et Sandrine Kiberlain dans "Les Barbares" de Julie Delpy, sortie le 18 septembre 2024. (                                )

Le film n'épargne pas non plus pas les bobos et leurs bonnes intentions, leur indécrottable désir de "bien vivre ensemble" et leur besoin de s'acheter une bonne conscience. Autant de gimmicks que Julie Delpy croque avec son propre personnage de femme seule et de militante légèrement hystérique.

Qui sont les Barbares ? C'est toute la question de cette histoire toute simple, teintée d'angélisme et dessinée d'un trait un peu forcé (c'est ça qui est drôle). Ce conte des temps modernes montre avec ironie que même les "barbares" peuvent changer d'avis quand ils découvrent ce qui se cache en réalité derrière leurs fantasmes et leurs craintes.

Au-delà de ce message politique, c'est aussi la vie que chante cette fable acidulée, qui se referme sur la naissance d'un enfant. Un événement qui, comme souvent, sonne la fin des hostilités.

Laurent Lafitte et India Hair dans "Les Barbares" de Julie Delpy, sortie le 18 septembre 2024. (LE PACTE)

Dans une réalisation rythmée, avec des dialogues bien sentis, les comédiens se déchaînent avec une généreuse bonne humeur : Laurent Lafitte campe avec panache le plombier raciste (mais finalement pas si mauvais bougre quand on sait par quel bout le prendre), l'excellente India Hair lui donne la réplique dans le rôle de l'épouse benoîte et soumise (jusqu'à ce que non, finalement).  

Sandrine Kiberlain, en vieille copine frustrée, mal mariée, portée sur la bouteille, Jean-Charles Clichet, le maire, Zyad Bakri, l'émouvant papa syrien, Dalia Naous, sa femme, Rita Hayek, leur fille qui tombe amoureuse d'un fils du village, Émilie Gavois-Kahn en pulpeuse bouchère, le poétique Albert Delpy, au rendez-vous de chacun des films de sa fille… On pourrait citer tout le casting tant chacun interprète à merveille sa partition dans cette comédie chorale de pure tradition française, sur laquelle soufflent de nombreux esprits, d'Astérix à Jean Yanne, en passant par le Splendid.

Affiche du film "Les Barbares" de Julie Delpy, sortie le 18 septembre 2024. (LE PACTE)

La Fiche

Genre :  Comédie
Réalisateur : Julie Delpy
Acteurs : Julie Delpy, Sandrine Kiberlain, Laurent Lafitte
Pays : France
Durée : 1h37
Sortie : 18 septembre 2024
Distributeur : Le Pacte
Synopsis : À Paimpont, l'harmonie règne : parmi les habitants, il y a Joëlle, l'institutrice donneuse de leçons, Anne, la propriétaire de la supérette portée sur l'apéro, Hervé, le plombier alsacien plus breton que les Bretons, ou encore Johnny, le garde champêtre fan de… Johnny. Dans un grand élan de solidarité, ils acceptent avec enthousiasme de voter l'accueil de réfugiés ukrainiens. Sauf que les réfugiés qui débarquent ne sont pas ukrainiens… mais syriens ! Et certains, dans ce charmant petit village breton, ne voient pas l'arrivée de leurs nouveaux voisins d'un très bon œil. Alors, au bout du compte, c'est qui les barbares ?

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.