"Life - origine inconnue" : un space opera au top entre "Gravity" et "Alien"
Le 7e passager
"Alien" (Ridley Scott, 1979) était sous-titré "Le 8e passager". Dans "Life", ils sont six, jusqu’à ce que s’incruste un 7e. Si l’acheminement de la bête était remarquable dans le film de Scott, elle est aussi très originale dans "Life", complètement différente, très progressive, comme dans un Hitchcock qui susurrerait à l’oreille : "jusqu’ici tout va bien, jusqu’ici tout va bien…" Aux références gothiques du film de 1979, se substitue l’introspection scientifique et un positivisme qui vont tourner au cauchemar. Une bonne piqûre de rappel contre les Prométhée modernes comme on n’en a pas eu depuis longtemps.Il suffit d’un grain de sable pour que tout parte en vrille. Et quelle vrille ! Les spectateurs comprendront... Une des grandes réussites du film est d’avoir donné à l’intrus une forme dénuée de tout anthropomorphisme, ce qui était encore le cas d"Alien" et la plupart des films de SF. Pas de ça ici, on vous laissera découvrir… Il faut laisser le mystère planer si l’on parle de "Life". Sinon, sur un canevas déjà usé jusqu’à la corde, il ne reste en effet qu’une coquille vide. C’est tout ce qui gravite autour qui importe et que Daniel Espinosa manie à merveille. Sa "bestiole" est une des plus réussies depuis… "Alien", sur un registre très différent. Et ce n’est pas la seule surprise qu’il nous réserve.
Frankenstein
On écrit toujours sur de l’écrit et "Life" le revendique d’emblée dans son magnifique premier plan, étrange, mystérieux, tout en référence, encore, à "Alien", auquel il sait qu’il va être comparé. Sa réussite est de s’en extraire. Pire que dans "Gravity", tout se passe en apesanteur dans la station orbitale, ce qui rajoute du suspense dans les poursuites au cœur du labyrinthe de l’ISS. On reprochera alors au scénario d’être plaqué sur ceux des jeux vidéo, mais cela fait belle lurette que les scénaristes s’en inspirent, avant que ce ne fût l’inverse ; l’échange est devenu réciproque : c’est le serpent qui se mord la queue.Comme serpent, l’intrus se pose là, parce que l’"alien" de "Life" a à voir avec l’anaconda et l’étoile de mer, comme une créature de H. P. Lovecraft (le plus grand auteur fantastique américain avec Poe), déjà une référence chez Ridley Scott. Les amateurs apprécieront. Ce n’est pas dans les performances d’acteurs (sinon physiques) que l’on va trouver les qualités du film, nous ne sommes pas chez Bergman. Mais dans le sous-texte de l’action sommeille un avertissement, comme dans toute bonne science-fiction. Tout repose dans "Life" sur la notion d’agressivité. Qui a commencé le premier ? Qui a agressé l’autre ? A force de vouloir comprendre les lois de la nature, il se peut qu’on la viole et qu’elle se retourne contre ceux qui tiennent à tout prix à en percer les secrets. Le vieux thème de "Frankenstein" "Le Prométhée moderne" (sous-titre du roman de Mary Shelley en 1818) est toujours vivant et n’a pas fini de nous hanter. Beau, intelligent, plein de suspense et de surprises, avec une fin inattendue, "Life" creuse le sillon de la science-fiction horrifique avec brio. Superbe.
LA FICHE
Science-fiction de Daniel Espinosa (Etats-Unis) - Avec : Jake Gyllenhaal, Ryan Reynolds, Rebecca Ferguson, Ariyon Bakare, Hiroyuki Sanada, Olga Dihovichnaya - Durée : 1h44- Sortie : 19 avril 2017
Interdit aux moins de 12 ans
Synopsis : À bord de la Station Spatiale Internationale, les six membres d’équipage font l’une des plus importantes découvertes de l’histoire de l’humanité : la toute première preuve d’une vie extraterrestre sur Mars. Alors qu’ils approfondissent leurs recherches, leurs expériences vont avoir des conséquences inattendues, et la forme de vie révélée va s’avérer bien plus agressive et intelligente que ce qu’ils pensaient…
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