Lumière 2013 : James Toback et Alec Baldwin se sentent "Séduits et abandonnés"
Le festival Lumière a choisi le film de James Toback "Seduits et abandonnés" pour l'une des rares avant-premières de son édition 2013. Le réalisateur devait être présent à Lyon, des ennuis de santé l'ont contraint à annuler son voyage.
De l'argent, beaucoup d'argent
James Toback et Alec Baldwin veulent faire un film ensemble. Une histoire d'amour torride pendant la guerre d'Irak entre un militaire très conservateur et une reporter très progressiste. Le titre est même trouvé "Le dernier Tango à Tikrit" ! Mais pour réaliser un film, il faut de l'argent, beaucoup d'argent et même encore plus, alors les deux compères décident d'aller à Cannes chercher le financement auprès de tous les milliardaires, producteurs, acheteurs étrangers présents autour de la Croisette pendant le festival. Nous sommes en 2012.
Projet prexte
Le projet est-il vrai? Doutons-en. Le reste n'est que vérité. Qu'ils rencontrent les financiers les plus importants du cinéma actuel, les comédiens et les comédiennes à l'apogée de leur carrière qu'il tentent d'intéresser à leur film pour permettre à leur pauvre budget de gonfler, ou qu'ils interrogent des vieux briscards du cinéma, rien n'est truqué, toutes les conversations sont réelles. Mais l'idée géniale de Toback, au delà de cette mise à nue du système, c'est d'accompagner le documentaire d'extraits de très grands films, en rapport avec la personnalité rencontrée ou la situation traversée. L'écran se divise, deux, trois quatre images.
Générique incroyable
Le générique est époustouflant et pour cause : aucun de ces très grands noms n'est payé puisqu'ils participent tous à un documentaire consacré à la préparation d'un film. "The play within the play", selon Shakespeare. Au delà du plaisir du spectateur à découvrir l'envers du décor, le malaise s'installe peu à peu. Quand, par exemple, un financier ne connait pas le nom des plus grandes stars, quand l'un ou l'autre des protagoniste déclare à Alec Baldwin, les yeux dans les yeux, qu'on ne peut pas asseoir un projet d'envergure sur son nom, quand on sent que le réalisateur est prêt (mais l'est-il vraiment?) à des compromis misérables pour décrocher la participation d'un nabab.
Oui, mais l'argent, il en faut bien
Dans les paillettes de Cannes, dans les suites luxueuses des grands hôtels de la Croisette se joue l'avenir du cinéma. Cette exhibition d'argent que d'aucuns jugent détestable, Thierry Frémeaux, la justifie à l'image en expliquant que la disparition de la publicité omniprésente signifierait qu'il n'y aurait plus d'argent, et sans argent, il n'y aurait plus de cinéma.
Création v/s commerce
Pourtant, au milieu de toutes ces discussions mercantiles (tout ce qui m'intéresse, dit en substance l'un des financiers, c'est de savoir combien ça va me coûter et combien ça va me rapporter), les voix des créateurs du cinéma, Scorsese, Bertolucci, Coppola pour ne citer que ceux-là, rappellent que le cinéma n'est pas qu'une histoire d'argent. Leur intransigeance et parfois leur mépris de la finance ostentatoire, démontrent une fois de plus que le cinéma reste ce bras de fer sans fin entre le désir de certains d'aller vers la création pure et celui d'autres de faire fructifier leur commerce.
Et finalement
Comme le dit, désabusé mais souriant Alec Balwin, donnant ainsi le titre au film "Dans le cinéma on est constamment séduits et abandonnés".
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