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"Men" : un film fantastique exigeant, parabole sur les violences faites aux femmes

Après deux films de science-fiction, le britannique Alex Garland réalise un film fantastique néogothique sur un sujet contemporain.

Article rédigé par Jacky Bornet
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié
Temps de lecture : 3min
Jessie Buckley dans "Men" de Alex Garland (2022). (METROPOLITAN FILMEXPORT)

Alex Garland est un des rares cinéastes à réaliser des films de science-fiction (Ex MachinaAnnihilation) et aujourd’hui fantastique, dont il est l’initiateur et le scénariste. Un amour envers ces genres qui se retrouve dans Men, projeté à la Quinzaine des réalisateurs à Cannes. Introduit dans un classicisme pur, le film bascule dans une dénonciation métaphorique des violences faites aux femmes, dont le sujet occupe l’actualité.

Hantise

Après le suicide de son mari violent, Harper emménage dans une maison isolée de la forêt anglaise. Quand elle visite le village voisin, elle ne rencontre que des hommes : son propriétaire récalcitrant, un pilier de bar, un policier inactif, et un vicaire vindicatif. Une présence mystérieuse dans les bois semble la traquer. Un homme aux aspects multiples se rapproche de plus en plus de sa maison, allant jusqu’à l'agresser, à l'image du drame vécu avec son mari défunt.

Men commence comme un film de maison hantée : emménagement dans une vaste maison néogothique, univers isolé, bruits étranges… Le film se teinte d’étrangetés nouvelles avec une présence masculine dont l’agressivité monte graduellement jusqu’à une incarnation traumatique violente et sanglante. Alex Garland assume les codes extrêmes du fantastique, sous une forme adulte, pour le plus grand plaisir des amateurs.

Venin

Si l’hémoglobine est omniprésente, les ambiances ne sont pas négligées. La mise en scène joue de cadres et lumières suggestives dont transpire la peur. De tous les plans, Jessie Buckley joue l’inquiétude, la peur et la violence rédemptrice inspirée par le traumatisme marial de Harper. Un rôle psychologique et très physique. Dans la continuité de Rosemary’s Baby (Roman Polanski, 1968), Men joue de l’ambiguïté entre la réalité des phénomènes paranormaux et l’équilibre mental de la victime.

Le ton du film renoue avec celui du fantastique des années 70, où le surnaturel recouvre un propos sociétal ou politique (L’Exorciste, La Malédiction). L’esthétique hantée évoque Le Cercle infernal ou La Maison des Damnés. Men est chargé : tous les malheurs du monde s’abattent sur Harper, isolée dans un milieu hostile, ce qui peut paraître trop. Mais, privilégiant une véritable mise en scène à l'accumulation d’effets, Men s'inscrit dans une tradition esthétique du cinéma fantastique, actualisée par un propos contemporain.

 

La fiche

Genre : Fantastique
Réalisateur : Alex Garland
Acteurs : Jessie Buckley, Rory Kinnear, Paapa Essiedu
Pays : Royaume-uni
Durée : 1h40
Sortie : 8 juin 2022
Distributeur : Metropolitan FilmExport

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