"Personal Shopper" : l’ode fantomatique d’Assayas à Kristen Stewart
Olivier Assayas s’est définitivement trouvé une nouvelle lubie. Une actrice fétiche. Kristen Stewart. Dans son dernier long métrage, présenté en mai dernier à Cannes, elle est de toutes les scènes. Hante, de son visage cafardeux, tous les plans. Effroyablement seule dans ce Paris froid, implacable et composite, des boutiques luxueuses du 8e arrondissement aux bars-PMU de Saint-Denis.
Mi-chemin
Elle s’appelle Maureen, elle est "Personal Shopper". Une "acheteuse particulière" qui s’occupe de la garde-robe d’une starlette. Un boulot qu’elle déteste mais qui lui sert à payer le petit appartement mansardé qu’elle loue en attendant un signe. Un geste venu de l’au-delà, de son frère jumeau foudroyé peu de temps auparavant, par une crise cardiaque. Et Olivier Assayas de nous livrer un film de genre à mi-chemin entre thriller fantastique, film d’horreur et drame de la solitude. Le problème, c’est qu’il nous ouvre toutes ces voies sans en exploiter une seule.Car mise à part la sensualité garçonne et mélancolique de sa comédienne, on a bien du mal à voir ce qu’Assayas a bien voulu nous montrer d’autres. Une déception considérable, tant sa précédente réalisation "Sils Maria", avec une Kristen Stewart déjà, en assistante personnelle de Juliette Binoche, comédienne confrontée au temps qui passe et au changement d’époque, nous avait séduit, par sa pureté, sa sincérité, sa sensibilité.
Cette fois, le "hou, hou, fais-moi peur" d’Assayas ne convainc pas. D’abord à cause de son souci d’insérer perpétuellement sa conception du contemporain dans son récit. Sa "Maison du Diable", collection Paris 2016, tourne alors parfois à l’insupportable. Comme lors de cette scène affligeante, où le spectateur est contraint d’assister pendant 20 bonnes minutes à des échanges de SMS, tous plus improbables les uns que les autres, entre Maureen et un destinataire "inconnu".
Transparente
Ensuite, du fait de la fébrilité de la mise en scène. Ce prétendu film d’horreur psychologique ressemble davantage à une sorte de "Paranormal Activity" version arty, qu’à un "Shining". Musique tapageuse et effrayante pour créer une tension qu’il ne parvient pas à installer à la seule force de son intrigue. Portes qui claquent et lumières qui s’allument aussi prévisibles que le lever du jour. Nous voilà réduit à contempler le spectacle accablant d’une Kristen Stewart s’adressant aux robinets ouverts ou aux lampadaires.Rarement une actrice si présente à l’écran, n’aura été si transparente. Elle n’est, il faut bien le reconnaître, pas vraiment aidée par le scénario et les dialogues d’une fadeur qui surprend de la part d'Assayas.
Reste l'apparition, sibylline et en toute fin de film d’un Anders Danielsen Lie infiniment touchant en seulement quelques phrases. L'acteur norvégien était lui aussi confronté au deuil, dans "Ce sentiment de l’été" sorti en février dernier. Il nous livrait alors, à rebours de Kristen Stewart, une prestation solaire et pleine de pudeur.
LA FICHE
Film d'Olivier Assayas - Avec Kristen Stewart, Lars Eidinger et Sigrid Bouaziz - Durée : 1h50 - Sortie : 14 décembre 2016
Synopsis : Maureen, une jeune américaine à Paris, s’occupe de la garde-robe d’une célébrité. C’est un travail qu’elle n’aime pas mais elle n’a pas trouvé mieux pour payer son séjour et attendre que se manifeste l’esprit de Lewis, son frère jumeau récemment disparu. Elle se met alors à recevoir sur son portable d’étranges messages anonymes…
L'héroïne de "Personal Shopper", est une actrice multifacettes. Autrefois mannequin, musicienne, bientôt réalisatrice, elle s'affiche aussi sans fards. Une attitude peu commune à Hollywwod.
Reportage de S. Gorny / G. Pinol / R. Torregrosa / P. Gueny / France 3 Côte d'Azur
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