Cet article date de plus de dix ans.

"Philomena" : Stephen Frears dirige une bouleversante Judi Dench

Stephen Frears ("Tamara Drew", "The Queen"…) met un peu d’eau dans son vin avec “Philomena”. Celui chez qui l’on était habitué à un brin de cynisme est carrément passé du côté de l’émotion en adaptant cette histoire vraie, cependant sans jamais laisser tomber son sens de l’humour : un des meilleurs films de ce début d’année.
Article rédigé par Jacky Bornet
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié
Temps de lecture : 4min
Judi Dench et Steve Coogan dans "Philomena" de Stephen Frears
 (Alex Bailey)

De Stephen Frears (Grande-Bretagne), avec : Judi Dench, Steve Coogan, Sophie Kennedy Clark - 1h38 - Sortie : 8 janvier 2014

Synopsis : Irlande, 1952. Philomena Lee, encore adolescente, tombe enceinte. Rejetée par sa famille, elle est envoyée au couvent de Roscrea. En compensation des soins prodigués par les religieuses avant et pendant la naissance, elle travaille à la blanchisserie, et n’est autorisée à voir son fils, Anthony, qu’une heure par jour. À l’âge de trois ans, il lui est arraché pour être adopté par des Américains. Pendant des années, Philomena essaiera de le retrouver. Quand, cinquante ans plus tard, elle rencontre Martin Sixmith, journaliste désabusé, elle lui raconte son histoire, et ce dernier la persuade de l’accompagner aux Etats-Unis à la recherche d’Anthony.

« Dématérnalisée »
C’est bien connu, il y a une tradition sociale dans le cinéma britannique et Stephen Frears n’y échappe pas, aux côtés d’un Ken Loach, d’un Mick Leigh ou récemment de Clio Bernard avec "Le géant égoïste". Il n’a en fait pas trop pris cette voie et "Philomena" s’avère à peu de choses près sa première incursion dans la filière. Il adapte dans ce sens l’ouvrage de Martin Sixmith sur cette femme privée de son enfant,  en quête de son devenir 50 ans après leur séparation.

Avec Judi Dench dans le rôle-titre, "Philomena", on a l’impression que Frears peut lâcher prise et laisser son film se faire tout seul. Elle est aux commandes et la réalisation semble en roue libre. C’est elle qui tient les rênes, de tous les plans, sauf pour raconter sa jeunesse, elle occupe l’écran par sa présence et ses dialogues, souvent impromptus – d’où l’humour du film. Femme privée de maternité, "dématérnalisée", par la morale catholique en 1952, placée dans un couvent qui l’aura privé de son fils, elle n'abandonnera pour autant jamais sa foi. Sa rencontre avec un mécréant (Steve Coogan), qui va rechercher pour elle et avec elle, son fils, entraîne plus d’une question, simples, mais concrètes et bien posées.

Steve Coogan, Judi Dench et Anna Maxwell Martin dans "Philomena" de Stephen Frears
 (Alex Bailey)

Sens du récit
L’histoire de « Philomena » est incroyable à plus d’un titre et Stephen Frears en tire toute la dimension romanesque. Il entretient à loisir l’évolution de son intrigue dès la rencontre entre son héroïne et son guide. Chaque étape est une épreuve où l’on se demande si la vieille dame va être à-même de la franchir, jusqu’aux dernières étapes pour connaître la vérité à propos de son fils. Là, les révélations, à son propos, n’en sont que mieux amenées par Frears qui dilate un suspense jusqu’aux dernières images.

L’on en est que plus pris par ce sens du récit qui nous tient en haleine jusqu’au bout, avec des rebondissements successifs que l’on penserait invraisemblables s’ils n’étaient avérés dans la vie réelle. Stephen Frears, metteur en scène sensible à plus d’un titre, s’est emparé de cette histoire à bras le corps et l’a transposée à l’écran avec sensibilité. Ce dont témoigne tout le jeu et l'implication de Judi Dench, avec un sens du récit, incluant ses résonnances profondes, sans en ignorer l’humour : émouvant.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.