"Promenade à Cracovie" : Roman Polanski revisite son enfance, marquée par la Shoah, dans un documentaire boycotté dans les salles
Réduite à deux salles, la sortie de Promenade à Cracovie, documentaire sur l'enfance de Roman Polanski sous l'occupation nazie, passe mal. Accusé de viol par plusieurs femmes, le réalisateur franco-polonais fait toujours l'objet d'un mandat d'arrêt international émis par les Etats-Unis depuis qu'il a fui le pays après avoir été poursuivi pour viol sur mineur.
Sur les écrans de L'Arlequin à Paris et de l'Omnia Cinéma à Rouen mercredi 5 juillet, Promenade à Cracovie a été boycotté par les directeurs de salles, craignant des troubles à l'ordre public. "Les exploitants sont frileux et pas très courageux", estime Sophie Dulac, propriétaire de l'Arlequin convaincue de "la qualité du film".
Amis d'enfance
Les reproches dénonçant les qualités visuelles de Promenade à Cracovie, qui se prêteraient plus à une diffusion à la télévision plutôt qu'en salles, sont hypocrites. Nombre de fictions françaises projetées au cinéma peuvent tout autant se sentir visées. De son côté, Polanski n'est pas à l'origine du film, et n'a pris à un quelconque moment le film en main. Par contre, les réalisateurs, Mateusz Kudla et Anna Kokoszka-Romer, lui ont proposé d'évoquer à Cracovie son enfance passée en Pologne, à l'occasion de sa venue dans le pays. Il a accepté à condition de le faire avec son ami Ryszard Horowitz, devenu une star de la photo, avec qui il y a vécu sa prime jeunesse.
Se croisant de loin en loin dans les capitales du monde qu'ils visitent pour leur travail, ils n'étaient jamais revenus ensemble à Cracovie depuis la Seconde Guerre mondiale. Mateusz Kudla et Anna Kokoszka-Romer ont effectué une minutieuse enquête avant de les réunir, pour retrouver les lieux de l'ancien ghetto où ils ont vécu, et dont ils s'échappaient pour des missions de ravitaillement dans la ville. Jusqu'au départ de Roman, placé chez deux familles successives à la campagne, pour sa sécurité.
Il a fait reconnaître ses ancêtres parmi les Justes
L'émotion dans la simplicité de ces retrouvailles entre amis et avec le passé traverse le film. Sur le site internet de Première, Sophie Dulac dénonce les propos de l'AFP faits au Film français, bible de la profession, avançant que le film aborde les déboires du réalisateur avec la justice, ce qui est totalement faux. Quelqu'un a-t-il vu le film dans la salle ?
Toujours est-il qu'à l'écran, Roman Polanski, 90 ans, est en pleine forme, avec sa démarche sautillante dans les rues de Cracovie et les chemins campagnards, accompagné de son ami Horowitz, bien engaillardi lui aussi. Émotion quand Polanski revoit la cuisine où il a retrouvé son père au sortir de la guerre, sa mère et sa grand-mère ayant été assassinées à la chambre à gaz dès leur descente du train à Auschwitz-Birkenau en 1943. Mateusz Kudla et Anna Kokoszka-Romer ont retrouvé le petit-fils des seconds protecteurs de Roman Polanski enfant. Le réalisateur a fait les démarches pour faire reconnaître ses ancêtres parmi les Justes qui ont aidé les Juifs face aux Nazis, ce qu'il a obtenu.
La fiche
Genre : Documentaire
Réalisateur : Mateusz Kudla et Anna Kokoszka-Romer
Acteurs : Roman Polanski et Ryszard Horowitz
Pays : France / Pologne
Distributeur : ARP Sélection
Durée : 1h15
Sortie : 5 juillet 2023
Synopsis : Ce documentaire suit Roman Polanski dans la ville où il a vécu enfant, en compagnie de son ami de toujours, le photographe Ryszard Horowitz, survivant de la Shoah, qu'il a rencontré dans le ghetto juif de Cracovie pendant la Seconde Guerre mondiale. Ensemble, ils arpentent les rues et confrontent leurs souvenirs…
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