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"Le Dernier jour d'Yitzhak Rabin" d'Amos Gitaï : quand l'espoir de paix tombe sous les balles

Entre le polar et le docudrama, Amos Gitaï nous livre un thriller politique efficace, véritable plaidoyer pro-Rabin, vingt ans après l'assassinat du Premier ministre israélien. Un film considérable, puissant mais parfois un peu théâtral.
Article rédigé par franceinfo
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Reportage France 3 : B. Mousset / J.C. Duclos / N. Aibar

"J'ai été soldat pendant 27 ans. J'ai combattu aussi longtemps qu'il n'y avait pas de chance pour la paix. Mais je crois qu'aujourd'hui, cette chance existe". Ces mots sont ceux d'Yitzhak Rabin, le 4 novembre 1995. Quelques instants après ce discours, le Premier ministre israélien sera assassiné par un étudiant juif religieux d'extrême droite, Ygal Amir, sur la place des Rois d'Israël à Tel-Aviv. Ce film nous aide à comprendre comment le pays et le monde ont perdu, à jamais peut-être à cet instant, une certaine idée de l'espérance.
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Rouvrir la plaie

20 ans après, Amos Gitaï, le réalisateur de "Kippour", s'attaque donc à une autre blessure de l'histoire israélienne, en rouvrant la plaie de l'assassinat de Rabin. L'homme de la signature des accords d'Oslo, qui établissaient l'Autorité nationale palestinienne et lui garantissaient un contrôle partiel sur la bande de Gaza et la Cisjordanie. Accords qui furent suivis d'une vague de protestation et de manifestations en Israël divisant la société en deux. Ceux qui voyaient en Rabin un héros de la cause de la paix et ceux qui le considéraient comme un traître bradant des territoires appartenant de droit à Israël.  
 
L'année suivante, le Premier ministre partagera le prix Nobel de la paix avec Yasser Arafat et Shimon Peres, alors ministre de la Défense. "Si Rabin n'avait pas été assassiné, la paix se serait peut-être installée", estime Shimon Peres, dans un entretien champ-contrechamp avec Yaël Abecassis, en ouverture du film. Car ce docu-fiction est surtout un hommage. Un plaidoyer pro-Rabin qui livre un nouvel éclairage sur cette soirée du 4 novembre.
Shimon Peres dans " le dernier jour d'Yitzhak Rabin"
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Une enquête dérisoire

Car Il y a bien eu une enquête d'État, assez dérisoire, qui s'est surtout concentrée sur les défaillances du système de sécurité. Gitaï s'efforce quant à lui de combler les lacunes d'une commission qui s'est bien gardée de faire un quelconque examen des consciences. Une commission qui ne s'est jamais inquiétée "des nombreuses forces qui avaient tenté de déstabiliser le Premier ministre pendant de longs mois". Ou des agissements du groupe d'extrémistes ultra-nationalistes dont faisait partie Ygal Amir.

"Une atmosphère de sédition"

Il va ainsi replacer ces évènements de novembre dans leur contexte politique et sociétal. "Dans cette atmosphère de sédition qui régnait", comme l'estime Peres. Le réalisateur va alors mêler à ces images de fiction et de reconstitution des débats, des archives pas simplement illustratives. Comblant les vides, elles montrent surtout la froideur et la déconnexion de la procédure par rapport à la violence du contexte.
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Une enquête de fond captivante, un peu bavarde et à l'image de "Tsili", fortement empruntée de théâtralité. Comme avec cette musique grondante et menaçante précédant la mise à feu de Rabin. Le tout sur des images saccadées mimant de façon un peu maladroite le véritable footage de l'évènement.
 
Amos Gitaï assume cette sur-théâtralisation et renvoie la société israélienne face à ses responsabilités. Il rappelle, à l'image d'un Netanyahu que l'on voit haranguer la foule avec une photo d'Yitzhak Rabin grimé en officier SS, comment certains responsables politiques se sont servis de la haine pour conquérir le pouvoir. 
Drame d'Amos Gitaï - Avec Ischac Hiskiya, Pini Mitelman et Tomer Sisley - Durée : 2h30. Sortie le 16 décembre.


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