"Or noir" : Annaud touche le pactole
Au début du siècle, la découverte du pétrole entraîne la rivalité entre deux émirs d’Arabie et l’ascension d’un jeune Prince dynamique qui va unir les tribus du royaume du désert.
Depuis son très bizarre, sinon calamiteux, « Sa majesté Minor » (2007), Jean-Jacques Annaud était absent des écrans. Il revient avec un film à la hauteur de sa réputation de réalisateur épique avec « Or noir », sur les débuts de l’exploitation pétrolière au Proche-Orient à l’aube du XXe siècle. Il est aidé par Tahar Rahim, qui fait une belle carrière depuis « Le Prophète », et Antonio Banderas, ainsi que Mark Strong (« Les Chemins de la liberté ») et Freida Pinto (« La Planète des singes : les origines »).
Lawrence
La comparaison avec « Lawrence d’Arabie » vient automatiquement à l’esprit : même époque, conflits tribaux, intervention occidentale… Le reflexe est toutefois trop simple. Le film de David Lean mettait en avant la prise en charge par un Occidental des problèmes logistiques proche-orientaux. Annaud traite de leur résolution par des autochtones chavirés par l’arrivée de ces mêmes gens, motivés par les pétrodollars substantiels. Empêchés d’arriver à leurs fins par les conflits locaux et une société, sinon une civilisation, dont ils n’ont rien à faire, Annaud ne traite pas d’eux, mais de leurs interlocuteurs.
Annaud ne traite pas des rapports entre Occidentaux et Arabes, mais des luttes internes de ces derniers, pris dans une concurrence ancestrale. Ainsi se trouvent-elles plutôt du côté de la résistance envers un progrès imposé et la fascination qu’il suscite. Une fascination clairement du côté de l’argent et du pouvoir qu’il procure, face au respect de la tradition et de codes de vies encestraux. Un sujet en fait toujours contemporain et qui motive le film.
Mille et une nuits
La confrontation s’effectue sur le mode romanesque de deux familles, deux royaumes, concurrentiels au cœur desquels se jouent un mariage, et la mort de fils dans chacun des partis. Un mode épique donc, image de marque d’Annaud, qui en joue parfaitement avec une mise en scène ad hoc. Par son sujet pétrolier, le film renvoie également à « There Will Be Blood », mais l’on aura compris qu’ils ne jouent pas dans la même cour.
Magnifiquement mis en images, avec ses nuits cristallines et ses ciels d’opale, « Or noir », impressionne par ses scènes de batailles, et ses décors des milles et une nuits. Le style colle résolument à une fresque, didactique avec une morale à la clé. Elle pèche toutefois sur les motivations du revirement d’attitude d’Auda (Tahar Rahim) au centre de tous les enjeux, mal explicitées, et dans l’interprétation de Banderas que l’on aurait aimé voir plus impliqué. Soulignons enfin la magnifique musique de James Horner (« Avatar », « Titanic », « Stalingrad »…) qui participe de l’épique, par sa texture classique aux couleurs orientales, en phase avec le sujet et son traitement.
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