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"Sauvage", film cru sur une tragédie gay

Premier film de Camille Vidal-Naquet, dont il signe également le scénario, "Sauvage" a valu à Félix Maritaud ("120 battements par minute") le Valois du meilleur interprète masculin au dernier festival du Film francophone d’Angoulême. Un rôle torturé, dans un long métrage dérangeant, par sa forme et son sens, autour d’un jeune adulte homosexuel, prostitué, drogué : bienvenue dans un monde de bruts.
Article rédigé par Jacky Bornet
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Félix Maritaud dans "Sauvage" de Camille Vidal-Naquet
 (Pyramide Distribution)

Pasolinien

A première vue, "Sauvage" dresse un portrait d’un désenchantement extrême. Celui d’une vie partant à vau-l’eau, sans espoir de retour. Léo a 22 ans, vit au jour le jour dans la rue, ou dort chez ses clients auxquels il vend son corps, fume du crack avec une indifférence confondante. Jusqu’à ce qu’il rencontre Ahd (Eric Bernard) qui se prostitue aussi, dont il devient amoureux pour son côté protecteur, mais qui le rejette. Léo, détaché de tout, surtout de lui-même, va suivre un parcours initiatique qui débouchera peut-être sur la fin du tunnel.
Camille Vidal-Naquet choisit une forme quasi documentaire, en suivant au plus près son personnage, sans jamais le flatter, et bousculant le spectateur. Interdit aux moins de 16 ans, le film joue d’une image frontale, crue, ne dissimulant jamais les actes, sans pour autant être complaisante ou pornographique. Cette sincérité, non provocatrice, mais sans tabou, rappelle Pier-Paolo Pasolini. Cette vie en déliquescence traduit une détresse psychologique qui se reflète dans des répercussions physiques que subit Léo.

En marge

Portrait d’une vie encore en formation, Félix Maritaud l’interprète à l’image de son personnage, en se donnant absolument dans une sorte de perdition assumée. Léo n’est jamais aussi sincère que quand il se rend à une consultation médicale, devant une femme médecin qui pourrait être le temps d’un aparté une mère de substitution. Peut-être la plus belle scène du film. Répondant à ses questions avec un détachement déconcertant, Léo ne voit pas pourquoi il arrêterait de vivre tel quel, comme s’il se laissait porter par un flux irrépressible, autodestructif et immuable.
Félix Maritaud dans "Sauvage" de Camille Vidal-Naquet
 (Pyramide Distribution)
Il butte pourtant contre Ahd qui, lui, vit avec détachement sa condition de prostitué assumé, comme seul moyen de subsistance, et non comme une condition existentielle. Le titre "Sauvage" qualifie Léo, en marge totale d’une société dans laquelle il n’a rien à faire, sans rancune, et dont il ne semble pas même avoir conscience. Camille Vidal-Naquet ne passe pas toutefois à côté d’une certaine répétitivité, dans les scènes de prostitution notamment, même si elles participent de la vie de Léo. Un film âpre, parfois éprouvant, mais avec aussi une leçon de vie ouverte sur une note d’espoir.
"Sauvage" : l'affiche
 (Pyramide Distribution)

LA FICHE

Genre : Drame
Réalisateur : Camille Vidal-Naquet  
Pays : France
Acteurs :  Félix Maritaud, Eric Bernard, Nicolas Dibla, Nicolas Dibla, Philippe Ohrel, Mehdi Boudina
Interdit aux moins 16 ans
Durée : 1h39
Sortie : 29 août 2018

Synopsis : Léo, 22 ans, se vend dans la rue pour un peu d’argent. Les hommes défilent. Lui reste là, en quête d’amour. Il ignore de quoi demain sera fait. Il s’élance dans les rues. Son cœur bat fort.

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