"Sous le vent des Marquises", François Damiens renonce à jouer Jacques Brel pour sauver la relation avec sa fille

"Sous le vent des Marquises" aborde avec pudeur une relation entre un acteur et sa fille, mise en écho avec l'histoire et les mots de Jacques Brel.
Article rédigé par Laurence Houot
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié
Temps de lecture : 5min
François Damiens dans le film "Sous le vent des Marquises" de Pierre Godeau, sortie le 31 janvier 2024. (PAN DISTRIBUTION)

Après une adaptation de l'album de Sempé Raoul Taburin, en 2019, avec Benoît Poelvoorde, Pierre Godeau met en scène dans un scénario original un autre acteur belge chouchou du cinéma français, François Damiens, dans le rôle d'un comédien bouleversé par sa mission d'incarner Jacques Brel à l'écran, et par ses soucis de santé. Sous le vent des Marquises, quatrième long-métrage très personnel du réalisateur de Juliette (2013) et d'Éperdument (2016) sort dans les salles le 31 janvier 2024.

Alain (François Damiens), un acteur belge renommé, joue le rôle de Jacques Brel dans un biopic consacré au chanteur. Mais il a du mal à se sentir à l'aise dans le rôle de cette icône de la chanson. Le tournage est tendu. Quand le médecin annonce à Alain que son cancer nécessite une opération, il choisit de ne pas se soigner et quitte de manière impromptue le tournage pour rejoindre Lou (Salomé Dewaels), sa fille, qu'il a toujours négligée, et qui vit sur une île bretonne avec sa mère.

Avec ce nouveau film, Pierre Godeau aborde la question de la paternité et de la filiation, dans un contexte de célébrité. Alain est un acteur connu, il a consacré toute sa vie à son art, à son métier, et il a du mal à comprendre sa fille, qui vit sur une île, isolée du monde, avec pour seule ambition de reprendre l'exploitation ostréicole de son beau-père tout en aidant sa mère à gérer les chambres d'hôte de la maison familiale.

La jeune femme prend mal le retour intempestif d'un père jusqu'ici absent des radars. Elle s'est construite sans lui, et l'accueille avec froideur. Ce sont deux mondes aux antipodes qui s'affrontent et la connexion entre le père et la fille a bien du mal à opérer.

Mise en abyme

C'est finalement en lisant le scénario du film que son père a abandonné, et par les mots de Jacques Brel, que la jeune femme se rapproche peu à peu de son père. En se projetant dans le récit des dernières années de la vie du chanteur, quand il avait tout plaqué pour partir faire le tour du monde en voilier avec sa fille, Lou projette une relation idéalisée avec son père…

Dans un jeu de mise en scène et de mise en abyme, qui navigue entre les deux personnages et entre deux récits qui se font écho, le réalisateur nous raconte avec pudeur l'histoire d'une réconciliation et, d'une certaine manière, celle de la naissance, tardive, d'un père.

François Damiens et Salomé Dewaels dans le film "Sous le vent des Marquises" de Pierre Godeau, sortie le 31 janvier 2024. (PAN DISTRIBUTION)

D'abord un frein, le cinéma, au cœur du film, se révèle finalement être un point de rencontre entre le père et la fille, et pour elle une fenêtre ouverte sur d'autres possibles. Un scénario inspiré par l'histoire personnelle du réalisateur, Pierre Godeau, lui-même fils de producteur et réalisateur de cinéma.

Le film, qui joue en permanence le balancement entre réalité et fiction, entre rêverie et naturalisme, est composé en grande partie de scènes dialoguées, où les mots, ceux de Brel, extraits des archives ou de scènes du film en préparation, et ceux des personnages, s'entremêlent, se cognent, se chevauchent, se répètent, se répondent entre les deux histoires, entre les deux temporalités, faisant avancer l'intrigue, et se rapprocher les deux protagonistes.

Salomé Dewaels dans le film "Sous le vent des Marquises" de Pierre Godeau, sortie le 31 janvier 2024. (PAN DISTRIBUTION)

Le film apparaît à cet égard comme un hymne au dialogue, déployé comme une machine à rattraper le temps. On ne quitte quasiment jamais à l'image les deux acteurs, François Damiens, toujours très juste pour faire jaillir l'humanité là où on ne l'attend pas, et la jeune comédienne belge Salomé Dewaels, à la présence magnétique.

Réflexion sur la filiation, ce film interroge aussi à travers le destin de Brel, et celui plus contemporain d'Alain, sur la célébrité, et le rapport à la vie intime, familiale, de ceux qui sont projetés sous les feux de la rampe et adulés par les fans. Le film prend son temps pour nous conduire doucement vers une issue imprégnée de joie et de mélancolie mêlées, qui nous cueille, même si elle est attendue.

Affiche du film "Sous le vent des Marquises" de Pierre Godeau, sortie le 31 janvier 2024. (PAN DISTRIBUTION)

La fiche

Genre : Comédie dramatique
Réalisateur : Pierre Godeau
Acteurs : François Damiens, Salomé Dewaels, Roman Kolinka
Pays : France
Durée :
1h31
Sortie :
31 janvier 2024
Distributeur :
Pan Distribution
Synopsis : Quand Alain doit jouer Brel, son destin se mélange à celui de l’artiste. Cette rencontre va le rapprocher de sa fille et bouleverser sa vie.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.