"Stoker" : le réalisateur de "Old Boy" signe un thriller sophistiqué flamboyant
De Park Chan-wook (Etats-Unis/Grande-Bretagne), avec : Mia Wasikowska , Matthew Goode, Nicole Kidman, David Alford - 1h40 - Sortie : 1er mai
Synopsis : Après la mort de son père dans un étrange accident de voiture, India, une adolescente, voit un oncle dont elle ignorait l’existence, venir s’installer avec elle et sa mère. Rapidement, la jeune fille se met à soupçonner l’homme d’avoir d’autres motivations que celle de les aider. La méfiance s’installe, mais l’attirance aussi…
Sous influences
Le titre, « Stoker » renvoie d’emblée à l’auteur de « Dracula », Bram Stoker. Le précédent film de Park Chan-Wook était une histoire de vampire et le personnage central de son nouvel opus fascine autant qu’il rebute, comme le conte vampire de l’écrivain irlandais. Si le clin d’œil est indéniable, les personnages - tous Américains bon teint dans la plus pure tradition WASP -, la teneur de l’intrigue et son traitement renvoient autant à Hitchcock qu’à De Palma, les deux étant de cheville.
Comme ces deux grands noms du suspense, le Coréen est adepte de mises en scène sophistiquées tant dans les cadrages que les harmonies colorées, les décors ou les costumes et plus largement le physique de ses acteurs. Ainsi la rousse Nicole Kidman voit la flamboyance de sa chevelure glorifiée à l’image comme la blondeur d’une Kim Novak dans « Sueurs froides » d’Hitchcock. Mais l’hygiénique propriété où se déroule l’action, ainsi que la construction feutrée de la première partie pour s’accélérer dans la seconde, renvoient tout autant au maître.
Elégance
Les trois protagonistes de « Stoker » ont tous leur part d’ombre, pour reprendre une formule désormais consacrée. Evie (Nicole Kidman), abattue par la perte de son mari, semble bien vite tomber sous le charme de son frère, l’oncle Charlie (Mattew Goode). Pivot de l’intrigue, il est bien plus complexe qu’il n’y parait au prime abord. Enfin, la jeune India (Mia Waskowska), adolescente perturbée par la perte du père, semble habitée un monde secret et passe de la sympathie pour son oncle à son antipathie extrême, à l’image d’une schizophrène.
Avec ce thriller autant psychologique que meurtrier, Park Chan-Wook en profite pour styliser avec la plus grande élégance sa mise en scène. Avec lui, le qualificatif d’exercice de style perd toute dimension péjorative, ne lâchant pas au profit de l’image – esthétique sans être esthétisante -, la conduite d’un script à la progression minutée jusqu’à une révélation bien sentie. Le Coréen n’a donc pas perdu son âme en tournant aux Etats-Unis. Il semble retourner les influences occidentales qui nourrissaient ses films coréens, en alimentant de coréen le cinéma d’Hollywood. Un juste équilibre et retour des choses.
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