"Swandown" : une Odyssée de l'inutile ?
De Andrew Kötting (Grande-Bretagne), avec : Andrew Kötting, Iain Sinclair, Stewart Lee - 1h34 - Sortie 4 décembre 2013
Synopsis : Swandown relate l’équipée humoristique de deux Anglais parcourant pendant 4 semaines plus de 240 km sur un pédalo en forme de cygne, de Hasting (sud de l'Angleterre) à Hackney, le site des Jeux olympiques 2012 de Londres. Le voyage commence sur la Manche, puis entre dans les terres par les rivières et les canaux, jusqu'à la Tamise En route, ils font la connaissance de riverains du canal et prêtent une oreille attentive aux échos ambiants de la culture historique, littéraire et politique britannique.
Si Andrew Köning a choisi comme point de chute le site des J. O. de Londres, ce n’est pas tant pour dénoncer une manifestation qu’il avoue ne guère apprécier, mais pour opposer ce qu’elle représente comme consensus international, à une alternative. Pour ce faire « Swandon » se fait le chantre de la pensée de Ian Sinclair, héritier de William Blake, William Burroughs, Jack Kerouac, ou Guy Debord. Il est l’initiateur de le psychogéographie, dérivée de l’international situationniste, qui consiste à relier les lieux avec la psyché de leurs habitants.
Cette discipline est sans doute le meilleur moyen d’approcher « Swandown » qui reprend celle des poètes marcheurs. Bucoliques, en traversant la campagne verdoyante du Sussex et du Kent, Köning et Sinclair croisent des pêcheurs, des promeneurs, des marins d’eau douce et même une Ophélie qui recréé in vivo le célèbre tableau de Millais. Ils embarquent des poètes du cru à bord, scandent des pages de Blake, Becket, Ginsberg…, des voix off évoquent l’Histoire, tout comme des images en noir et blanc, les vues d’un château construit sous Richard II, et le passage sous des ponts médiévaux.
Dadaïste
Au-delà de toutes ces références, en quête d’identité, « Swandown » n’est pas moins humoristique. Köning et Sinclair revendiquent la figure du pédalo en forme de cygne comme « ridicule ». Le réalisateur réclame tout autant la performance physique de l’exploit et d’avoir porté pendant un mois le même costume, même s’il s’est retrouvé plus d’une fois dans l’eau jusqu’aux genoux, voire jusuqu’au cou.
Cet imbroglio de références littéraires, historiques, ethnologiques sur fond d’absurdité, est assumé comme une « geste » dadaïste. Le montage n’est pas sans rappeler le cadavre exquis ou le « cut-up » de William Burroughs, consistant à assembler des mots, des phrases, sans liens, au hasard, non moins évocateurs. L’ensemble n’en reste pas moins cohérents dans sa démarche ; beau, mais exigeant, en s’adaptant à une temporalité et une narration peu commune. La fin est plus mélancolique. Sinclair a quitté le « navire », les paysages sont devenus industriels et l’eau encombrée de détritus, polluée. La Tamise est devenue interdite d’accès autour d’Hackney, où habite Ian Sinclair. Prévenant l’incident, exclu de chez lui, il part à Boston. Il laisse Köning seul boucler la boucle, face à un constat qui, hormis les intentions premières, n’en reste pas moins politique.
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