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"True Mothers", de la réalisatrice japonaise Naomi Kawase : un double regard sur l'adoption

Avec ce nouveau film, la réalisatrice japonaise suit pas à pas l'histoire d'une adoption, à travers deux destins : celui d'une très jeune mère contrainte d'abandonner son enfant, et celui du couple stérile qui va l'adopter. 

Article rédigé par Laurence Houot
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié
Temps de lecture : 4min
Affiche de "True Mothers", de Naomi Kawase, juin 2021 (haut et Court)

La réalisatrice japonaise Naomi Kawase (Voyage à Yoshino, Les Délices de Tokyo) revient avec True Mothers, un film très personnel, qui évoque les deux chemins de vie qui conduisent à l'adoption d'un enfant. Adapté d'un roman à succès au Japon, True Mothers est en salles à partir du 28 juillet 2021.

Satoko (Hiromi Nagasaku) et Kiyokazu (Atara Lura) vivent dans un grand appartement lumineux, dans un immeuble très haut dominant la Baie de Tokyo, dans un quartier de la ville en construction. Ils s'aiment fort et élèvent avec beaucoup d'amour et d'attention leur fils Asato, âgé de six ans. Un incident avec un camarade de classe d'Asato et un coup de fil inattendu replongent Satoko dans le passé.

Quelques années plus tôt, ne pouvant pas avoir d'enfants, ils ont adopté Asato dans la maison "Baby Baton". Cette maison des "filles-mères", plantée dans les paysages paisibles de l'île d'Hiroshima, accueille et accompagne des femmes enceintes, souvent de très jeunes filles, en incapacité d'élever leur enfant ou dont les parents n'acceptent pas la grossesse. C'est le cas d'Hikari (Aju Makita), 14 ans, la mère biologique d'Asato…

Deux "mères"

Presque comme un documentaire, ce film évoque les chemins tortueux de l'adoption. L'originalité du film est de s'intéresser à parts égales aux deux chemins de vie qui aboutissent à l'adoption d'un enfant. D'un côté, un couple aimant découvrant sa stérilité, et les sentiments et questionnements qui accompagnent cette révélation, puis les galères de la procréation assistée à laquelle ils finissent par renoncer, et enfin l'idée qui germe peu à peu d'adopter un enfant, jusqu'à la concrétisation de ce rêve.  

Arata Iura et Hiromi Nagasaku dans le film 'True Mothers', de Naomi Kawase, juin 2021 (Haut et Court)

De l'autre côté, Hikari, une jeune fille rangée qui tombe amoureuse d'un camarade de classe. Le bonheur, la joie des premiers émois amoureux, et un tout premier rapport sexuel qui suffit à mettre Hikari enceinte. Puis la colère des familles, le choix des parents de garder tout cela secret, d'envoyer Hikari accoucher loin de chez eux, et de l'obliger à abandonner son enfant… Deux longs chemins douloureux, qui aboutissent d'un côté au bonheur de Satoko et Kiyokazu, avec l'adoption d'Asato, et de l'autre à la mélancolie, persistante, d'Hikari.

Aju Makita dans "True Mothers", de Naomi Kawase, juin 2021 (Haut et Court)

Entre fiction et documentaire

True Mothers, dans la sélection officielle de Cannes en 2020, est un film sensible servi par une équipe de comédiens magnifiques. Le film est long, comme l'est le chemin d'une adoption. La caméra capte ce temps qui passe, et les émotions des protagonistes, des deux côtés du miroir.

La réalisatrice scande le temps et évoque les sentiments de ses personnages avec de très beaux plans de la nature, des saisons, de la mer, qui contrastent avec la verticalité de la ville, ses grues, son vacarme. Les décors nous donnent également des indications sur les réalités culturelles et sociales du Japon, pouvant expliquer certains comportements, comme par exemple l'appartement de la famille d'Hikari, -tatamis et shojis- signes d'une famille restée attachée aux traditions.

Une autre caméra, une autre oreille, discrètement présente à l'intérieur du film, capte les visages, les silences, les mains qui se joignent, les larmes qui perlent, et recueille les témoignages à la manière d'un documentaire, légèrement en retrait, à l'écoute.

"Je me place comme la réalisatrice de ce film de fiction, mais également comme celle du documentaire à l’intérieur de ce film."

Naomi Kawase

réalisatrice

Qu'est-ce qu'une "vraie mère" ? Qu'est-ce qu'une bonne mère ? Pourquoi veut-on être parents ? Que ressentent les mères contraintes d'abandonner leur bébé ? Au-delà de la question de l'adoption, c'est celle de la maternité, du désir de maternité et de parentalité, qui est évoquée dans ce nouveau film de Naomi Kawase, elle-même abandonnée puis adoptée. Le sujet est traité avec nuances et tendresse, le scénario offrant au bout du compte à chacun, comme une réparation, sa bonne place. Bouleversant. 

Affiche de "True Mothers", de Naomi Kawase, juin 2021 (haut et Court)

La fiche

Genre : drame
Réalisatrice : Naomi Kawase
Avec : Arata Iura, Hiromi Nagasaku, Aju Makita
Pays : Japon
Durée : 2H20
Sortie : 28 juillet 2021
Distributeur : Haut et Court


Synopsis : Satoko et son mari sont liés pour toujours à Hikari, la jeune fille de 14 ans qui a donné naissance à Asato, leur fils adoptif. Aujourd’hui, Asato a 6 ans et la famille vit heureuse à Tokyo. Mais Hikari souhaite reprendre le contact avec la famille, elle va alors provoquer une rencontre…

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