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"Vers la lumière", film humaniste et poétique de Naomi Kawase

La cinéaste japonaise Naomi Kawase, réalisatrice de "La forêt de Mogari", de "Still the Water" et des "Délices de Tokyo", était à Cannes pour la cinquième fois en compétition l’an dernier, avec un poignant "Vers la lumière", ascèse irrésistible vers le soleil. Une fresque humaniste et poétique profondément enracinée dans la nature nippone. Avec Ayame Misake et Masatoshi Nagase.
Article rédigé par franceinfo - Lorenzo Ciavarini Azzi
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 3min
"Vers la lumière" : photo du film avec Masatoshi Nagase et Ayame Misaki
 (Haut et Court)

Comment rendre compte en quelques mots d’une émotion artistique ?

Lorsque Misako se promène dans la rue, dans sa ville ou à la campagne quand elle rend visite à sa mère, la jeune japonaise ne peut s’empêcher de tout observer autour d’elle et de le décrire mentalement avec précision : des enfants se disputent dans la rue, un grand bus traverse le carrefour, un vent chaud se dirige vers l’ouest… Ce n’est pas un toc, ni l’expression d’une forme d’autisme. Simplement de la déformation professionnelle : Misako est audio-descriptrice de films à l’attention des malvoyants.
Avec son dernier film "Vers la lumière", la réalisatrice Naomi Kawase nous invite à découvrir cet univers étonnant et mystérieux, où tout est question de perception et de capacité à traduire des situations et des sentiments en paroles. Ce n’est pas rien. Ce qui nous paraissait éminemment sectoriel jusqu’ici, Naomi Kawase nous le rend universel. La responsable de l’agence qui emploie Misako ne cesse de le rappeler : les non-voyants, on les aide, c’est une façon pour eux de se connecter. Et pour Misako, ce métier, c’est sa vie.

Pourtant, le travail qu’elle est en train de réaliser sur un film ne fait pas l’unanimité auprès des conseillers malvoyants appelés à intervenir auprès de son employeur. L’un d’eux, Masaye Nakamori, est plus virulent que les autres. Faut-il mettre autant de poésie dans les commentaires ? Ne devrait-on pas se limiter à une simple description ? Le débat dépasse l’outil technique, il en devient philosophique : comment rendre compte en quelques mots, d’une intention artistique, d’une émotion ? Peut-on intervenir dans l’art ? Pour Nakamori, la jeune Misako est "intrusive".
Masatoshi Nagase et Ayame Misaki dans "Vers la lumière" de Naomi Kawase
 (Concorde Filmverleih GmbH)

Quête de lumière

Entre ces deux-là, une histoire se noue. Entre l’homme d’âge moyen, handicapé, grave et bougon, et la très jeune professionnelle, fière mais bienveillante et d’une beauté renversante… Ce qui les unit, c’est la lumière, l’autre grand sujet du film – et leitmotiv dans l’œuvre de Kawase. Celle dont sera privé désormais Nakamori, photographe reconnu qui perd progressivement la vue. Celle que recherche également Misako, lumière apaisante, souvenir d’une enfance heureuse avec ses parents. Naomi Kawase tisse avec une précision d’orfèvre les contours d’une relation lente à venir mais inévitable, jusqu’à rendre éminemment érotique la caresse du visage de la jeune femme par l’homme non-voyant.

"Vers la lumière" est un film d’ascèse vers la source lumineuse première, jamais aussi bouleversante que quand le soleil est couchant. C’est également une exaltation de la nature – fil rouge du cinéma de la Japonaise, attentive au détail du sifflement du vent, à l’épaississement de l’air, à la couleur des feuilles ou à la courbe des arbres emportés par la brise.
"Vers la lumière" : affiche

LA FICHE

Genre : Drame
Réalisateur : Naomi Kawase
Pays : Japon
Acteurs : Masatoshi Nagase, Ayame Misaki, Tatsua Fuji, Mantarô Koichi
Durée : 1h41

Synopsis : Misako aime décrire les objets, les sentiments et le monde qui l’entoure. Son métier d’audiodescriptrice de films, c’est toute sa vie. Lors d’une projection, elle rencontre un célèbre photographe dont la vue se détériore irrémédiablement. Naissent alors des sentiments forts entre un homme qui perd la lumière et une femme qui la poursuit.

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