Un bout de RDA recréé à Berlin pour une projection de "Good Bye Lenin"
Prière de laisser vêtements dernier-cri, smartphones, popcorn et bouteille de soda capitalistes au vestiaire. Merci de présenter ses papiers à l'officier de la Stasi posté à l'entrée. La séance-voyage dans le temps va bientôt commencer.
Cet évènement de "cinéma vivant", mêlant projection classique et reconstitution est organisé cette semaine à Berlin autour du film de Wolfgang Becker, "Good bye Lenin", une comédie à succès sur la vie en ex-Allemagne de l'Est (RDA), sortie en 2003 et devenue un véritable phénomène de société en Allemagne.
L'idée est de venir revoir le film culte et d'en profiter, avant la séance, pour se replonger dans l'ambiance papier-peint fleuri, gastronomie frugale et regards conspirateurs de la vie en RDA.
Une réplique de poste-frontière
Dans le dédale de pièces d'un ancien bâtiment de la poste allemande, les organisateurs font jouer aux comédiens et au public plusieurs scènes typiques de la vie quotidienne sous le régime communiste.Après avoir présenté ses papiers -donc sa place de cinéma- à un officier en uniforme posté devant une réplique de poste-frontière orné de barbelés, les spectateurs déambulent dans des couloirs défraîchis où s'alignent les symboles à la gloire du parti communiste et de ses dirigeants.
Ici et là, des comédiens vêtus du célèbre uniforme gris de la Stasi -la police politique de l'ex-RDA- observent suspicieusement en se parlant à l'oreille. Au détour d'une pièce, une secrétaire est absorbée sur sa machine à écrire où elle tape un énième rapport.
Dans la pièce d'à côté, une salle de bain, un jeune homme en sous-vêtements fait sa toilette avec les quelques produits de beauté alors disponibles et qui ont logiquement marqué plusieurs générations d'"Ossies", les anciens Allemands de l'Est.
Soupes en boîte et gros cornichons
Dans le restaurant ouvert aux spectateurs, le menu propose les grands classiques de la "gastronomie est-allemande" : deux sortes de soupes en boîte, (Soljanka ou Goulash), des gros cornichons en bocaux (Gherkin) que l'on peut faire passer avec quelques gorgées de "Club Cola", l'imitation validée par le parti de son cousin américain.Et puis, dans cette petite RDA éphémère, il y a bien entendu des règles à respecter, strictement. Le public est prié de venir déguisé à la mode de l'époque. Les photos sont interdites.
L'ancienne star du groupe de rock est-allemand Die Puhdys, Peter Meyer, invité pour la première du projet estime que, de "l'accueil au Club Cola", tout est crédible.
"C'est toujours génial d'entendre des gens dire que quand ils vont voir un film au cinéma, ils ont l'impression d'être transportés dans un autre monde", explique à l'AFP l'organisateur de l'événement Christopher Zwickler. "On s'est dit qu'il fallait aller encore plus loin et avec ce cinéma vivant on réussit à transformer les spectateurs en acteurs... on leur fait vivre toutes ces expériences, toujours en lien avec le film", dit-il.
Un véritable business de l'"ostalgie"
A sa sortie en 2003, "Good Bye Lenin" a attiré 6,2 millions de spectateurs et connu un succès international. L'histoire a séduit les Allemands, de l'Est comme de l'Ouest : terrassée par un infarctus qui l'a plongée dans le coma, une mère de famille (Katrin Sass), citoyenne modèle de la RDA communiste, se réveille huit mois plus tard, ignorant tout de la chute du Mur.Pour lui épargner un choc fatal, Alex (Daniel Brühl), son fils de 21 ans, ressuscite le décor familier et l'atmosphère de la RDA dans leur petit appartement d'une HLM berlinoise.
Depuis la sortie du film s'est développé en Allemagne un véritable business de l'"ostalgie", la nostalgie des Allemands pour tout le décorum de la vie à l'Est : boutiques spécialisées, tours en Trabant, la mythique voiture est-allemande, musées, hôtels et même parc de loisirs.
Florian Balke, un trentenaire né en Allemagne de l'Est, est venu pour la première de cet évènement avec sa plus belle veste de sport en nylon style années 1980. Mais pour lui, l'"ostalgie" s'arrête là. En ce qui me concerne, je suis bien content que le Mur ne soit plus là et je n'aurais aucune envie de vivre comme on vivait alors", reconnaît le jeune homme.
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