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Une somptueuse réédition de "La Belle et la Bête" en DVD/Blu-Ray
A l'occasion du cinquantenaire de la mort de Jean Cocteau et l'exposition, trop courte, que lui a consacré la Cinémathèque, une version remasterisée de "La Belle et la Bête", avec Jean Marais et Josette Day, sorti en 1946, est disponible, enrichie de nombreux et passionnants suppléments qui donnent un regard nouveau sur une des œuvres majeures du poète, sinon du cinéma français d'après-guerre.
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L’histoire : Un père vit désargenté aux côtés de ses trois filles et de son fils que visite souvent le tempétueux Avenant. Il part en voyage d’affaires. Demandant à Belle ce qu’il peut lui rapporter de ce périple, celle-ci lui répond une rose. Perdu dans une sombre forêt, il découvre un somptueux château plein de mystères et y cueille une rose. Surgit alors un être monstrueux, propriétaire des lieux, qui s'en offense et lui offre un ultimatum pour sauvegarder sa vie : qu’une de ses filles le rejoigne en son château. De retour à la ferme, le père explique son aventure. Afin de sauver son père, la Belle s’enfuit de la demeure familiale pour partir vivre au château de la Bête…
Le film : Ce célèbre conte puise ses origines dans l’Antiquité et connut plusieurs versions dont la plus célèbre est celle de Madame Leprince de Beaumont, datée de 1757, à l’origine des nombreuses adaptations qui s’en suivirent. Avant celle de Cocteau, une version muette est datée de 1899, mais c’est celle de 1946 qui demeure la référence, dont le succès entraîna de nombreuses autres, au cinéma, mais aussi en opéra (dont un signé Philip Glass), comédies musicales, ballets, pièces de théâtre, téléfilms et séries. Deux nouvelles versions filmiques sont attendues. L’une signée par Christopher Gans, avec Vincent Cassel et Léa Seydoux, l’autre par Guillermo del Toro avec Emma Watson.
Le film de Cocteau se distingue par la beauté de ses images oniriques, nées de la collaboration entre Jean Cocteau, son directeur de la photographie Henri Alekan et son décorateur et costumier Christian Bérard. Sans oublier le maquilleur, trop peu souvent cité, Hagop Arakelian, pourtant à l’origine d’un des plus beaux maquillages spéciaux de l’histoire du cinéma, qui demandait quatre heures de préparation à Jean Marais pour devenir la Bête. Citons également Pierre Cardin, Marcel Escofier et Antonio Castillo qui exécutèrent les somptueux costumes du film, mais également Georges Auric, compositeur de la musique envoûtante du film aux chœurs éthérés, et fidèle parmi les fidèles à Jean Cocteau.
La magnifique restauration rend enfin justice à la splendide photographie du film, désirée par Cocteau et exécuté par Henri Alekan. Le poète, très inspiré par les gravures de Gustave Doré et les peintures de Vermeer, demandait constamment à son opérateur toujours plus de contraste, des noirs profonds sur lesquels des blancs éclatants trancheraient sur l’espace sombre ou étincèleraient tels de purs diamants.
Les copies du film vieillissant, une pâle grisaille avait pris le dessus, et même la restauration de 1995 n’était parvenue à restituer la vision du cinéaste. La technologie du numérique permet aujourd’hui de telles merveilles, sans pourtant dénaturer l’origine analogique du support original, la pellicule argentique, dont le grain est artificiellement restituer.
Conte métaphorique sur les apparences trompeuses, l’illusion du réel et de la vanité, « La Belle et la Bête » de Cocteau est tout le long traversé de fulgurances et de scènes d’anthologie : les candélabres tenus par des bras et des mains humaines émergeant des murs des corridors, la promenade de la Belle et la Bête sur les remparts du château, où s’alignent des sculptures cynégétiques, l’errance de Belle dans les couloirs où flottent des rideaux immaculés, les statues vivantes aux yeux perçants qui hantent la forteresse magique, l'apparition soudaine de la Bête fumante de rage… Les moments de comédie sont par ailleurs savoureux, dans la ferme familiale, avec les deux acariâtres et vaniteuses sœurs de Belles, ainsi que les deux frères ennemis qu’interprètent Jean Marais et Michel Auclair. Sans oublier la très belle scène des draps séchant sous le soleil de la Touraine. Le phrasé des comédiens, totalement irréaliste, avec des dialogues alternant trivialité et éloquence, participe de « l’irréalité réaliste » du film, chère à Cocteau.
« La Belle et la Bête » demeure un inépuisable réservoir à rêves, indispensable à toute vidéothèque digne de ce nom. Bonus : Edité en coffret prestige, tant en DVD qu’en Blu-Ray, « La Belle et la Bête » est accompagné de suppléments non moins superbes. Le premier « Des rêves de Cocteau au numérique » retrace la fascination du poète pour le conte de Madame Leprince de Beaumont depuis son enfance, jusqu’à la dernière restauration du film avec les dernières technologies, en passant par les influences picturales du cinéaste. « L’Aventure de la Belle et la Bête » retrace le tournage épique du film, plein d’aléas, d’autant plus facile à restituer que Cocteau tint un journal de bord tout le long du façonnage de son chef-d’œuvre. « Christian Bérard et Jean Cocteau, deux magiciens du spectacle » revient sur la complicité des deux créateurs et leur alchimie au travail pour accoucher d’un des plus beaux films de l’histoire du cinéma.
Enfin, un très joli livret richement illustré, restitue des pages du dossier de presse de l’époque, et développe le travail de restauration du film tant pour l’image que le son.
La Belle et la Bête
De Jean Cocteau (France/Luxembourg), avec : Jean Marais, Josette Day, Marcel André, Michel Auclair, Mila Parély, Nane Germon – 1h36 – Sortie originelle : 29 octobre 1946
Editeur : M6 Vidéo
DVD : 19,99 euros
Blu-Ray : 24,99 euros
Conte métaphorique sur les apparences trompeuses, l’illusion du réel et de la vanité, « La Belle et la Bête » de Cocteau est tout le long traversé de fulgurances et de scènes d’anthologie : les candélabres tenus par des bras et des mains humaines émergeant des murs des corridors, la promenade de la Belle et la Bête sur les remparts du château, où s’alignent des sculptures cynégétiques, l’errance de Belle dans les couloirs où flottent des rideaux immaculés, les statues vivantes aux yeux perçants qui hantent la forteresse magique, l'apparition soudaine de la Bête fumante de rage… Les moments de comédie sont par ailleurs savoureux, dans la ferme familiale, avec les deux acariâtres et vaniteuses sœurs de Belles, ainsi que les deux frères ennemis qu’interprètent Jean Marais et Michel Auclair. Sans oublier la très belle scène des draps séchant sous le soleil de la Touraine. Le phrasé des comédiens, totalement irréaliste, avec des dialogues alternant trivialité et éloquence, participe de « l’irréalité réaliste » du film, chère à Cocteau.
« La Belle et la Bête » demeure un inépuisable réservoir à rêves, indispensable à toute vidéothèque digne de ce nom. Bonus : Edité en coffret prestige, tant en DVD qu’en Blu-Ray, « La Belle et la Bête » est accompagné de suppléments non moins superbes. Le premier « Des rêves de Cocteau au numérique » retrace la fascination du poète pour le conte de Madame Leprince de Beaumont depuis son enfance, jusqu’à la dernière restauration du film avec les dernières technologies, en passant par les influences picturales du cinéaste. « L’Aventure de la Belle et la Bête » retrace le tournage épique du film, plein d’aléas, d’autant plus facile à restituer que Cocteau tint un journal de bord tout le long du façonnage de son chef-d’œuvre. « Christian Bérard et Jean Cocteau, deux magiciens du spectacle » revient sur la complicité des deux créateurs et leur alchimie au travail pour accoucher d’un des plus beaux films de l’histoire du cinéma.
Enfin, un très joli livret richement illustré, restitue des pages du dossier de presse de l’époque, et développe le travail de restauration du film tant pour l’image que le son.
La Belle et la Bête
De Jean Cocteau (France/Luxembourg), avec : Jean Marais, Josette Day, Marcel André, Michel Auclair, Mila Parély, Nane Germon – 1h36 – Sortie originelle : 29 octobre 1946
Editeur : M6 Vidéo
DVD : 19,99 euros
Blu-Ray : 24,99 euros
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