"Voir le jour" : Sandrine Bonnaire, auxiliaire sous pression d'une maternité à flux tendu
L'actrice de 53 ans incarne une chanteuse reconvertie dans le milieu hospitalier dans le nouveau film de Marion Laine. Porté par un casting convaincant, le film ne parvient cependant pas à se démarquer des codes de séries télévisées.
Réalisatrice discrète du cinéma hexagonal (son dernier film, À coeur ouvert, date de 2012), Marion Laine redirige Sandrine Bonnaire dans Voir le jour, son troisième long-métrage, après Un coeur simple en 2008. L'actrice y incarne Jeanne, une ancienne rockeuse ayant posé guitares et perruques pour enfiler la blouse d'une auxiliaire de maternité. Les questionnements intimes sont au centre du film, mais aussi cette vie d'hôpital malmenée par des conditions de travail qui s'éffritent. En ressort un film aimable, mais un peu trop justement, la narration collant de près les codes de certaines séries télévisées.
Reportage France 3 : E. Cornet, S. Gorny, N. Berthier, Y. Moine, N. Cargnino, L. Michel
Une toile de fond politique
En immersion, on rentre dans cette maternité en sous-effectif comme on pourrait rentrer dans un commissariat ou une école, le flux tendu de cette institution est au coeur du film dès le début, entre velléités de grèves et résignation de l'équipe. Le manque de moyens surtout, la surexploitation des employées et les combines qui vont avec. Le sous-texte politique du tableau est manifeste, c'est la partie la plus réussie aussi, le film sortant en salle dans un contexte de crise hospitalière qui s'éternise depuis des mois.
Mais les conversations comme la dynamique de groupe ont des airs de déjà-vu, comme la trame très feel-good de l'ensemble qui débouche sur des séquences téléphonées, qui manquent quelque peu de dramaturgie.
À cette dimension politique s'ajoute la crise existentielle de Jeanne, et son plongeon dans un passé ravivé par la douleur de voir partir sa fille de 18 ans. Une errance identitaire qui ne parvient pas tout à fait à émouvoir, même si la nostalgie joliment mise en scène par Marion Laine procure de brillants moments de flash-back.
La mort comme chape de plomb
Le casting est lui la vraie réussite du film, mêlant Brigitte Roüan, Aure Atika et la jeune Kenza Fortas, que l'on retrouve avec joie après son César du meilleur espoir (pour Shéhérazade de Jean-Bernard Marlin), impeccable ici dans ce rôle de stagiaire gouailleuse. L'association parfaite de ces actrices a priori opposées sauve Voir le jour, avec des seconds rôles soignés, parfaitement travaillés.
Adapté du roman Chambre 2 de Julie Bonnie, le film aborde la mort, réelle ou figurée, dès l'entrée en matière. Qu'il s'agisse des décès de nourrissons (0,4% des naissances nous est-il rappelé) ou de la fin d'un chapitre de vie, professionnel comme sentimental. Loin d'être un film noir, Voir le jour rappelle la violence du quotidien sans toutefois en faire des tonnes. Mais le film pèche à trouver son ton juste, sans cesse tiraillé entre une légèreté quasi comique et une dramatisation appuyée, ne faisait au final ni tout à fait rire, ni tout à fait pleurer.
La fiche
Genre : Comédie dramatique
Réalisateur : Marion Laine
Acteurs : Sandrine Bonnaire, Brigitte Roüan, Aure Atika, Kenza Fortas
Pays : France
Durée : 1h31
Sortie : 12 août 2020
Distributeur : Pyramide Distribution
Synopsis : Jeanne travaille comme auxiliaire dans une maternité de Marseille. Nuit et jour, Jeanne et ses collègues se battent pour défendre les mères et leurs bébés face au manque d’effectif et à la pression permanente de leur direction. Jeanne vit avec Zoé, sa fille de 18 ans, qu’elle élève seule. Lorsqu’un drame survient à la maternité et que Zoé part étudier à Paris, le passé secret de Jeanne resurgit soudain et la pousse à affirmer ses choix de vie.
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