Étoiles Michelin : "Les temps ont changé", selon un critique pour qui "le prisme de la gastronomie s'est totalement ouvert"
Après une édition publiée malgré la pandémie en 2021, le guide Michelin a rendu son palmarès, mardi 22 mars.
"Le Guide Michelin aimerait beaucoup être incontournable mais je pense que les temps ont changé", estime mardi 22 mars sur franceinfo le critique gastronomique François Simon. Selon lui, le Guide Rouge a du mal à suivre "le prisme de la gastronomie (qui) s'est totalement ouvert", poussé par les réseaux sociaux et la multiplication des émissions de télévision.
franceinfo : le Michelin reste-t-il année après année une référence incontournable en cuisine ?
François Simon : Je pense qu'il aimerait beaucoup être incontournable, mais je pense que les temps ont changé. Autant, il y a une trentaine d'années, on pouvait classer de façon verticale tous les restaurants parce qu'ils étaient à peu près dans le même registre, mais aujourd'hui, regardez autour de vous, il est de plus en plus difficile de comparer par exemple un osso bucco avec une blanquette, une galette complète, des sushis, des pâtes. Avant, c'était vertical et maintenant, c'est horizontal.
Est-ce une bonne nouvelle pour la cuisine ?
Oui, parce que maintenant, elle est multiple. On peut prendre autant de plaisir à aller dans un restaurant étranger et par exemple goûter un couscous. Je pense que le prisme de la gastronomie s'est totalement ouvert, d'où la difficulté pour le Michelin de pouvoir ranger tout ça. Ce qu'on aperçoit, c'est que maintenant, il y a une élite avec de très beaux restaurants, très intimidants. Et puis, il y a les autres restaurants qui sont autour de chez nous, où il y a beaucoup de femmes, qu'on ne voit pas du tout dans le Michelin ou quasiment pas.
"En fait, ce sont deux sociétés qui se côtoient sans déplaisir : la société politique des grandes tables et la société civile des bistrots et des restaurants que nous connaissons tous."
François Simon, critique gastronomiqueà franceinfo
Tout cela se fait autour d'une effervescence du phénomène culinaire. Il n'y a jamais eu autant d'émissions de télévision, de curiosités sur les réseaux sociaux... Elles permettent de démocratiser la bonne cuisine ?
Avant, la télévision nous réunissait autour des pièces de théâtre, des émissions historiques. Maintenant, nous nous retrouvons autour de la nourriture. Tout le monde peut en parler puisqu'on becte, on mange, on goûte trois ou quatre fois par jour. Ce qui est formidable, c'est que tout le monde peut avoir son propre goût. Chacun a son mauvais goût, moi le premier, et son bon goût. Le Michelin, finalement, il essaie de ranger tout ça mais il est dans une autre galaxie à mes yeux.
Reste-t-il tout de même un effet Michelin pour ces établissements ?
Bien sûr ! Si vous connaissiez le bonheur de ces gens-là ce soir quand une étoile arrive sur leur restaurant, ils pleurent toutes leurs larmes. Moi, j'aurais surtout une pensée pour ceux qui perdent leur étoile et dire qu'il ne faut surtout jamais désespérer. Comme disait Paul Bocuse, un restaurant qui est plein, c'est un restaurant qui a toujours raison, donc haut les cœurs !
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