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Culture : un tableau de Chagall spolié pendant la Seconde Guerre mondiale restitué aux héritiers de son propriétaire

Pour Orna, l'une des ayant-droits de Marc Cender, qui s'est fait voler une œuvre du peintre Marc Chagall par les nazis, c'est "un merveilleux conte de fées".

Article rédigé par Anne Chépeau
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
Le tableau "Le Père", de Marc Chagall, a été restitué aux ayants-droit de son propriétaire Marc Cender, spolié par les nazis pendant la Seconde guerre mondiale. (ANNE CHEPEAU / RADIO FRANCE)

Deux des cinq ayants-droit de David Cender avaient fait le voyage jusqu'à Paris, vendredi 1er avril, depuis Israël et le Canada pour un événement très particulier : la restitution du tableau Le Père, de Marc Chagall. Spolié pendant la Seconde Guerre mondiale, il leur a été remis, plus de 80 ans après le vol de l'œuvre par les nazis. 

David Cender, un luthier juif polonais, avait acheté le tableau de Marc Chagall en 1928 avant d’en être dépossédé par les nazis après son arrestation en 1940. "Il y a sept ans, j'ai pensé que c'était un merveilleux conte de fées parce que, jusqu'en 2015, on n'avait jamais entendu parler de ce tableau", se souvient Orna, sa petite nièce, présente lors de la restitution avec un autre petit neveu. La joie et la surprise se sont mêlées quand ils ont appris que le tableau appartenait à leur aïeul.

"Mon grand oncle ne l'avait jamais évoqué. Je pense que, comme beaucoup de survivants de l'Holocauste, il n'a pas voulu parler de son passé et notamment pas de ce tableau magnifique."

Orna, petite nièce de Marc Cender, propriétaire spolié du tableau de Chagall

à franceinfo

Le Père est un portrait du père de Marc Chagall. Il est entré dans les collections du musée national d’Art moderne en 1988, après la mort de l’artiste, qui l'avait en effet racheté au début des années 1950 sans savoir qu’il avait été spolié. Les héritiers de Chagall ont fait le choix de le donner à l'État dans le cadre d'une dation, une disposition fiscale qui permet de payer les droits de succession avec des œuvres d'art. 

Depuis 1998, il était en dépôt au musée d’Art et d’histoire du judaïsme, qui le voit donc partir. "D'un point de vue moral c'est une très bonne chose", se félicite Paul Salmona, le directeur du musée. "Évidemment, pour les collections du musée, c'est une perte", reconnaît-il. "Mais la morale passe avant tout. On est particulièrement bien placés pour savoir à quel point il est essentiel que ce travail de recherche de provenance et de restitution des œuvres spoliées soit fait. De ce point de vue, c'est donc extrêmement positif."

Une loi votée au Parlement pour permettre la restitution

Le Père faisant partie des collections nationales, il a fallu que le Parlement vote une loi en février, pour autoriser sa restitution. "C'est une œuvre qui est entrée tout à fait normalement dans les collections nationales. Elle était donc normalement là pour toujours puisque les œuvres sont inaliénables quand elles entrent dans les collections", explique David Zivie, qui dirige la mission de recherche et de restitution des biens culturels spoliés. "On a compris très récemment, grâce au travail de recherche, que ce tableau avait été volé", raconte-t-il, expliquant que ce genre de restitutions est "rare". 

La loi qui a permis la restitution du tableau concernait 14 autres œuvres, dont un tableau du peintre Maurice Utrillo, qui sera prochainement restitué aux ayants-droit de son propriétaire spolié. Il y en aura "certainement d'autres à l'avenir", prédit David Zivie. 

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