Cet article date de plus de huit ans.

"Daido Tokyo" et "Cali clair-obscur"

Article rédigé par franceinfo
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 8min
  (©)

Plongez au cœur de Tokyo à travers l’œuvre de  Daido Moriyama, figure centrale de la photographie japonaise contemporaine. 

Puis découvrez le photographe colombien Fernell Franco, dans une rétrospective autour de la ville de Cali depuis les années 70.

 

  (©)

 

Daido Tokyo met à l’honneur le travail récent de l’artiste : en présentant un vaste ensemble de photographies couleur, l’exposition lève le voile sur un aspect méconnu et pourtant omniprésent dans son travail photographique depuis deux décennies. Daido Tokyo est également l’occasion pour la Fondation Cartier de commander au photographe une œuvre nouvelle : un diaporama inédit, réalisé avec des photographies noir et blanc et projeté sur plusieurs écrans, qui illustre à l’instar de ses photographies couleur, le flux constant de la vie urbaine, captant des fragments de ce bourdonnement imperturbable.

  (© Daido Moriyama Dog and Mesh Tights, 2014-2015 Courtesy of the artist / Getsuyosha Limited / Daido Moriyama Photo Foundation)
© Daido Moriyama Dog and Mesh Tights, 2014-2015 Courtesy of the artist / Getsuyosha Limited / Daido Moriyama Photo Foundation

Daido Moriyama

Marquée par les changements spectaculaires du Japon dans les décennies suivant la Seconde Guerre mondiale, la génération de photographes à laquelle appartient Daido Moriyama contribue à l’invention d’un langage visuel nouveau, voulant saisir les mutations d’une société nippone qui oscille entre tradition et modernité. Après des études de graphisme à Osaka, Daido Moriyama décide de se consacrer à la photographie et rejoint Tokyo en 1961… Ses images d’avant-garde, transgressives et pulsionnelles reflètent la contestation et la prise de conscience japonaise.

Images de Tokyo

Fasciné par l’étrange, l’inhabituel et l’extraordinaire du flux urbain, Daido Moriyama photographie la population de Tokyo et notamment celle du quartier de Shinjuku où il vit. On trouve, dans l’ensemble des photographies présentées, des panneaux publicitaires défraîchis, des vitrines miroitantes, des tuyaux aux formes insolites, ou encore des profils de tokyoïtes saisis sur le vif. Comme prises à la hâte, ces photographies témoignent de l’esthétique de l’instantané chère à l’artiste…

  (© © Daido Moriyama Dog and Mesh Tights, 2014-2015 Courtesy of the artist / Getsuyosha Limited / Daido Moriyama Photo Foundation)

© Daido Moriyama Dog and Mesh Tights, 2014-2015 Courtesy of the artist / Getsuyosha Limited / Daido Moriyama Photo Foundation

Couleur

Loin de s’opposer, les photographies couleur et noir et blanc se complètent dans l’œuvre de Daido Moriyama.

Si pour l’artiste les photographies en noir et blanc sont empreintes d’onirisme, la couleur parle sans équivoque de la réalité, du monde et des gens qui l’entourent lorsqu’il marche dans les rues de Tokyo : « Le noir et blanc exprime mon monde intérieur, les émotions et les sensations que j’ai quotidiennement quand je marche sans but dans les rues de Tokyo ou d’autres villes. La couleur exprime ce que je rencontre, sans aucun filtre, et j’aime saisir cet instant pour ce qu’il représente pour moi. Les premières sont riches en contraste, dures, et reflètent pleinement ma nature solitaire. Les secondes sont polies, sages, comme je me présente au monde. » Nées de la confrontation directe avec la ville, ces photographies reflètent la vision du monde de Daido Moriyama, où se mêlent l’intime et le réel.

Dog and Mesh Tights

Avec le diaporama Dog and Mesh Tights conçu spécialement pour l’exposition le regard, Daido Moriyama se porte sur ce qui passe souvent inaperçu au sein du tumulte urbain.

  (© Daido Moriyama Dog and Mesh Tights, 2014-2015 Courtesy of the artist / Getsuyosha Limited / Daido Moriyama Photo Foundation)
© Daido Moriyama Dog and Mesh Tights, 2014-2015 Courtesy of the artist / Getsuyosha Limited / Daido Moriyama Photo Foundation

 

  (©)

 

**La Fondation Cartier pour l’art contemporain présente la première rétrospective européenne consacrée à Fernell Franco, figure majeure et pourtant méconnue de la photographie latino-américaine.

Photojournaliste de profession, Fernell Franco réalise en parallèle un travail personnel expressif dédié à la précarité et aux contrastes urbains de Cali, ville où il a vécu et travaillé presque toute sa vie.

L’exposition réunit plus de 140 photographies issues de 10 séries différentes réalisées entre 1970 et 1996, et met en lumière l’importance du travail de Fernell Franco au sein de la riche scène artistique de Cali qui émerge au début des années 1970.

En hommage à Fernell Franco, l’artiste colombien Oscar Muñoz réalise une nouvelle œuvre spécialement pour l’exposition.

 **

  (© Fernell Franco, Série Pacifico, 1988 © Fundación Fernell Franco, Cali)
Fernell Franco, Série Pacifico, 1988 © Fundación Fernell Franco, Cali

Les débuts

« La nuit, à la campagne, on assiste au spectacle des étoiles dans le ciel. Ce que j’ai compris en arrivant à Cali, c’est que les étoiles étaient sur Terre. »

Fernell Franco

Enfant pendant la guerre civile la Violencia qui fait rage en Colombie entre 1948 et 1953, Fernell Franco fait partie des milliers de réfugiés qui fuient la campagne pour s’installer dans les quartiers pauvres et marginalisés de Cali. Il commence très tôt à travailler et apprend la photographie en autodidacte alors qu’il est coursier dans un studio photographique, puis en tant que fotocinero (photographe professionnel ambulant).

En 1962, il travaille comme photoreporter pour El País et Diario Occidente , puis comme photographe de mode et de publicité pour des magazines comme Diners et Elite .

Son métier le confronte alors quotidiennement à la violence et aux inégalités de la société colombienne l’artiste documente ainsi tout autant les émeutes urbaines et les violences du pays, que les cocktails de l’élite de Cali…

  (© Fernell Franco Série Interiores, 1983 © Fundación Fernell Franco, Cali)

Fernell Franco Série Interiores, 1983 © Fundación Fernell Franco, Cali

Au-delà de la Photographie documentaire : un nouveau langage visuel

« J’étais à la recherche de choses banales – des choses qui se passaient dans la ville au quotidien, qui arrivaient dans la vie des gens normaux. Des choses différentes du travail que je faisais dans la publicité et la photographie de mode. »

Fernell Franco

Poussé par une recherche artistique intime, Fernell Franco réalise plusieurs séries photographiques saisissantes consacrées aux communautés marginalisées, aux destructions, aux transformations urbaines.

Son style se différencie de celui de la photographie documentaire sociale – qui prédomine alors en Amérique latine – où l’image transmettait son message de la façon la plus directe possible… Mettant l’accent sur la qualité expressive de ses photographies, il accentue les contrastes entre ombre et lumière, joue sur le grain de ses tirages et intervient souvent sur ses photographies en les rehaussant au crayon ou à l’aérographe.

Influencé par les effets de clair-obscur des films noirs américains et par le cinéma néoréaliste italien qu’il a découverts enfant, Fernell Franco confère à ses œuvres une dimension cinématographique en y intégrant des éléments de narration et de temporalité.

Prostitutas (1970) est l’une de ses plus célèbres séries : elle met en scène des femmes et des jeunes filles travaillant dans l’une des dernières maisons closes de la ville de Buenaventura.

  (© Fernell Franco, Série Festivales, 1982 © Fundación Fernell Franco, Cali)
Fernell Franco, Série Festivales, 1982 © Fundación Fernell Franco, Cali

 

Pour plus d’information :

www.fondation.cartier.com

Fondation Cartier pour l’art contemporain

261, boulevard Raspail, 75014 Paris

 

Lancez la conversation

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour commenter.