Le drapé, un art de la délicatesse au Musée des Beaux-arts de Lyon
Le drapé, c'est tout un art et toute une histoire que le Musée des Beaux-arts de Lyon raconte dans une très belle exposition où l'on découvre la fascination des artistes pour le jeu des étoffes.
Sobrement intitulée Drapé, cette exposition du Musée des Beaux-arts de Lyon regroupe jusqu'au 8 mars 2020 près de 250 oeuvres sur une période allant de la Renaissance à nos jours et signées des plus grands artistes : Degas, Ingres, Dürer, Moreau, Rodin, Picasso, Christo, Man Ray, Ernest Pignon-Ernest... Qu'ils soient peintres, sculpteurs, photographes, vidéastes, tous ont un jour tenté de saisir les jeux d'ombres et de lumière, les transparences de l'étoffe pliée ou déployée.
Du nu au drapé
L'exposition ne suit pas un ordre chronologique, s'attachant davantage aux processus de création des œuvres. De très nombreux dessins et croquis préparatoires sont exposés mais également les supports qui ont servi aux artistes dans leurs ateliers : figurines de cire ou de bois, mannequins et modèles vivants.
Car avant de restituer la complexité d'un drapé jeté sur le corps, il faut souvent passer par le dessin du corps nu. A l'origine de cette règle, un constat simple : la draperie n’a pas de forme en soi. Son apparence est soumise à la forme même du nu que la draperie se doit de "caresser" et de "faire sentir", au point parfois de dégager une certaine sensualité.
On découvre ainsi le cheminement de Jean-Baptiste Ingres pour son Illiade ou de Gustave Moreau représentant Salomé dansant devant Hérode. Environ trente-cinq dessins sont consacrés à la figure de l’héroïne juive vue en pied dont il avait commencé l’étude en 1869.
L'art du drapé
Savoir rendre le drapé : dans les écoles d'art, cet exercice a longtemps fait figure de test pour vérifier la maîtrise du dessin. On a tous en tête ces statues antiques, où l'étoffe se démultiplie en fronces et en savants plissés. Si on est admiratif d'une telle maîtrise, on trouve parfois l'exercice un peu désuet car symbole d'un certain académisme.
Et pourtant l'exposition montre bien à quel point les artistes, même les plus avant-gardistes ont été nourris de cet académisme. "On en a un très bel exemple avec Picasso" commente Sylvie Ramond, directrice du musée des Beaux-arts de Lyon et commissaire de l'exposition. "Quand il va travailler aux Trois femmes à la fontaine, il va faire un tableau qui s'inspire de Nicolas Poussin [ndlr : Eliézer et Rébecca -1649, musée du Louvre], de la Grèce antique. Au même moment, dans l'été 1921, il va peindre d'autres tableaux à la manière des cubistes, avec un vocabulaire d'avant-garde. Mais en peignant à la manière des maîtres anciens, il veut dire qu'il est capable de peindre des nus et des drapés".
Version contemporaine
Le drapé s'invite aussi de façon surprenante dans des oeuvres très contemporaines à l'image de ces photos de migrants pris dans leur sommeil par Mathieu Pernot, le corps entièrement enveloppé dans un tissu, tête comprise. Des clichés qui questionnent, voire qui dérangent. Mais pour Sylvie Ramond, "ces images s'inscrivent dans l'histoire de l'art, une histoire des formes, de l'art du drapé et du plissé. Elles présentent un contraste émouvant : une actualité qui fait la Une des médias et des images qui renvoient à une dimension abstraite de silence".
"Drapé"
Musée des Beaux-arts
20 place des Terreaux
69001 Lyon
Tous les jours de 10h à 18h, vendredi de 10h30 à 18h. Ouverture tardive jusqu’à 22h jeudi 5, vendredi 6 et samedi 7 mars 2020.
Tarifs : 12€ / 7€ / Gratuit
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