Festival de la BD d'Angoulême : polémique après l'absence de femmes dans la liste du Grand prix
En lice pour obtenir la prestigieuse récompense, Riad Sattouf a refusé, mardi, sa nomination en guise de protestation.
Le festival d'Angoulême est sous le feu des critiques. Plusieurs professionnels de la bande dessinée se sont insurgés de l'absence de femmes dans la liste des prétendants au Grand prix de l'édition 2016 de l'événement, publiée mardi 5 janvier.
Ce prix a été créé en 1974 pour récompenser l'ensemble de la carrière d'un auteur. Mais il n'a été décerné qu'une fois à une femme, Florence Cestac, en 2000.
"On voudrait décourager les femmes qu'on ne s'y prendrait pas autrement"
Sur son site, le collectif des créatrices de BD contre le sexisme, qui rassemble des professionnelles du secteur, s'insurge. "Nous nous élevons contre cette discrimination évidente, cette négation totale de notre représentativité dans un médium qui compte de plus en plus de femmes", indiquent-elles.
Et de s'interroger sur "le message envoyé aux autrices de bande dessinée. On voudrait les décourager à avoir de l’ambition, à poursuivre leurs efforts, que l’on ne s’y prendrait pas autrement", écrit le collectif, avant d'appeler au boycott des votes pour cette récompense.
Riad Sattouf refuse sa nomination
Ce collectif n'est pas le seul à s'indigner face à la liste retenue par les organisateurs du festival. Sur Twitter, amateurs et professionnels de la bande dessinée ont manifesté leur mécontentement via le mot-dièse #WomenDoBD ("les femmes font de la BD"). Et d'en profiter pour évoquer les œuvres remarquables publiées par des femmes.
Voilà quelques BD que j'ai lues cette année par Fiona Apple, Annie Wu, Linda Medley, Tanx... #womendobd pic.twitter.com/SnSAoLUVuf
— Guillaum sans E (@Grillaum) 5 Janvier 2016
La secrétaire d'Etat chargée des Droits des femmes, Pascale Boistard, a également publié un message sur Twitter, qualifiant de "légitime" la demande de reconnaissance du collectif contre le sexisme.
J'ai reçu en décembre le collectif des créatrices de BD contre le sexisme. Leur demande de reconnaissance est légitime #womendoBD #Angoulème
— Pascale Boistard (@Pascaleboistard) 5 Janvier 2016
Enfin, l'auteur de L'Arabe du futur, Riad Sattouf, lui-même en lice pour le Grand prix, a indiqué sur sa page Facebook qu'il renonçait par avance à la récompense, "gêné" par l'absence de "grandes artistes qui mériteraient d'y être".
Bonjour! J'ai découvert que j'étais dans la liste des nominés au grand prix du festival d'Angoulême de cette année....
Posté par Riad Sattouf sur mardi 5 janvier 2016
Les organisateurs se défendent
Devant le déferlement de critiques, le festival a fini par réagir. Interrogé par Libération, le délégué général Franck Bondoux s'est dédouané, jugeant que les organisateurs n'étaient pas responsables du manque de femmes dans le milieu de la BD. "L'histoire de la BD jusqu’aux années 80 est essentiellement d’obédience masculine (...) On ne va pas instaurer des quotas. Le critère doit-il être absolument d’avoir des femmes ? Le Festival reflète la réalité de cet univers", a-t-il expliqué, rappelant que d'autres prix étaient plus paritaires.
Atterrée par sa réaction, la dessinatrice Mirion Malle lui a répondu sur Twitter.
Incroyable ! Quelle réaction étonnante ! Sexisme puissance dix mille on adore (non) pic.twitter.com/38elSsMR14
— Mirion Malle (@ohhmarion) January 5, 2016
Bien sûr, tous ces arguments peuvent facilement être balayés rien que par des contre-exemples mais pourquoi s'embêter à réfléchir ??
— Mirion Malle (@ohhmarion) January 5, 2016
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