"Elden Ring", le phénomène présenté comme le jeu vidéo de l’année est-il vraiment fait pour vous ?
Disponible depuis le 25 février, "Elden Ring" était extrêmement attendu par tous les fans du studio From Software. Les développeurs japonais offrent à la saga des "Souls" une suite particulièrement ambitieuse, pour la première fois en monde ouvert. Mais il faut savoir que le jeu n'est pas à la portée de tous.
À peine sorti, le jeu Elden Ring s'est déjà attiré de nombreux commentaires dithyrambiques. Avec une note de 97% sur le site Metacritic qui recense les évaluations de plusieurs dizaines de médias spécialisés, le dernier né de From Software se place déjà au niveau de GTA V ou de Zelda Breath of the Wild dans le classement des meilleurs jeux vidéo de tous les temps. Pourtant, une partie des joueurs émettent des avis beaucoup plus nuancés et se montrent parfois déçus. Alors, à quel public ce jeu est-il destiné ?
Difficile et exigeant
Le studio From Software s’est fait connaitre avec sa série des Souls débutée en 2009 par Demon’s Souls suivi d’une trilogie Dark Souls entre 2011 et 2016. Son univers fantastique très sombre et mélancolique fait rapidement mouche auprès d’un public qui se complait dans la difficulté inhérente au titre. Car les “Souls” sont des jeux qui se méritent ! Ici pas d’armes, de sorts ou de compétences surpuissants qui permettent de balayer les ennemis d’un revers de la main, le joueur doit observer pour apprendre et progresser. La mort du personnage incarné est régulière et fait partie intégrante du jeu. Il faut donc être prêt à recommencer inlassablement, ce qui peut rapidement décourager les joueurs les moins acharnés.
Elden Ring s’inscrit définitivement dans cette approche. Même si certains puristes le trouvent plus accessible que ses prédécesseurs, il n’en reste pas moins un jeu difficile et exigeant. Mais le titre, comme la série, ne se réduit pas à cet aspect car la récompense, au bout du compte, est à la hauteur de l'investissement.
Graphismes décevants, narration sommaire
Une des grandes nouveautés d’Elden Ring, c’est bien sûr son monde ouvert. Nul besoin d’être de nature dépressive pour apprécier la beauté mélancolique qui se dégage de cet univers à la direction artistique étincelante. Pourtant, techniquement, le titre souffre vraiment de la comparaison avec le dernier Horizon : Forbidden West. On a parfois l’impression de jouer à un jeu qui serait sorti il y a une dizaine d’années. Si vous êtes un féru d’images irréprochables avec un piqué à vous fendre la rétine, la déception sera profonde.
Vous évoluez dans l’Entre-Terre, un monde médiéval très sombre peuplé d’humains dont on ne sait s’ils sont morts ou vivants. Impossible d’espérer faire un brin de causette avec ces derniers qui vous attaquent à vue. Des ruines délabrées et des arbres fantomatiques abritent des monstres tout aussi belliqueux dont certains vous renverront à la tombe d’un simple coup de patte. R.R. Martin, l’auteur de Game of Thrones, a collaboré à l’élaboration du titre. Mais ne vous attendez pas à tomber sur des intrigues de cour ou des complots, la narration est ici des plus sommaires. Quelques indications vous sont données au fil de l’eau par de rares rencontres mais vous évoluez la plupart du temps à l’aveuglette.
C’est ce qui fait le charme et la particularité d'Elden Ring mais c’est également ce qui peut en décevoir certains. Comme le personnage qu’il incarne, le joueur est laissé à l’abandon et doit apprendre par lui-même où il se trouve et ce qu’il doit faire. L’exploration est essentielle et n’est souvent motivée que par un détail du décor qui accroche l’œil. Porte dérobée, souterrains, ruines, il faut fureter partout pour trouver les trésors cachés. Car le credo d’Hidetaka Miyazaki, le créateur de la série des Souls, c'est d’obliger les joueurs à fouiller, se tromper, échouer et malgré tout continuer jusqu’à trouver la solution pour abattre un adversaire coriace ou simplement avancer. Le monde est particulièrement vaste et contient nombre de panoramas magnifiques et de donjons titanesques où il est facile de se perdre.
Jouer son propre rôle
Pour créer votre héros et partir à l’aventure, vous avez le choix entre des catégories de personnages classiques ou d’autres plus torturés, comme ce prisonnier bien flippant à la tête enfoncée dans un masque de fer. Cette partie création est particulièrement complète même si parfois on a l’impression, là aussi, de se perdre dans des tableaux chiffrés d’un autre âge. Les puristes préféreront sans doute l’indigent : un homme ou une femme de niveau 1, vêtu d’un simple pagne et dont les caractéristiques sont toutes identiques. Idéal pour se construire une personnalité au fil de la progression. Car il y a bien évidemment de l'expérience à gagner et du matériel à récupérer, même si on reste là encore dans l'esprit des Souls. En combattant, vous générez des éclats qui servent à la fois à acheter des objets et à monter de niveaux. Mais lorsque vous mourrez, l’intégralité de ces éclats reste à l’endroit où vous avez péri. En allant les chercher directement vous pouvez les récupérer, mais si vous subissez un sort plus funeste entre temps, tout est perdu !
Ne vous attendez cependant pas à devenir un champion rapidement en montant de niveau, car les gains sont assez légers. Encore une fois, ce qui fera la vraie force de votre personnage, c’est votre propre capacité à maîtriser vos compétences de combat et l’observation des routines de vos adversaires.
Adressé aux plus courageux
Quel public se trouvera conquis par le jeu ? En premier lieu, les fans de la série des Souls qui, pour la plupart, retrouveront leurs sensations habituelles avec quelques nouveautés dont ce gigantesque monde ouvert. Les curieux également, qui chercheront à découvrir le sens caché et la poésie inhérente aux œuvres d’Hidetaka Miyazaki. Même si la difficulté peut être rebutante au début, il y a un vrai plaisir dans le fait de réussir à vaincre un boss particulièrement retors, un sentiment d’accomplissement qui vient récompenser l’acharnement mais aussi l’exploration. C’est un monde immense rempli de trésors cachés et le fait de ne pas être tenu par la main offre une liberté sans égale à l’aventurier qui sommeille en nous.
Mais si vous aimez que l’on vous raconte une histoire aux multiples rebondissements avec des personnages hauts en couleur, le jeu n’est clairement pas pour vous. Si vous vous attendez à revivre un Skyrim ou un Assassin’s Creed Valhalla, vous risquez une amère déception. En plus de son moteur vieillissant, le gameplay n’est pas de première fraîcheur et en dehors des boss, les combats peuvent vite devenir rébarbatifs. Le côté “old school” du titre participe toutefois à l’immense poésie qui se dégage de cette œuvre. Une bonne technique n’est pas forcément synonyme d’un bon jeu et c’est parfois dans les vieux pots qu’on fait les meilleures soupes.
Elden Ring n’en demeure pas moins une réussite qui nous fait nous interroger sur le sens du mot jouer. Jusqu'où sommes-nous prêts à aller, quels “sacrifices” pouvons-nous faire pour nous amuser ? Mourir et recommencer inlassablement jusqu’à parvenir à se dépasser, est-ce vraiment un plaisir ? À l’inverse, consommer un jeu vidéo trop facilement comme on regarderait un film, est-ce encore jouer ? Les réponses sont bien évidemment multiples et chaque joueur les trouvera en fonction de ses propres envies et accomplissements.
"Elden Ring", disponible sur PS5 et PS4, Xbox One et Séries et PC
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