Assassin's Creed Unity : comment recrée-t-on le Paris de 1789 avec des pixels ?
Le huitième opus de la célèbre saga de jeux vidéo sort jeudi. Il se déroule à Paris pendant la Révolution française. Francetv info revient sur une conception hors-norme.
Qui n'a pas eu envie, en visitant Paris, de monter sur les hauteurs de la ville pour en admirer les monuments ? D'escalader le clocher de la cathédrale Notre-Dame et de taper la causette au fantôme du bossu de Victor Hugo ? Quelques accros de la grimpette ont déjà escaladé l'édifice, au péril de leur vie. Pour les autres, il y a désormais le jeu Assassin's Creed Unity.
Dans ce huitième opus de la saga électronique, qui débarque dans les boutiques ce jeudi 13 novembre, le joueur évolue dans le Paris de la Révolution française et de la Terreur. Au fil de l'histoire, le héros cascadeur Arno rencontre Robespierre ou Napoléon Bonaparte.
Dans le monde du jeu vidéo, on attendait Assassin's Creed Unity (ACU) comme on salive avant la sortie d'un blockbuster au cinéma. Et pour cause, Ubisoft a promis d'offrir aux joueurs "le plus large terrain de jeux de l'histoire de la franchise". Depuis plusieurs semaines, les développeurs se vantent d'avoir réussi à recréer la capitale avec un réalisme jamais vu jusque-là. Statues, horloges et monuments ont été recréé à l'identique. La preuve avec cette vidéo du site américain IGN.
"Un immense puzzle"
Comme Rome, Paris n'a pas été construite en un jour. La carte d'Assassin's Creed Unity non plus. Ubisoft a commencé à travailler sur le jeu en 2010, tout de suite après la sortie du précédent opus, Assassin's Creed : Brotherhood, indique le site américain spécialisé Game Informer (article en anglais). En plus d'Ubisoft Montréal, neuf autres studios ont mis la main à l'iPad pour modéliser la capitale, explique la rédaction de jeuxvideo.com.
Contrairement à d'autres jeux vidéo, où le personnage évolue face à des images de fond comme un présentateur de météo devant un fond vert, dans ACU, les immeubles ont tous été recrées, avec des pixels et des briques. Et les joueurs ont la possibilité d'escalader tous les bâtiments pour se déplacer. Le héros virevolte sur les façades d'immeubles, comme il court sur le sol. La carte est à la fois horizontale et verticale.
Au total, sept quartiers de Paris, du Louvre au Marais, en passant par la Bièvre et les Invalides, ont été modélisés. Et plus on s'approche du cœur de l'intrigue, sur l'île de la Cité, plus les bâtiments sont à taille réelle. Après avoir identifié les lieux à reproduire, les développeurs ont dû passer à la laborieuse étape de la réalisation : immeuble par immeuble, pâté de maisons par pâté de maisons.
Chaque élément du décor est modélisé de son côté, pour être ensuite assemblé aux autres "comme dans un immense puzzle, explique Caroline Miousse, designer chez Ubisoft Montréal et responsable de la modélisation de Notre-Dame de Paris. Chaque module a son utilité et va à un ou plusieurs endroits très spécifiques. Si jamais on veut en modifier un, cela en affecte parfois dix autres. On nomme cela l’effet domino."
Quatorze mois de travail pour Notre-Dame
Véritable symbole de Paris, à une époque où le fer de la Tour Eiffel n'était même pas encore extrait des mines, Notre-Dame est le cœur de l'intrigue d'ACU. Les développeurs ont décidé de recréer la bâtisse à taille quasi-réelle.
La cathédrale a représenté le plus gros challenge pour l'équipe québécoise. "Lorsqu'on commence, c'est beaucoup de recherches. Il y en a eu d'ailleurs tout le long du processus de création, notamment pour apprendre l'architecture religieuse. C'est très important que le résultat soit le plus cohérent et plausible possible, on ne sait pas qui sont nos joueurs, ça peut très bien être des architectes", explique Caroline Miousse, qui avoue être encore "obsédée" par le monument parisien.
Rien que pour Notre-Dame, il a fallu quatorze mois de travail intensif et trois millions de polygones. Un travail d'orfèvre réalisé à partir de 4 000 photos et d'autres sources immédiatement disponibles sur internet, notamment celles issues de Google Maps. Fait étonnant : Caroline Miousse ne s'est rendue à Paris qu'après avoir réalisé le bâtiment.
La designer a aussi collaboré avec des artistes spécialisés dans les textures pour modéliser chacune des briques, explique le site américain The Verge (en anglais). Des historiens ont également été appelés à la rescousse, afin d'aider à replacer les peintures de l'époque, qui ont désormais disparu.
"On ne peut pas tout recréer exactement !"
Les puristes remarqueront tout de même que certains détails manquent et que des anachronismes subsistent. L'orgue à l'intérieur de la cathédrale, par exemple, n'a pas pu être modélisé à l'identique parce qu'il est protégé par un droit d'auteur, explique Melty.fr. La flèche en pierre au sommet de la cathédrale, sur laquelle on peut grimper dans le jeu, n'existait pas à l'époque.
Autre erreur historique : la Bastille. La forteresse est présente jusqu'à la fin du jeu, alors qu'elle devrait normalement être détruite dès le début de la Révolution, à partir du 14 juillet 1789. "Le but n'est pas d'être historiquement juste à 100%, se justifie le directeur artistique Mohamed Gambouz sur le site The Verge (lien en anglais). C'est de proposer au joueur un cadre crédible, une ville crédible."
Assassin's Creed est un jeu vidéo et n'a pas la prétention d'être une reconstitution historique. Une telle opération n'était de toute façon pas réalisable. La ville comporte trop d'édifices différents, de rues, de souterrains. "Pour New York ou Boston pendant la Révolution américaine (le décor d'Assassin's Creed III), nous avons dû déterrer beaucoup d'informations, car beaucoup de choses avaient été détruites, explique quant à lui Maxime Durand, historien chez Ubisoft, toujours dans The Verge. A Paris, c'est l'inverse : tout est intéressant et nous sommes obligés de décider d'enlever certaines choses."
Trop audacieux pour les consoles
Malgré cette conscience des contraintes, Ubisoft a tout de même été un peu trop ambitieux avec Assassin's Creed Unity, aux vues des nombreux bugs dont se plaignent les premiers joueurs. Depuis la sortie du jeu aux Etats-Unis, mardi 11 novembre, une pluie de commentaires de fans déçus s'abat sur les sites spécialisés, comme Steam. "Une énorme surprise (dans le graphisme), malheureusement autant de déception niveau optimisation", résume l'un d'entre eux.
Chaque fois, les joueurs se plaignent des sauts d'images et de la lenteur du jeu, dû à l'excès de détails, mal digéré par les consoles. Ubisoft avait annoncé qu'Assassin's Creed Unity tournerait à 30 images par seconde et en 900p sur la Sony PlayStation 4 et la Microsoft Xbox One. Soit à très haute définition. Le nombre d'images chute en réalité régulièrement à 20 par secondes, selon le site Hitek, ce qui crée des bugs.
Assassin's Creed Unity qui rame sur PS4 par hitekfr
Les mauvaises langues diront que les temps de chargement sont tellement longs que l'on peut en profiter pour apprendre la véritable histoire de la Révolution française dans un bon vieux bouquin.
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