Le philosophe et académicien René Girard est mort
Le théoricien humaniste, spécialiste de la question religieuse, a terminé sa vie aux Etats-Unis où il vivait depuis presque 70 ans
Le philosophe et académicien français René Girard est mort mercredi 4 novembre à l'âge de 91 ans aux Etats-Unis. C'est l'université de Stanford, où l'éminent théoricien a longtemps enseigné, qui l'a annoncé dans un communiqué : "Le renommé professeur français de Stanford, l'un des 40 immortels de la prestigieuse Académie française, est décédé à son domicile de Stanford mercredi des suites d'une longue maladie."
Passé par l'Ecole des Chartes, archiviste-paléographe de formation, René Girard était installé depuis 1947 aux Etats-Unis. Il y a enseigné dans de nombreuses universités comme Duke, Johns Hopkins et surtout Stanford, où il a longtemps dirigé le département de langue, littérature et civilisation française. Il a terminé sa carrière académique à Stanford en 1995, où il vivait depuis.
L'homme du "désir mimétique"
Girard a commencé sa carrière en tant que théoricien littéraire fasciné par toutes les sciences sociales: histoire, anthropologie, sociologie, philosophie, religion, psychologie et théologie. Catholique pratiquant, né le jour de Noël 1923 en Avignon, il a beaucoup écrit sur la diversité et l'unité des religions. Cet humaniste, dont le père était conservateur de la bibliothèque et du musée Calvet d'Avignon, puis du palais des Papes, a fondé sa pensée sur les écritures saintes, autant lues que les grands classiques de la littérature.
Il est connu pour son concept de "désir mimétique", qu'il définit ainsi: "C'est toujours en imitant le désir de mes semblables que j'introduis la rivalité dans les relations humaines et donc la violence". Pour lui, la Bible est une immense entreprise pour sortir l'homme de la violence. Il était l'auteur d'ouvrages comme Mensonge romantique et vérité romanesque (1961), La Violence et le Sacré (1972), Shakespeare, les feux de l'envie (prix Médicis essai 90), Je vois Satan tomber comme l'éclair (1999) ou Celui par qui le scandale arrive (2001).
L'Académie, "la reconnaissance" en France
Largement traduite, souvent admirée hors de nos frontières, comme aux Etats-Unis ou en Italie, l'œuvre de René Girard reste assez mal connue du grand public en France. "Pour un intellectuel qui a longtemps été considéré comme un auteur à contre-courant et atypique, l'élection à l'Académie est une forme de reconnaissance", déclarait-il le 15 décembre 2005, jour de sa réception à l'Académie française.
S'il était parfois négligé en France, ses livres traduits dans le monde entier "ont offert une vision audacieuse et vaste de la nature, de l'histoire et de la destinée humaine", selon l'université Stanford. Le philosophe Michel Serres, également académicien et professeur de Stanford, l'a surnommé "le nouveau Darwin des sciences humaines", rappelle la prestigieuse institution américaine dans son communiqué.
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